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Pourquoi l'art est-il opposé à la technique ?

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« Définition des termes du sujet: POURQUOI: pour quelle raison, quel motif: raison intellectuelle de parler ou d'agir OU pour quel mobile, force irrationnelle qui pousse à parler ou à agir. TECHNIQUE Tout ensemble de procédés pour produire un résultat utile.

La technique moderne s'appuie sur la science; mais elle s'en distingue puisque la science est un effort pour expliquer ce qui existe tandis que la technique cherche à produire ce qu'on souhaite qui soit — qui n'est pas. La technique peut se définir comme un vouloir, incarné en un pouvoir par l'intermédiaire d'un savoir. Comme adjectif: par opposition à esthétique, qui concerne des procédés susceptibles d'être développés et transmis, et non des dons ou capacités innées. L'art et la technique semblent d'abord s'opposer dans leur façon de se rapporter à la réalité.

La technique prend pour règle l'efficacité à tout prix.

De son point de vue, tous les moyens d'agir sur la réalité sont bons pourvu qu'ils soient efficaces.

La volonté de maîtrise qui l'anime réduit toute chose à l'usage ou à la consommation qu'on peut en faire.

La technique est donc intrinsèquement utilitariste et instrumentaliste. L'art, à l'opposé d e ce point d e vue, agit sur notre sensibilité et nous oriente vers un idéal désintéressé, qui ajoute une dimension spirituelle au m o n d e d e l'homme.

Alors que les objets techniques sont consommables et périssables, les oeuvres d'art, écrit Hannah Arendt, parce qu'elles sont symboliques, échappent à l'usure du temps.

Elles assurent ainsi la permanence et la consistance du monde humain. L'idée de la liberté dans le travail paraît problématique, puisque celui-ci semble l'activité imposée par excellence, celle qu'on ne décide pas, ou dont on ne décide que dans des bornes très précises qu'il ne nous revient pas de fixer.

Toutefois, c'est par le travail que l'homme se rend maître de la nature, qu'il s'agisse de son environnement extérieur ou d e s a propre nature humaine.

Par son travail, l'homme produit des objets, et d'abord des outils qui lui permettent de transformer le monde et lui-même, dans un sens voulu par lui, si ce n'est en tant qu'individu, du moins en tant qu'être social.

Cependant, le monde de la société et le monde technique engendrent de nouvelles contraintes à leur tour, de sorte qu'il apparaît que l'homme n'échappe à une sujétion que pour entrer sous une autre : le déterminisme naturel cède la place au déterminisme social ou scientifique.

Or une contrainte n'est pas moins contraignante parce qu'elle a été choisie, ou parce qu'elle émane de nous-mêmes.

Ne sommes-nous pas aujourd'hui condamnés à la technique et à l'efficacité ? O n le sait, notre m o n d e moderne se caractérise par le développement technique inouï auquel nous serions condamnés.

La technique s e m b l e du reste tellement imbriquée dans toutes nos activités, qu'elle paraît à la fois omniprésente et difficile à saisir, à isoler, spectaculaire et invisible.

Son aspect le plus frappant réside dans les machines, qui en sont la manifestation constante.

Mais le règne de la technique ne se limite nullement à la seule utilisation de machines et s'exerce dans bien d'autres domaines : en tant que procédure et savoir-faire.

Autre paradoxe : la technique est à la fois ce que nous utilisons et ce qui nous utilise, le symbole de la maîtrise comme de la soumission, de la liberté et de la servitude.

Cela non seulement parce que la technique contraint les corps, puisque en somme elle est une force, mais aussi, et peut-être davantage encore, parce que notre esprit, nos pensées, nos désirs sont suscités ou commandés par elle.

La facilité dans la vie et le travail, justification essentielle et atout majeur de la technique, ne nous prive-t-elle pas, par exemple, de l'effort essentiel à la constitution de notre être ? Tout travail s'applique à la transformation d'un donné, qu'il soit naturel ou artificiel, c'est pourquoi il est souvent défini comme une activité productive.

La notion d e production semble toutefois réductrice, car bien des activités y échappent sans qu'on puisse si facilement les exclure de la sphère du travail, pour en faire des jeux ou des loisirs, par exemple la création artistique.

L'enseignement ou l'industrie du service en général posent un problème semblable.

La technique nous renvoie également à la sphère d e la production, où l'élément intellectuel semble prendre une place variable.

Il a peut-être plus d'importance aujourd'hui, dans la mesure où techniques et sciences semblent devenir indissociables, mais de multiples tâches sont encore dotées d'un caractère répétitif et peu créatif.

En ce sens, sciences et techniques peuvent se distinguer, dans leur fonctionnement, leur nature et leur genèse.

Néanmoins, à travers leur développement, l'homme explore un nouveau rapport avec la nature et sa possible transformation, et sur ce plan technique et travail sont solidaires.

La technique, moyen d'action, volontiers conquérante, dominatrice, plus efficace que jamais, apparaît aussi comme une source de dangers et de risques, suscite des suspicions, plus ou moins bien fondées, en tant que symbole d'une volonté de puissance qui inquiète.

L'homme contemporain se voit donc confronté à des enjeux inédits et conséquents. O n peut hésiter q u a n d s e p o s e l a question de savoir si le développement technique est un facteur de libération ou d'asservissement, d'aliénation pour l'homme.

La technique opère une mise en ordre, une organisation d'un monde accordé à l'homme, si bien que son rôle ne peut être négligé dans la réalité sociale.

Elle s'accompagne, par exemple, d'une division du travail, aux conséquences sociales importantes, dont on ne sait s'il faut y voir liberté ou servitude.

Si elle engendre de fait une solidarité entre les hommes, la complexité de la technique cantonne chacun à un aspect réduit des processus, tant au travail que dans le quotidien, risquant ainsi d'éloigner l'immense majorité des citoyens des lieux d e décision, abandonnés aux experts ou aux puissants.

On constate aussi que le progrès technique apparaît de plus en plus comme une puissance indépendante, dont la maîtrise ou le contrôle nous échappent, ou semblent largement illusoires, ce qui constitue u n e menace pour l' ho mm e s'il voulait s e définir comme un sujet autonome, producteur libre d e s a propre histoire.

Subjectivement, nous vivons souvent le progrès technique sur le mode d'un désir, de consommation en particulier, qui reste pris à son propre piège et incapable de se séparer de l'objet qui le fascine.

Pouvons-nous interrompre ce progrès, le ralentir ou revenir en arrière ? Rien n'est moins certain. Surtout dans un contexte général où la technique est un des instruments premiers de la rentabilité économique et du pouvoir. O n ne peut voir dans le travail u n e activité qui serait séparée et isolable d'un contexte social précis dans lequel il s'effectue, cette constatation valant aussi bien pour s e s produits que pour les conditions dans lesquelles il s'effectue.

O n constate d e nos jours un affaiblissement de la valeur sociale et économique du travail, qui ne semble pas tellement provenir d'une dégénérescence qui lui serait propre, comme s'il avait perdu toute utilité, mais plutôt du modèle de civilisation, d e la culture moderne, en particulier la domination inconditionnelle, le règne de l'argent, dont on ne sait s'il faut y voir une cause ou un symptôme.

Ainsi la justice sociale, qui présuppose de garantir une certaine égalité d'opportunités et d e moyen d'existence, s e confronte a u x questions d e rentabilité, principalement des entreprises.

Les coûts d e production e u x - m ê m e s s e heurtent aux « réalités » du marché.

Les salariés s'opposent directement aux machines susceptibles d e les remplacer.

Le développement d e la technique s e m b l e parfois assigné à la réalisation d'objectifs trop particuliers pour rencontrer une adhésion universelle.

Des h o m m e s en exploitent d'autres.

L'homme accroît son pouvoir sur la nature, souvent sans souci autre que ses propres désirs et volontés.

Sont-ce là la destinée humaine, une erreur de la nature, ou des problèmes temporaires de croissance ?. »

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