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Peut-on perdre la raison ?

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« Vocabulaire: RAISON: Du latin ratio, « calcul », « faculté de calculer, de raisonner » (en grec logos). * Au sens subjectif : mode de penser propre à l'homme (lui-même défini comme « animal raisonnable »). * Par opposition à l'intuition : faculté d e raisonner, c'est-à-dire d e combiner des concepts et des jugements, d e conséquences. * Par opposition à la passion ou à la folie : pouvoir de bien juger, de distinguer le vrai du faux, le bien du mal. * Par opposition à la foi : la « lumière naturelle », naturellement présente en tout homme. * Par opposition à l'expérience : faculté de fournir des principes a priori (c'est-à-dire indépendants de l'expérience) * Au sens objectif : principe d'explication, cause (exemple : les raisons d'un phénomène). * Argument destiné à légitimer un jugement ou une décision (exemple : donner ses raisons). déduire des Peut-on ou non perdre la raison, et n'est-ce pas nécessaire ? Dans quelle mesure doit-on même la perdre ? Perdre la raison, est-ce le signe de sa disparition ? Si l'homme est un être de raison, comment peut-il perdre sa raison ? Comment peut-il y avoir perte de quelque chose qui est dans notre nature même ? Et qu'est-ce que cela signifie : devenir insensé, irrationnel ? Perdre n'est peut-être pas vraiment perdre, ce serait passager.

Et est-ce vraiment une perte : n'y a-t-il pas au contraire confusion, la raison étant sous l'emprise d'une autre force mais n'étant pas perdue pour autant ? En suivant Hegel (la Raison dans l'histoire), perdre la raison n'est pas la perdre : tout ce qui arrive a un sens, ce sens est celui du progrès constant de la raison.

Même lorsque les hommes n'agissent pas rationnellement (comme on le constate historiquement), un Esprit supérieur aux volontés particulières guide le cours des choses, et finit toujours par faire servir les actions individuelles à la réalisation d e fins qu'elles ne poursuivaient pas forcément, mais qui concourent au triomphe d e la raison (progrès de la liberté, etc.).

La raison ne serait alors pas un attribut que l'homme peut perdre ou non, mais plutôt quelque chose qui se joue avec ou sans lui.

L'idée d e raison n'est-elle pas relative ? Un fou n'a pas conscience d'avoir perdu la raison parce qu'il obéit à d'autres règles.

La raison peut donc paraître perdue pour un regard extérieur et en fait exister sous une autre forme. L'homme est défini par Aristote c o m m e un animal rationnel.

Ici la rationalité est la différence spécifique qui permet d e différencier l'homme des autres animaux.

Dès lors, perdre la raison signifierait pour l'homme perdre son humanité même.

Or perdre son humanité, cela signifierait pour l'homme perdre son essence, ce qui fait qu'il est ce qu'il est.

Mais est-il possible qu'une chose cesse d'être ce qu'elle est sans être par la même détruite ? En effet perdre la raison ne signifie pas seulement ne plus agir de façon rationnelle, mais perdre la faculté elle-même de pouvoir agir rationnellement.

Perdre cette faculté est ce que l'on désigne communément sous le terme de folie.

Or la folie est un fait qui s'impose à la pensée, et la question qui se pose est moins de savoir si l'on peut devenir fou, que celle de savoir si l'on peut devenir fou sans cesser d'être un être humain. I.

L'homme étant un être rationnel, il ne peut pas perdre la raison à moins de cesser d'être un homme Si l'on accepte la définition aristotélicienne de l'homme comme animal rationnel, il semble bien que l'on ne puisse perdre la raison sans cesser d'être un h o m m e .

Cela ne veut pas dire q u e l'on ne peut pas perdre la raison, mais q u e cette perte entraîne automatiquement la perte d e notre humanité.

Cette perte conjointe d e la raison et d e l'humanité, Aristote l'appelle dans l'Ethique à Nicomaque la bestialité.

La bestialité ne doit pas s'entendre comme le fait pour un être humain de vivre à la manière d'un animal.

Aristote considère q u e les animaux vivent comme des animaux, c'est-à-dire s a n s la raison, mais ne peuvent faire preuve d e bestialité.

La bestialité désigne le fait pour un homme qui a la raison par essence, de vivre d'une manière en tout point contraire à la raison.

