Aide en Philo

Qu'entend-on par certitude morale? Quelles en sont les conditions? Quelle en est la valeur ?

Extrait du document

« Qu'entend-on par certitude morale? Quelles en sont les conditions? Quelle en est la valeur? Je suis sûr d'une chose quand je l'ai vue, entendue, touchée, et que d'autre part des renseignements sur les conditions dans lesquelles mes sens se sont exercés, renseignements tels que je sois fondé à affirmer que leur fonctionnement a été normal.

Toutes les données sensibles dont l'ensemble forme ce que j'appelle le monde extérieur sont pour moi des objets d'une telle certitude. Je suis encore sûr de ce qui m'a été démontré.

Si une proposition m'est prouvée par des raisonnements conformes aux lois de la logique, j'y adhère, j'affirme qu'elle est vraie, encore que l'objet de cette proposition (ainsi qu'il arrive en mathématiques), ne tombe pas sous mes sens, que je ne puisse ni le voir, ni le toucher, etc. Voilà deux espèces de certitudes, l'une sensible, l'autre rationnelle.

Est-ce là toute la certitude? Qu'est-ce que raisonner? C'est prouver une idée par une antre: c'est établir une identité totale ou partielle entre deux idées dont l'une était douteuse et la seconde certaine : celle-là participera alors de la certitude de celle-ci. Il suit clairement de là que je ne puis pas prouver toutes les idées : au début de mes raisonnements, je dois prendre pour accordées certaines idées qui fonderont la certitude des autres, et qui, étant premières, ne pourront ellesmêmes être ramenées à des idées antérieures.

On ne raisonne pas à l'infini; on ne démontre pas tout.

Ces idées premières, point de départ de tous les raisonnements, sont donc certaines par elles-mêmes, c'est-à-dire qu'elles s'imposent à moi avec évidence.

Les mathématiciens les appellent des axiomes. Est-ce là tout ce dont je suis certain? N'y a-t-il pas des propositions dont je ne doute pas, et qui, cependant, ne sont ni démontrées, ni nettement évidentes? Soit, par exemple, celle-ci : Jules César a existé.

Qui en doute? Personne, assurément.

Est-ce évident? Non : un fait passé ne peut être évident.

Est-ce prouvé? Par le témoignage, qu'il est toujours possible de contester.

Théoriquement, je ne suis pas un insensé en toujours de l'existence de César, comme je le serais si je doutais que deux et deux font quatre.

Mais tout le monde me dira qu'en en doutant, je manquerais de bon sens.

C'est une question de raison pratique.

Je dirai alors que, sans pouvoir me démontrer à moi-même l'existence de Jules César, j'en suis moralement certain.

Je me sers de ce mot moralement, parce qu'il y a, dans les sciences qui traitent de l'homme, dans les sciences morales, et en morale avant tout, un assez grand nombre de vérités qui appartiennent à cet ordre.

Je suis ainsi d'accord avec Malebranche, qui dit: "On est certain d'une chose quand on ne peut la nier sans une peine intérieure ou des reproches secrets de la raison." Cette peine intérieure, bien connue, qui s'oppose à certaines négations, définit justement la certitude morale. La portée de cette certitude s'étend à une grande partie des sciences morales, et à la morale proprement dite. C'est elle qui fonde la croyance.

La valeur de la certitude morale est la même que celle de la certitude sensible et de la certitude rationnelle.

C'est une puérilité de vouloir tout démontrer et d'affecter de ne croire qu'à ce qui est logiquement ou matériellement prouvé.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles