Aide en Philo

PHILOSOPHIE ET PSYCHOLOGIE ?

Extrait du document

« La psychologie n'est plus représentée expressément — à titre de division particulière expressément énoncée — dans le nouveau programme de la classe de philosophie.

Toutefois beaucoup de problèmes «psychologiques» traditionnels y figurent.

Par exemple, dans cet ouvrage sur l'Action, nous aurons à traiter de la Conscience et de l'inconscient, des émotions, des passions, des habitudes. Pour un grand nombre de débutants ceci ne pose aucun problème, la psychologie étant considérée comme une simple partie de la philosophie.

Une pareille opinion n'est plus soutenable aujourd'hui.

Un de nos maîtres disait qu'il n'y a pas plus de rapports entre la psychologie et la philosophie qu'entre Réaumur et Sébastopol (la psychologie et la philosophie étant rattachées l'une à l'autre aussi artificiellement dans le cours traditionnel de philosophie que Réaumur et Sébastopol dans le nom d'une station du métropolitain à Paris). Ce que nous avons dit de l'essence de la philosophie nous permet de comprendre ce point de vue.

Nous répéterons donc que la philosophie n'est pas une connaissance mais une réflexion, c'est-à-dire une mise en question, une «critique» de toutes nos connaissances.

On peut ainsi faire la philosophie de la psychologie comme on fait la philosophie des mathématiques, de la biologie ou de l'histoire.

La psychologie est elle-même une connaissance originale de certains faits, connaissance qui se veut de plus en plus précise et scientifique.

La psychologie est un domaine autonome. On présentait il y a cent et même cinquante ans la psychologie comme la science des faits de la vie intérieure : en effet, comme il existe un monde extérieur de choses, d'objets physiques et chimiques accessible aux sciences de la matière, il existe un monde intérieur, concret et vivant de souvenirs, d'images, de rêves, le monde des états de conscience que chacun de nous découvre en lui-même par «introspection» et qu'il peut explorer systématiquement. Mais cette définition de la psychologie a vieilli.

L'étude de la vie intérieure manque inévitablement d'objectivité puisque c'est le moi qui étudie le moi et que toute observation scientifique exige non seulement le contrôle de plusieurs observateurs, mais encore, comme l'a bien vu Auguste Comte, le dédoublement du sujet observateur et de l'objet observé.

Elle manque de profondeur parce que la vie mentale déborde de toutes parts la vie consciente et que nos modalités psychiques les plus importantes nous échappent le plus souvent et demeurent inconscientes : «Chacun, a dit Nietzsche, est l'être le plus distant de soi-même ».

Enfin l'étude de la vie intérieure offre à la psychologie un champ très limité puisque seul l'adulte normal, cultivé, hautement civilisé, exercé à la méditation, peut s'observer lui-même fructueusement.

A la limite, la psychologie de la vie intérieure n'est que la psychologie du psychologue. Aujourd'hui il existe une psychologie animale, une psychologie de l'enfant, une psychologie du primitif, une psychologie du malade mental.

C'est que la psychologie moderne n'est plus l'observation de soi-même par soi-même, n'est plus une psychologie en première personne.

La psychologie moderne — psychologie en troisième personne — c'est l'étude du comportement des êtres vivants ou plus exactement l'étude des réactions des êtres vivants aux stimuli que le milieu leur propose.

La psychologie, dans la mesure où elle parvient à observer et à mesurer des réactions (par exemple les réponses à un test sont des réactions objectivement observables), conquiert le statut d'une science positive. Toutefois les prétentions scientifiques de la psychologie moderne ne doivent pas nous faire oublier que lorsqu'il s'agit d'étudier l'homme on ne peut expliquer les comportements de façon mécanique, comme le chimiste explique les réactions d'un corps matériel.

L'homme doit être compris humainement, sa conduite a un sens qu'il faut élucider. Cette dernière remarque nous invite à nuancer la séparation rigoureuse que nous étions tentés d'introduire entre la connaissance psychologique et la réflexion philosophique.

La réflexion philosophique est avant tout une interrogation sur la condition humaine.

Les données de la psychologie fournissent donc au philosophe une matière de réflexion privilégiée.

Comment réfléchir sur l'action humaine, sur la liberté, sur la morale, sur la destinée si nous ne disposons pas de renseignements précis sur les diverses fonctions mentales? L'homme veut agir librement avec une conscience claire et lucide, mais souvent il est agi par des mobiles inconscients.

Il est le jouet de ses émotions, de ses passions, de ses habitudes dont il doit en quelque mesure s'affranchir pour parvenir à une conduite volontaire.

Ceci nous montre assez que la philosophie de l'action ne saurait ignorer les données psychologiques sur la conscience, l'inconscient, la vie affective, la volonté.

Même si la psychologie humaine pouvait se passer totalement de philosophie, la philosophie en tant que réflexion sur la condition humaine — ne saurait, elle, se passer de la psychologie.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles