Aide en Philo

Peut-on douter de tout ?

Extrait du document

« L'homme soucieux de rigueur et assoiffé d'absolu se demande s'il peut exister une vérité qui soit une et universelle. Cette question ne cesse de le préoccuper : il a besoin d'un monde qui repose sur des certitudes, d'un monde sécurisant, et s'affole à la pensée que tout pourrait être remis en question.

Mais ce besoin de certitude n'est pas le seul responsable de sa quête.

Certains hommes cherchent cette vérité pour la simple joie de connaître, joie qui leur rend un instant le monde moins étranger, moins hostile, moins incompréhensible. Mais cette vérité unique, les philosophes ne l'ont pas rencontrée, ils n'ont trouvé que des vérités.

A force de douter, certains d'entre eux ' en ont fini par conclure que l'homme ne pouvait avoir la moindre certitude de la vérité. Ces philosophes sont les sceptiques dont le précurseur est le grec Pyrrhon. C'est donc à travers une analyse de la pensée sceptique qu'il convient de se demander si cette attitude philosophique, à savoir « douter de tout », attitude qui était devenue pour Montaigne vieillissant un véritable art de vivre, est recevable. Le doute est la démarche philosophique par excellence; le doute en effet pose problème, et le sens du problème est sans doute la caractéristique essentielle de la pensée philosophique.

Mais le doute absolu va plus loin que de poser un simple problème, il fait de la pensée philosophique une pensée mouvante qui ne s'endort pas dans des certitudes. Il en fait une pensée qui se retourne sur elle-même, ne se laisse jamais en paix.

Il en fait une pensée dense où les problèmes s'enchaînent comme les mots d'une proposition et rebondissent comme des cascades. Il semble bien que le propre de la philosophie soit de douter de tout.

Les questions en philosophie importent plus que les réponses.

Mais ce doute porte un danger en germe : le philosophe ne risque-t-il pas de délaisser les questions essentielles et de devenir un « coupeur de cheveux en quatre ».

Est-ce le cas du sceptique? Est-ce parce qu'ils ont abusé de ce doute, moteur de la réflexion philosophique, que les sceptiques en sont arrivés à ce degré de certitude, ou est-ce l'expérience et la réflexion qui les ont conduits à ce doute absolu? L'analyse de la pensée sceptique nous ferait plutôt pencher en faveur de la seconde réponse et nous interdit par là même de prononcer la critique que nous nous apprêtions à formuler : celle selon laquelle les sceptiques auraient déclaré « a priori » qu'il faut douter de tout pour ensuite le démontrer. On sait que les « Méditations » de Descartes commencent, elles aussi, par l'exercice d'un doute absolu : Descartes rejette le témoignage des sens (en rêve on croit voir, entendre, bouger et ce n'est qu'illusion).

Il rejette même les vérités mathématiques (car il peut se faire qu'un « malin génie » toutpuissant s'amuse à me tromper dans toutes mes pensées). Mais ce doute cartésien s'oppose radicalement au doute sceptique.

D'abord le doute cartésien est provisoire (il prend fin lorsque Descartes s'aperçoit qu'il peut douter de tout sauf du fait même qu'il pense et qu'il doute : et cette évidence invincible : je pense donc je suis est une première vérité d'où bien d'autre vont jaillir). C'est un doute volontaire, un doute « feint », dit Descartes dont la fonction est d'accoutumer « l'esprit à se détacher des sens » (« abducere mentem a sensibus ») et même de tout objet de pensée pour révéler en sa pureté l'acte même de penser.

Le doute cartésien a la valeur d'une pédagogie de l'ascèse qui vise à nous délivrer provisoirement des pensées pour révéler que nous avions l'esprit que nous sommes.

Le doute cartésien est méthodique (le malin génie n'est lui-même qu'un « patin méthodologique » (Gouhier), c'est une technique mise au service de la recherche du vrai. Le doute cartésien est un doute optimiste et héroïque, un déblaiement préalable qui précède la construction de l'édifice philosophique, une décision volontaire de faire table rase de toutes les connaissances antérieures pour bâtir une philosophie nouvelle. 2° Les arguments des sceptiques grecs. Tout au contraire, le scepticisme absolu des pyrrhoniens et de leurs disciples n'est pas un point de départ mais une conclusion –la conclusion d'échec- au terme de l'aventure du savoir. Enésidème avait groupé les arguments sous dix titres ou « tropes que Sexus Empiricus réduisit à cinq.

Il faut connaître ces arguments qu'on retrouve chez Montaigne, chez Pascal et chez Anatole France.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles