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Peut-on sans illusion faire confiance à autrui ?

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« Analyse du sujet : · Le sujet invite à s'interroger sur ce qui est possible (« peut-on »).

Or on distingue au moins deux sorte de possible : 1) selon que l'on a les moyens de… ; possible = réalisable 2) selon que l'on a le droit de … ; possible = permis.

Il faudra donc préciser en quel sens « on peut ou non sans illusion … ». · « illusion » consiste à se défaire d'une perception fausse qui a l'apparence du vrai.

Ici, il s'agit plus largement de méprise ou malentendu plus que d'erreur des sens. · « Faire confiance » = croire, credere qui signifie faire crédit.

Donner son assentiment sans exiger de caution.

Autrui = celui qui n'est pas moi, distinct.

Or en tant que tel, il est celui dont je ne sais a priori rien que ce qu'il me laisse savoir. Problématique : Il semble difficile de connaître autrui : comment serait-il possible de connaître un point de vue qui, par définition, n'est pas le sien ? Comment parvenir à la connaissance d'une intériorité qui égale celle que j'ai de la mienne ? Il semble ainsi qu'il faille toujours croire autrui, lui faire confiance dans la mesure où l'on a comme certitude le concernant, que celle portant sur son extériorité (gestes, paroles, comportements) et non sur l'intériorité. Toutefois, cette confiance ne va pas sans risque, et c'est ainsi qu'au lieu de faire confiance autrui, on peut s'en méfier et ne lui accorder crédit qu'avec une extrême prudence.

D'où le problème : autrui est-il à ce point obscur que l'on ne puisse, ou bien, lui faire une confiance aveugle (qui refuse obstinément la possibilité de l'illusion) ou bien, au contraire, s'en méfier et se replier sur soi (le moi = seule chose certaine = position égoïste) ? Peut-on sans illusion faire confiance à autrui ou bien est-on condamné à toujours être déçu ? 1- ON NE PEUT PAS SANS ILLUSION FAIRE CONFIANCE À AUTRUI a) qu'est-ce qu'une illusion ? On ne pourrait sans illusion faire confiance à autrui que si l'on disposait des moyens de la connaître.

En effet, la confiance est une modalité de la croyance : elle est marquée par l'expression « croire en … » ou « croire à … » (qui se distingue du « croire que … » qui porte sur des propositions ou des énoncés douteux et incertains).

Faire confiance consiste donc à donner son crédit à quelqu'un.

Ainsi je fais confiance à autrui lorsque je n'imagine pas qu'il puisse me tromper, me trahir ou décevoir mes attentes.

C'est pourquoi nous pouvons dire que l'illusion est toujours un risque potentiel inhérent au fait même de croire : seule une vérité, du fait même qu'elle est une vérité, peut ne pas se révéler fausse après examen. b) source du problème : le cogito ne peut s'énoncer autrement qu'à la première personne[1]. Pourquoi autrui pourrait-il toujours potentiellement décevoir ? Comment se fait-il que faire confiance à l'autre implique de prendre le risque de l'illusion ? Autrui se donne d'abord à moi par l'intermédiaire de son corps.

Autrui est en premier lieu un objet de perception externe.

C'est pourquoi, je peux lui faire confiance mais non le connaître : prendre connaissance d'autre chose concernant autrui que ce qui se donne physiquement (gestes paroles actes) reviendrait à pénétrer son intériorité. Or depuis Descartes, on entend la pensée comme un phénomène : 1subjectif, c'est-à-dire valable à la première personne 2- radicalement distinct, au moins en principe, de la matière.

En effet, le moi se définit par la conscience directe qu'il a de lui-même.

Ainsi que le dit Descartes, j'ai avant tout la certitude d'être un sujet pensant ; ma pensée est ce qui se manifeste à moi avec le plus d'évidence (à tel point d'ailleurs qu'elle seule est capable de résister aux assauts du malin génie).

Mais d'emblée, il semble alors impossible de rendre compte de l'expérience d'un autre moi : pour connaître autrui, éprouver comme conscience celle d'un autre, il faudrait que je sois moi-même cette conscience – ce qui, de fait, est impossible.

Tout ce que l'on peut appréhender concernant les pensées d'un autre que soi est douteux et incertain. Transition : Pour faire confiance à autrui sans illusion, il faudrait disposer des moyens de le connaître.

Or si tel était le cas, il n'y aurait plus aucune raison de croire autrui : on saurait que ce que l'on perçoit de lui est vrai (correspond bien à ses intentions). · Toutefois, l'expérience courante atteste que l'on peut faire confiance à autrui sans illusion.

Comme le dit Merleau-Ponty, la connaissance que j'ai d'autrui n'est pas postérieure mais bien contemporaine à la perception que j'ai de son corps et donc de ses gestes et de ses paroles. Problème : thèse semble valide théoriquement mais non empiriquement : de fait, nous sommes sûrs d'avoir compris autrui.

Dès lors, demander si nous pouvons être sûrs d'avoir compris autrui est moins une question d'ordre factuel (nous constatons que nous sommes sûrs de savoir pourquoi autrui fait ou dit ceci et cela) que d'ordre critique : de quel droit pouvons-nous faire confiance à autrui sans prendre le risque d'être déçu ? · · 2- On peut faire sans illusion confiance à autrui. »

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