Dans ce sens là la raison est perdue au sens où l'on n'en fait pas usage, de sorte qu'elle ressemble à une terre que l'on ne cultiverait pas et qui ne donnerait jamais de récolte.

Or l'homme qui vit de la sorte est selon Aristote au-dessous d'une bête, et déchoit de son humanité.

Donc s'il est possible d e perdre la raison, cela entraîne aussitôt le fait d e cesser d'être un homme, d e sorte q u e l'on ne peut pas perdre seulement la raison, tout en gardant son humanité. II.

On peut perdre la raison sans perdre son humanité La définition aristotélicienne d e l'homme c o m m e animal rationnel s e m b l e néanmoins restrictive.

En effet il s e m b l e q u e si l'homme s e distingue partiellement par la raison, il s e distingue aussi par s a capacité à créer, notamment des œuvres d'art.

Dans le Phèdre, Platon prend l'exemple de Socrate, qui est le philosophe par excellence, et qui pourtant est sujet à un accès de création poétique. Socrate crée de beaux discours en étant visité par les muses.

Or cette façon de s'ouvrir aux muses peut être assimilée à une perte de la raison.

Pour autant Socrate ne se comporte pas du tout comme une bête mais bien plutôt comme un esprit poétique fécond.

Ce que l'on voit par cet exemple, c'est qu'il est possible de perdre la raison sans cesser d'être u n h o m m e .

O n p e u t m ê m e se demander si le fait d'être un homme, et non une simple machine, n'exige pas que l'on soit capable de perdre la raison de temps à autre.

Perdre la raison pour créer des poèmes, mais aussi perdre la raison pour aimer, car le sentiment amoureux n'est pas un sentiment rationnel, mais il a néanmoins du prix, et sans être capable de l'éprouver, nous ne serions pas des hommes, mais de simples machines à calculer. III.

L'existence de l'inconscient psychique explique que l'on puisse perdre la raison La raison relève de la sphère de la vie consciente, or Freud explique que la conscience n'est qu'une partie du psychisme humain, qui est composé du ça, du moi, et du surmoi.

Le ça correspond à l'activité inconsciente et pulsionnelle du sujet (c'est-à-dire l'ensemble des désirs dont on n'a pas conscience).

Le surmoi c'est l'ensemble des interdits sociaux (ne pas tuer, ne pas voler).

Le m o i essaye d e satisfaire à la fois le ça e t l e surmoi, c'est-à-dire qu'il essaye de faire en sorte que les désirs profonds soient assouvis, mais sans que cette réalisation ne transgresse les lois humaines.

Mais certains désirs que ne peut accepter le surmoi sont chassés de la conscience, ce que montre par exemple le phénomène des rêves.

Dans L'interprétation des rêves, Freud explique en effet que dans le rêve, des désirs inconscients sont réalisés symboliquement (par exemple je déteste sans le savoir une personne donnée, et je rêve que je la tue).

Si le rêve n'est pas dangereux pour la santé mentale, c'est que pendant le rêve l'être humain n'agit pas, et q u e le rêve fonctionne donc comme un monde clos, de sorte que quand le sujet se réveille, il retrouve un rapport ferme au réel.

Mais dans certains cas, la censure qui rejette la réalisation fantasmatique des désirs dans l'univers du rêve est fragilisée, de sorte que le sujet ne fait plus la différence entre le rêve et la réalité.

Cet état que Freud qualifie de psychotique, peut être assimilé à une perte de la raison, au sens où le sujet ne peut plus s'appuyer sur sa raison pour guider son comportement.

Mais un tel état est réservé à des maladies psychiques graves, et la plupart du temps les êtres humains parviennent à préserver l'usage de leur raison, même s'il y a des variations entre les individus et les périodes d'une vie. Conclusion Si l'on définit l'homme comme animal rationnel, la perte de la raison équivaut à la perte de l'humanité, de sorte que l'on en peut perdre la raison sans cesser d'exister comme homme.

Mais l'homme ne se réduit pas à la raison, l'expérience esthétique ou amoureuse nous montre qu'il est parfois important de pouvoir perdre la raison, sans pour autant que cela équivaille au fait de devenir fou.

La perte de la raison peut aussi être assimilé à la folie, à un état pathologique comme la psychose.

Mais ces pathologies ne sont pas le cas le plus fréquent, et la plupart du temps les hommes gardent l'usage de leur raison, même s'ils peuvent être sujet à des déséquilibres psychiques temporaires.. »

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