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Puis-je faire confiance à mes sens ?

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« 1) Introduction Cela tombe sous le sens, dit-on couramment, en privilégiant (implicitement ou explicitement) les sens comme facultés d'éprouver les impressions apportées par les objets matériels.

Apparemment donc, ce qui tombe sous le(s) sens, ce qui est perçu ou perceptible par ces derniers est digne de confiance.

L'odorat, l'ouïe, le toucher, la vue sont-ils toutefois si véridiques ? La question posée interroge les certitudes du sens commun et l'adhésion immédiate à mes sens.

A i-je le droit de me fier à mes organes qui président à l'appréhension immédiate du réel et ma confiance relève-t-elle alors d'un processus légitime? C'est la question de la légitimité qui est ici soulevée.

Je vois ce mimosa vert et jaune devant moi.

Il se détache dans le ciel bleu de la Provence.

Suis-je en mesure de dire que mes affections sensibles, mon « jaune », mon « vert » sont véridiques et fondés en réalité ? Mes sens sont-ils source de vérité et de certitude ? Ne seraient-ils pas trompeurs et générateurs d'illusions, de croyances fausses enracinées en moi ? Ne dois-je pas légitimement les mettre en doute ? N'y a-t-il pas supériorité de l'activité intellectuelle et conceptuelle par rapport aux facultés sensibles ? Tel est, en définitive, le problème soulevé par le sujet, problème dont l'enjeu est manifeste car, suivant la réponse apportée, j'organiserai mes recherches spéculatives ou pratiques selon une optique et une démarche fondamentalement opposées. 2) Discussion A.

Je puis légitimement faire confiance à mes sens (thèse) Faire confiance, c'est, on l'a vu, accorder crédit à une réalité.

Or comment mes sens ne me sembleraient-ils pas dignes de confiance ? Tout ce que je sais du monde, je le sais à partir d'une expérience sensible sans laquelle rien ne pourrait être appréhendé.

Les sens désignant les organes intermédiaires entre moi et l'univers, ils paraissent, initialement, entièrement dignes de confiance, car ils paraissent fonder mon vécu, qui s'origine en eux. Dignes de confiance, d'abord, en ce qui concerne ce vécu à proprement parler.

A près tout, le concept, la notion, l'idée semblent multiples et surtout construits.

Or mes sens semblent m'apporter une vérité immédiate et initiale.

L'immédiateté n'est-elle pas insoupçonnable ? Il y a, en première approche, une dimension privilégiée de l'expérience obtenue par les sens, par l'odorat, la vue ou l'ouïe.

Il y a, dans mes sens, dans ces couleurs qui me sont apportées, des traits qui paraissent immédiats et clairs et, par conséquent, je ne vois pas pourquoi je les mettrais en doute.

Les sens m'apportent des impressions ou qualités immédiates indubitables.

Cette tâche rouge que je vois sur le tapis n'est-elle pas un irréductible ? Les sens véhiculent le monde vécu de manière directe et je dois leur accorder crédit. Mais le vécu n'est pas seul concerné par ces analyses.

Non seulement je puis légitimement accorder ma confiance aux sens au niveau de l'immédiat, mais il semble aussi que je doive leur faire crédit en ce qui concerne l'acquisition d'une vérité scientifique élaborée.

Dois-je et puis-je accorder à mes sens crédit dans le champ de la constitution de la vérité ? C ertainement.

Sens et sensation ne sont-ils pas la base de toute connaissance ? Toute vérité n'est-elle pas issue des sens ? « Tu trouveras que la connaissance de la vérité nous vient primitivement des sens et que leur témoignage ne peut être convaincu d'erreur. Car on doit accorder davantage de foi à ce qui peut par soi-même assurer le triomphe du vrai par rapport au faux.

Or, où trouver un témoignage plus sûr que celui des sens ? S'ils nous induisaient en erreur, dira-t-on que la raison pourra déposer contre eux, elle qui leur doit toute son existence ? Si nous les supposons trompeurs, la raison à son tour se transformera en une puissance de mensonge.

