Peut-on distinguer chez l'homme ce qu'il a de naturel et de culturel ?
Extrait du document
«
Un simple bois taillé pourrait poser beaucoup de question à celui qui n'a pas vraiment réfléchi sur ce qu'il y a de
naturel et de culturel dans cet objet ; certes il est culturel, car l'homme en le taillant y impose sa marque, lui donne
une finalité qu'il n'avait pas auparavant, mais il reste aussi et encore un bois « naturel » quoiqu'on le transforme, et
quoiqu'on en dise.
Si le bois pose problème, qu'en est-il de l'homme dont des siècles de philosophie se se sont
éperdus à trouver une définition qui satisfasse toutes les écoles de pensée ? La question du sujet relance pour ainsi
dire la question d'une définition de l'homme en le scindant intentionnellement en deux : peut-on distinguer chez
l'homme ce qu'il a de naturel et de culturel ?
Afin de répondre à cette question, nous nous demanderons quelles sont les caractéristiques du naturel et du
culturel en l'homme, caractéristiques supposées par le sujet pour ensuite voir si leur opposition nous semble légitime,
enfin et surtout nous montrerons que l'homme est l'élément d'une synthèse qui se fait, avec la culture et avec la
nature, et que le lieu d'une dissociation peut être néfaste pour la civilisation .
1 Qu'est-ce que l'homme a de naturel et de culturel ?
Ce qu'il a de naturel: ses tendances, désirs , instincts, violence, force, spontanéité, la mort, les
sentiments, la pitié, la honte.
On peut dire avec Lévi-Strauss que la nature ou le naturel en l'homme, c'est tout ce qui est en nous par hérédité
biologique; la culture, c'est au contraire, tout ce que nous tenons de la tradition externe, c'est l'ensemble des
coutumes, des croyances, des institutions telles que l'art, le droit, la religion, les techniques de la vie matérielle, en
un mot, toutes les habitudes ou aptitudes apprises par l'homme en tant que membre d'une société.
Il y a donc là
deux grands ordres de faits, l'un grâce auquel nous tenons à l'animalité par tout ce que nous sommes, du fait
même de notre naissance et des caractéristiques que nous ont léguées nos parents et nos ancêtres, lesquelles
relèvent de la biologie, de la psychologie quelquefois; et d'autre part, tout cet univers artificiel qui est celui dans
lequel nous vivons en tant que membres d'une société
Ce qu'il a de culturel en lui, l'histoire, la société, la culture, tradition, le droit, la religion, artifices sociaux,
politesse, bienséance, la morale, la mode.
Comme le montre Claude Lévi-Strauss, Les Structures élémentaires de la parenté (1947) La culture, c'est
un ensemble de règles
Où finit la nature ? Où commence la culture ?
Dans « Les structures élémentaires de la parenté », Lévi-Strauss a tenté de répondre à cette double
question.
La première méthode, dit-il, et la plus simple pour repérer ce qui est naturel en l'homme, consisterait à
l'isoler un enfant nouveau-né, et à observer pendant les premiers jours de sa naissance.
Mais une telle approche
s'avère peu certaine parce qu'un enfant né est déjà un enfant conditionné.
Une partie du biologique à la naissance
est déjà fortement socialisé.
En particulier les conditions de vie de la mère pendant la période précédant
l'accouchement constituent des conditions sociales pouvant influer sur le développement de l'enfant.
On ne peut
donc espérer trouver chez l'homme l'illustration de comportement préculturel.
La deuxième méthode consisterait à recréer ce qui est préculturel en l'animal.
Observons les insectes.
Que
constatons-nous ? Que les conduites essentielles à la survivance de l'individu et de l'espèce sont transmises
héréditairement.
Les instincts, l'équipement anatomique sont tout.
Nulle trace de ce qu'on pourrait appeler « le
modèle culturel universel » (langage, outil, institutions sociales, et système de valeurs esthétiques, morales ou
religieuses).
Tournons-nous alors vers les mammifères supérieurs.
Nous constatons qu'il n'existe, au niveau du langage, des
outils, des institutions, des valeurs que de pauvres esquisses, de simples ébauches.
Même les grands singes, dit
Lévi-Strauss, sont décourageants à cet égard : « Aucun obstacle anatomique n'interdit au singe d'articuler les
sons du langage, et même des ensembles syllabiques, on ne peut qu'être frappé davantage par sa totale incapacité
d'attribuer aux sons émis ou entendus le caractères de signes .
» Les recherches poursuivies ces dernières
décennies montret, dit Lévi-Strauss que « dans certaines limites le chimpanzé peut utiliser des outils élémentaires et
éventuellement en improviser », que « des relations temporaires de solidarité et de subordination peuvent apparaître
et se défaire au sein d'un groupe donné » et enfin qu' « on peut se plaire à reconnaître dans certaines attitudes
singulières l'esquisse de formes désintéressées d'activité ou de contemplation ».
Mais, ajoute Lévi-Strauss, « si
tous ces phénomènes plaident par leur présence, ils sont plus éloquents encore –et dans un tout autre sens, par
leur pauvreté ».
De plus, et c'est là sans doute la caractéristique la plus importante, « la vie sociale des singes ne
se prête à la formulation d'aucune norme ».
A partir de cette constatation, Lévi-Strauss indique ce qui lui semble être le critère de la culture : « Partout où la
règle se manifeste, nous savons avec certitude être à l'étage de la culture.
» Mais les règles institutionnelles qui
fondent la culture sont particulières et varient d'une société à l'autre.
On peut donc affirmer que l'universel, ce qui
est commun à tous les hommes, et la marque de leur nature.
C'est donc ce double critère de la norme (règle) et de
l'universalité qui permet –dans certain cas- de séparer les éléments naturels des éléments culturels chez l'homme :
« Posons donc que tout ce qui est universel chez l'homme relève de la nature et se caractérise par la spontanéité,
que tout ce qui est astreint à une norme appartient à la culture et présente les attributs du relatif et du
particulier.
» Mais ce double critère posé, nous nous trouvons confrontés avec un fait unique en son genre : la
prohibition de l'inceste.
Celle-ci, en tant qu'institution relève de la règle et donc de la culture.
Mais, en même.
»
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