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Une oeuvre d'art est-elle un objet sacré ?

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« La réponse est évidente si on s'arrête aux objets d'art cultuels, une sculpture du Christ, Une église, une cathédrale, une synagogue, les statues qui servaient au culte des dieux antiques.

Le problème réside plutôt de savoir si les oeuvres d'art dites profane génère-t-elle un sentiment proche du sacré ? Est-ce que par le fait qu'elles sont des oeuvres d'art, elles acquièrent un statut qui les met à part des autres objets.

Qu'est-ce qui dans une oeuvre d'art permet de ressentir ce sentiment de sacré ? L'art contemporain a mis à mal ce sentiment.

Le retrait du divin de la sphère de l'art a certainement contribué à supprimer ce sentiment en simple respect pour des oeuvres de valeur. 1) la dissolution du caractère sacré de l'oeuvre d'art. W.

Benjamin dans L'oeuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique, met au jour le problème fondamental de la reproduction en masse des oeuvres d'art.

Cette reproduction fait perdre l' « aura » des oeuvres d'art.

C ette dernière se définit comme « l'apparition unique d'un lointain, aussi proche soit-il », une définition qui renvoie aux origines cultuelles de l'art et qui postule, chez son destinataire, une attitude contemplative.

Benjamin, à l'inverse, prend appui sur la photographie ou le cinéma (avec ses montages pouvant faire choc) pour explorer les fondements et les finalités d'un art opératoire capable de donner prise sur le monde : soit, pour retourner la formule précédente, l'apparition multiple d'un proche, aussi lointain soit-il.

Ce proche, on peut l'appeler trace, par opposition à l'aura : « Dans la trace, nous nous saisissons de la chose ; dans l'aura, elle s'empare de nous.» En réalité, c'est l'appropriation par l'homme des oeuvres d'art, en les mettant à sa portée qui désacralise l'art.

Mais, cette proximité avec l'art est une proximité réduite, les oeuvres sont rendus à taille humaine.

Vivre au milieu des oeuvres d'art est difficile, qui pourrait vivre avec la chapelle Sixtine à son plafond ? Il y a un sacré dans l'oeuvre d'art qu'il faut expliquer. 2) L'oeuvre d'art comme foyer du sacré. On ne peut ramener tout le sacré à l'être en tant que tel.

L'expression de l'intelligible dans le sensible ne peut suffire à faire de l'oeuvre d'art quelque chose de sacré.

Heidegger pense que l'oeuvre d'art est dévoilement de la vérité de la chose.

L'oeuvre installe un monde, ce n'est pas elle qui est installée. L'oeuvre rayonne, elle a une aura.

Ce qui enlève le sacré de l'oeuvre d'art, c'est « l'ici et le maintenant » de la véritable présence de l'oeuvre d'art.

Il se fait souvent un silence quasi religieux face à une oeuvre d'art digne de ce nom.

A l'exemple du romantisme qui a voulu rénover le sentiment religieux, la peinture de Caspar David Friedrich, Le retable de Tetschen, peinture de paysage représentant un Christ sur une montagne éclairée par le soleil Une oeuvre d'art ne mérite pas un discours mais une prière car la contemplation d'une peinture élève notre âme vers Dieu.

La contemplation esthétique est une expérience intime d'union avec l'esprit du C réateur.

Cette pensée qu'on pourrait appliquée au Retable exprime ce désir d'union de la nature, de l'art et de la religion en vue d'une certaine totalité Tout homme devant la nature éprouve un certain sentiment du divin. Heidegger: Le rapport de l'art et de la vérité Heidegger a posé la question de l'origine de l'oeuvre d'art : celle-ci est avant tout une chose.

Une peinture est avant tout un tableau, présenté d'exposition en exposition, ou siégeant dans un musée.

Mais Heidegger distingue trois types de choses : la chose naturelle, l'outil (défini par son utilité) et l'oeuvre.

Aristote a montré qu'une chose se compose d'une matière (hylè) qui reçoit une forme (morphé, eidos).

Par sa matière, l'oeuvre d'art est donc une chose comme toutes les autres.

Cependant, dans un objet utilitaire, la forme de la chose détermine le choix de sa matière : ainsi, pour fabriquer une enclume, on choisira un acier dur, capable de supporter les chocs et la chaleur.