» (Lucrèce, De la nature des choses) Transition Toutefois, ce qui est chaud et brûlant pour moi est glacial pour mon voisin.

Le soleil et cette chaleur torride pour moi sont agréables climats pour l'autre.

La relativité des sens conduit à approfondir la question : puis-je légitimement accorder crédit à mes fonctions sensorielles et à mes organes des sens ? Si cette tour carrée est en réalité ronde, cela ne signifie-t-il pas que je doive suspecter ces sens porteurs d'illusion et, en tout état de cause, rigoureusement relatifs à ma personne ? B.

Je ne puis légitimement faire confiance à mes sens (antithèse) Faut-il légitimement faire crédit aux sens ? C ette thèse n'a rien d'évident.

Mes sens semblent me fournir les qualités objectives des choses.

Je dis que cette femme est belle, que ce tableau renvoie à un univers de vérités quasi objectives.

Est-ce tout; à fait vrai ? C e sont mes désirs et mes sentiments qui colorent le monde et qui pénètrent de valeur personnelle et subjective le monde des objets.

Ce plat est-il succulent ? Il l'est pour moi car il s'enracine dans les goûts de mon enfance.

Les sens sont incontestablement subjectifs.

Tout alors dépend de la structure de mon organisme, mais aussi de mon expérience des valeurs.

Donc, comment accorder crédit à ce qui n'a de valeur que pour moi, dans un contexte subjectif ? Mes sens me disent que le Hamlet de Delacroix est au sommet de l'art, mais l'autre n'en convient nullement.

Il y a du sensible dans l'art et ce sensible est relatif. Non seulement mes sens enracinent mes croyances dans une subjectivité immédiate, d'où des illusions sensibles permanentes - tel le fait que des objets qui sont carrés de près paraissent ronds de loin -, mais, d'une manière générale, nos sens ne forment-ils pas un véritable songe ou rêve ? Et si la vie était un illusoire événement onirique ? Dans ce cas, nos sens paraissent dignes de confiance, mais cette confiance est rigoureusement illégitime.

Mes sens ne sont-ils pas source de vérité et de certitude ? Non seulement ils sont trompeurs, mais, après tout, je puis rêver que je suis éveillé.

Peut-être bien tout n'est-il qu'illusion et tromperie, rêve incessant.

Je postule la vérité de sens qui, peut-être, se jouent de moi.

La vie serait un songe... Pour donner un exemple philosophique, on peut citer Descartes qui, de manière provisoire, met en doute la vérité des sens et leur refuse crédit : « Toutefois j'ai ici à considérer que je suis homme, et par conséquent que j'ai coutume de dormir et de me représenter en mes songes les mêmes choses, ou quelquefois de moins vraisemblables, que ces insensés, lorsqu'ils veillent.

Combien de fois m'est-il arrivé de songer, la nuit, que j'étais en ce lieu, que j'étais habillé, que j'étais auprès du feu, quoique je fusse tout nu dedans mon lit.

[...] En y pensant soigneusement, je me ressouviens d'avoir été souvent trompé, lorsque je dormais, par des semblables illusions.

Et m'arrêtant sur cette pensée, je vois si manifestement qu'il n'y a point d'indices concluants, ni de marques assez certaines par où l'on puisse distinguer nettement la veille d'avec le sommeil, que j'en suis tout étonné; et mon étonnement est tel qu'il est presque capable de me persuader que je dors.

» (Descartes, Méditations métaphysiques, V rin, Première méditation).

Mes sens ne me portent-ils pas en une zone où la réalité ne s'impose pas par rapport au rêve ? Transition Ainsi, je ne puis accorder crédit à mes sens, lesquels sont trompeurs et porteurs d'illusion.

Toutefois, ne faut-il pas tenter de réunifier vécu et concepts, sensibilité et abstraction ? Si Descartes affirme la supériorité de l'entendement sur la faculté sensible, une synthèse n'est-elle pas indiquée ? C.

Les sens, lointains reflets des vraies réalités (synthèse) .../.... »

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