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Qu'est-ce qui différencie les beaux-arts de l'art de l'artisan ?

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« Ce n'est qu'au xviiie siècle que le terme d'art a été réduit à la signification que nous lui connaissons actuellement. Il avait jusque-là servi à désigner toute activité humaine ayant pour but de produire des objets : en ce sens, l'art s'oppose à la nature, qui est l'ensemble de tout ce qui se fait sans que l'homme ait à intervenir. L'art réclame toujours des règles : lorsque l'on est charpentier comme lorsque l'on est musicien, il faut observer des règles si l'on veut produire l'oeuvre désirée.

C'est exactement ce que veut dire le mot technè en grec : la technique, c'est l'ensemble des règles qu'il faut suivre dans un art donné. L'artisan a pour but de produire des objets d'usage : c'est l'usage qu'on va faire de l'objet qui détermine ses caractéristiques et donc la façon dont on va le fabriquer. L'artiste quant à lui ne vise pas l'utile, mais le beau.

Si l'habileté technique est la limite supérieure de l'art de l'artisan, elle est la limite inférieure des beaux-arts : alors qu'on attend d'un objet courant qu'il soit bien conçu et réalisé de façon à être d'usage aisé, on n'attend pas simplement d'un tableau qu'il soit bien peint, mais qu'il éveille en nous le sentiment du beau. Sujet 3985 Les beaux-arts s'opposent à la technique et à l'artisanat ? • Les beaux-arts s'opposent à la technique et à l'artisanat C'est à partir du XVIIIe siècle que l'art se distingue aussi bien de l'artisanat que de la technique et acquiert ainsi un statut spécifique.

D'où l'apparition de l'esthétique comme théorie des beaux-arts.

Et, dans la Critique de la faculté de juger esthétique (1791), Kant, même s'il ne prétend pas faire une théorie des objets beaux (car selon lui le beau n'est pas une qualité des objets : il n'y a pas de règles du beau et donc de science du beau), affirme qu'il n'existe pas de belles sciences, mais seulement des beaux-arts.

Il accorde même, d'une certaine manière, une supériorité à l'art sur les sciences et la technique, puisqu'il considère qu'il n'y a de génie que dans les beaux-arts.

Application rigoureuse de la science, la technique repose sur une méthode scientifique précise dont toutes les démarches sont enseignables, répétables.

Il suffit généralement de savoir ce qu'il faut faire pour réussir.

Quant à l'artisanat, s'il exige une certaine habileté voire un tour de main qui ne se réduit pas à des recettes d'une application mécanique, il ne requiert, cependant, aucune faculté d'invention ou génie particulier.

Seul l'art, qui repose sur la fantaisie créatrice de l'artiste, requiert autre chose que « l'aptitude à savoir faire ce qui peut être appris d'après une règle quelconque ».

Les beaux-arts doivent donc nécessairement « être considérés comme des arts du génie ». • Les beaux-arts sont les arts du génie Dire que « les beaux-arts sont les arts du génie », cela signifie donc que l'art exige un talent complètement opposé à l'esprit d'imitation et qui ne peut être ramené à un savoir transmissible par enseignement.

La façon dont l'artiste réalise son produit ne peut être exposée scientifiquement ni même décrite.

En cela, l'art se différencie radicalement de la technique, mais aussi de la science dont les démarches sont enseignables, communicables.

Le génie ne se pliant à aucune règle préexistante semble créer avec la même heureuse spontanéité que la nature.

Mais c'est au prix du travail et de la souffrance. Dans les lettres de Van Gogh, le mot travail revient sans cesse, jusque dans la dernière, celle qu'il portait sur lui, le jour de juillet 1890 où il s'est suicidé : « Eh bien, mon travail à moi, j'y risque ma vie et ma raison y a sombré à moitié.

» Tout vrai artiste est poussé par une nécessité interne devant laquelle il est vain de se presser.

Comme l'écrit si justement Rilke dans ses Lettres à un jeune poète : « Être artiste, c'est ne pas compter, c'est croître comme l'arbre qui ne presse pas sa sève...

» Le terme « art » a pendant toute l'Antiquité et le Moyen Age, simplement désigné la forme de la production artisanale. Ainsi, Platon oppose la « theôria », connaissance purement contemplative, au savoir-faire lié à la production matérielle (« technè »).

Cette dernière concerne la production et se définit comme création: « Ce qui, pour quoi que ce soit, est cause de son passage de la non-existence à l'existence, est, dans tous les cas, une création; en sorte que toutes les opérations qui sont du domaine des arts sont des créations, et que sont créateurs tous les ouvriers de ces opérations.» (« LE Banquet »). C'est pourquoi, pour Platon, les artisans sont tous poètes.

En effet, «poésie» signifie étymologiquement «faire», ce qui consiste essentiellement à faire être ce qui n'était pas, c'est-à-dire à créer. Si la technique (ou l'art) est création, elle porte sur le contingent, c'est-à-dire sur ce qui peut aussi bien être que n'être pas.

C'est en cela que la technique (ou l'art) s'oppose à la science.

Cette dernière porte, en effet, sur des essences idéales, c'est-à-dire éternelles et immuables.

On comprend, dès lors, que Platon, reconnaissant la fonction sociale de la technique, ne lui accorde aucune valeur humaine.

Insensible à la beauté de l'Acropole, il ne semble voir de la beauté que dans la nature (les beaux corps des jeunes garçons), dans la morale (les belles actions), dans les sciences (mathématiques et philosophie). C'est à partir du XVIIIE siècle que l'art se distingue aussi bien de l'artisanat que de la technique et acquiert ainsi un statut spécifique.

D'où l'apparition de l'esthétique comme théorie des beaux-arts.

Et, dans la Critique de la faculté. »

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