Or on interprète en général les choses naturelles et les oeuvres d'art à partir de la fabrication des outils, par anthropomorphisme.

L'homme se définissant comme fabricateur d'outils, il étend cette pratique et son processus à l'ensemble de l'étant, soit à la totalité des choses, de la même manière que l'on conçoit Dieu comme un créateur ex-nihilo, qui aurait tiré le monde du néant pour lui donner l'être par son travail.

Or, l'artiste ne fabrique pas des oeuvres d'art comme l'artisan fabrique des outils.

L'oeuvre d'art révèle la vérité des choses qu'elle représente.

Bien loin d'être une imitation, elle dévoile l'essence de l'être qu'elle produit au sens non technique du terme : une production (poiesis) qui trouve sa propre finalité en elle-même, qui dévoile ou laisse apparaître ce qui était caché, latent.

"C'est poétiquement que l'homme habite cette terre [...] et ce qui demeure est instauré par les poètes." 3) le paradoxe du sacré et de l'oeuvre d'art : l'iconoclasme. La Grèce et l'Egypte antique donne figure à ses dieux, et de parallèlement, la philosophie s'interroge sur cette représentation, et mesure son accord avec la notion civique du divin et les formes reçus de sa représentation.

Il s'ouvre avec la philosophie ce qu'on appellera l'iconoclasme.

La postérité de Platon mettra à vif deux exigences contradictoires : le regard doit se tourner vers le divin et qui lui seul vaut la peine d'être contemplé et que le représenter est vain et inconcevable.

Mais cette pensée n'aboutira pas à la destruction des images.

La philosophie fût sans prise sur la cité qui ne cessait de multiplier les images.

La philosophie n'était pas unanime, Aristote pensait que le travail de l'artiste participait à la dignité divine.

Le stoïcisme ne s'opposait pas à une manifestation plastique des images.

Le culte impérial romain de même vit des images de l'empereur.

L'ancien testament interdit de son côté l'image.

Pour le judaïsme, c'est la distance infranchissable avec le divin qui est la raison de cette interdiction, pour l'islam c'est l'intimité familiale avec Dieu qui rend impossible la confection d'une image digne de son objet.

La théologie balise les conditions de possibilité de l'image divine.

Avec la conversion de Constantin, se développe l'image chrétienne en échange avec l'image impériale. Les arguments iconoclastes s'appuient sur des interdits bibliques et sur la critique de la philosophie grecque.

Paradoxalement, la meilleure théorie iconoclaste se trouve constitué à l'époque où l'art grec produisit ses plus belles images divines.

Un autre cycle s'ouvre avec les temps modernes, où l'iconoclasme cohabita avec les plus belles réalisations de l'histoire de l'art.

C'est avec retard que les idées iconoclastes sont devenues actives.

Les images furent produites en toute insouciance au Moyen- age et au-delà où le concile de Trente a été reçu.

L'image était conçue comme un support d'éducation pour le peuple.

Mais on voyait une dérive païenne dans cette utilisation de l'image.

Le second cycle iconoclaste commence avec Calvin.

Les images médiévales ont alors perçues comme le terreau de la superstition.

Hegel récapitulera avec sagacité l'histoire de l'image divine qu'il place au centre de toute réflexion sur l'histoire de l'art.

Selon lui, la révolution française a figé l'esthétique française dans le classicisme.

La religion de l'art et le symbolisme auront leur importance.

On recherche la sacré ailleurs jusqu'aux masques primitifs. Conclusion. L'oeuvre d'art a donc une sacralité qui ne ressort pas uniquement de la religion, elle possède une « aura », un rayonnement que peut affecter sa trop grande reproduction.

C'est aussi le paradoxe d'exprimer une réalité qui la dépasse, inexprimable, au-dessus de toute représentation sensible.

L'oeuvre serait déjà une expression dégradée du sacré et du divin.

La contemplation esthétique a quelque chose de divin, elle fait toucher l'homme quelque chose qui le dépasse : Dieu, l'être, la vérité, l'intelligible.

Ce contact n'est pas forcément l'objet d'un culte comme pour le sacré.. »

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