Philosopher c'est secouer le joug de l'autorité. ?
Extrait du document
«
La philosophie est une discipline incluant à la fois les connaissances acquises grâce à ceux qui ont philosophé
et une méthode de réflexion, tandis que philosopher, c'est agir, c'est mettre en acte ces théories et évoluer grâce
cette discipline.
Philosopher(philosophie vient de « philo sophia », l'amour de la sagesse en grec ancien) consiste à
faire preuve d'esprit critique pour examiner ce qui nous est donné comme vrai, rechercher l'erreur, le faux, l'illusion
et déterminer ce qui doit être repensé et ce qui doit être fait pour améliorer les choses, c'est là la dimension éthique
de la philosophie.
A ce sujet, le philosophe Jankélévitch[1] affirme que «philosopher revient à ceci : se comporter à
l'égard de l'univers comme si rien n'allait de soi.
», Gratry écrit également à ce propos que « philosopher c'est
chercher l'essentiel inaperçu.
» Or, l'homme vit en société depuis son plus jeune age et doit se soumettre à des
diverses autorités, qu'il s'agisse des parents, de l'institution scolaire, du patron, plus tard, ou de l'état par exemple.
Ces autorités imposent des règles et des façons de penser aux individus.
Pour les professeurs, tout ce qu'ils
enseignent doit être considéré comme vrai et l'Etat affirme que l'idéologie politique dominante est préférable à toute
autre par exemple.
Pour imposer ses règles, l'Etat use même de violence dite « légitime », tout comme les parents
adoptent des sanctions lorsque l'enfant n'obéit pas, il n'est en effet pas aisé d'imposer des idées et des règles,
comme le souligne Baruch Spinoza[2] : « s'il était aussi facile de commander aux esprits qu'aux langues, aucun
gouvernement ne se trouverait jamais en péril et aucune autorité n'aurait besoin de s'exercer par des moyens
violents.
» René Descartes[3] évoque l'aveuglement dû aux « vérités toutes faites » et appelle à philosopher en
employant une métaphore : « C'est proprement avoir les yeux fermés, sans tâcher jamais de les ouvrir, que de vivre
sans philosopher.
» De plus, l'opinion commune peut être considérée comme faisant autorité.
C'est un facteur social
discriminant que de penser autrement que le font la plupart des gens.
L'autorité est donc principalement ce sur quoi
s'exerce la philosophie.
Est-elle exclusivement ce sur quoi elle s'exerce ? la philosophie consiste-t-elle toute entière
à braver l'autorité ? Philosopher, c'est secouer le joug de l'autorité ? Comment penser le rapport de la
philosophie à l'autorité ?
I.
La société toute entière est en opposition avec le philosophe dans la mesure où le
philosophe recherche la vérité, ce qui n'est pas une priorité pour la plupart des gens.
A ce propos,
Hannah Arendt écrit que : « la société de masse ne veut pas la culture mais les loisirs.
» Michel Eyquem
de Montaigne[4] évoque la force de la pression sociale qui nous pousse à nous accorder avec l'opinion
courante, avec la coutume : « Car c'est à la vérité une violente et traîtresse maîtresse d'école que la
coutume.
Elle établit en nous, peu à peu, à la dérobée, le pied de son autorité.
» Le philosophe doit donc
s'opposer à toute forme d'autorité, y compris à celle de ceux qui sont soumis aux mêmes autorités que
lui, Spinoza[5] évoque le fait que l'autorité étatique n'est parfois basé que sur l'inaction du peuple :
« Quelquefois, il arrive qu'une nation conserve la paix à la faveur seulement de l'apathie des sujets,
menés comme du bétail et inaptes à s'assimiler quelque rôle que ce soit sinon celui d'esclave.
Cependant,
un pays de ce genre devrait plutôt porter le nom de désert, que de nation!"
II.
Mais l'autorité est nécessaire, philosopher consiste donc à remettre en question
l'autorité pour refuser ce qu'elle peut nous imposer d'abusif ou d'injustifié.
Péguy pense à ce
propos qu'« une grande philosophie n'est pas celle qui installe une vérité définitive, c'est celle qui
introduit une inquiétude.
» C'est la démarche qu'adopte Marx[6] lorsqu'il dénonce les abus dus à la
division sociale du travail : "La division sociale du travail met en face les uns des autres des producteurs
indépendants qui ne reconnaissent en fait d'autorité que celle de la concurrence, d'autres forces que la
pression exercée sur eux par leurs intérêts réciproques..."
III.
Philosopher, c'est également agir après le moment critique et le moment d'opposition,
c'est chercher à modifier l'autorité elle-même, dans sa forme ou dans sa nature.
Par exemple, il
peut s'agir d'essayer renverser un système politique pour le remplacer par un système plus avantageux
pour l'ensemble de la population.
Michel Eyquem de Montaigne[7] écrit à ce propos : « ...
qui se mêle de
choisir et de changer, usurpe l'autorité de juger, et se doit faire fort de voir la faute de ce qu'il chasse,
et le bien de ce qu'il introduit ».
SECONDE CORRECTION
La philosophie est depuis 2500 ans un immense débat qui anime la pensée occidentale.
Chacun de ses représentants
n'a de cesse, par delà les siècles, de préciser, de critiquer, de combattre l'ordre établi.
La philosophie est
polymorphe, il est délicat d'en donner une définition fixe, elle n'a pas de canal privilégié d'expression, mais elle a
besoin d'un objet extérieur pour exister ce qui tend à faire d'elle une discipline parasite qui se nourrit de l'analyse et
de la critique de savoirs, de comportements et de réalités qui ne sont jamais en premier lieu philosophique.
Selon la formule de Mme du Deffant « philosopher, c'est secouer le joug de l'autorité », aussi convient-il de
supposer qu'agir en philosophe c'est tout d'abord s'élever contre le pouvoir en place pour émettre des objections et
illuminer les esprits.
Dans ces conditions il est intéressant d'entrevoir la manière dont les hommes de lettres ont
procédé pour allumer les lueurs de la raison là où elles ne brillaient pas encore.
En quoi la philosophie des Lumières
a-t-elle bouleversée les mentalités jusqu'à conduire à la révolution française ? Comment a-t-elle libéré les esprits ?
I/ La philosophie des Lumières : identité scientifique et culturelle du XVIIIe siècle français.
»
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