N'y a-t-il de réel qu'interprété ?
Extrait du document
«
Introduction
E.
Kant, à la fin de la « déduction des concepts purs de l'entendements » de
la Critique de la raison pure affirme que l'entendement est le « législateur de
la nature », c'est à dire qu'il lui impose ses lois.
Kant reconnaît que cette
conception est étrange puisque nous avons l'impression que les lois de la
nature ne dépendent pas de nous mais que nous nous contentons de les
découvrir.
Pourtant il affirme aussi que la nature, que le réel tel que nous le
concevons organisé en objet ne serait pas possible si nous ne l'interprétions
pas, c'est à dire si nous ne l'organisions pas nous-mêmes.
Kant est ainsi
confronté à une question, n'y a t il de réel qu'interprété ?
Alors que nous avons l'impression que le réel nous est livré il s'agit ainsi de
savoir si ce que nous prenons comme donnée, le réel, n'est pas le fruit d'une
construction.
Plus encore le sujet demande si le réel n'existe pas que lorsqu'il
est interprété.
Il s'agira donc de savoir si le réel n'est qu'une construction ou
s'il préexiste à notre interprétation.
Pour répondre à cette question nous montrerons tout d'abord qu'une faculté
réceptive est nécessaire pour être en prise avec le réel mais nous verrons
ensuite qu'elle ne suffit pas à nous livrer un réel organisé et qui a du sens, ce
qui nous conduira enfin à établir que le sens du réel est une construction ce
qui ne signifie pas que cette construction soit purement subjective pour
autant.
1.
Une faculté passive est nécessaire afin de « recevoir » le réel
Le réel est ce qui est existe effectivement, par opposition avec ce qui n'est que conçu ou imaginé, par opposition
avec le fictif l'illusoire ou l'irréel.
Par conséquent, le réel pourrait être un donné déjà construit avec lequel il nous
faudrait être en contact.
En effet, si nous voulons « atteindre » le réel, il nous faut être en contacts avec lui.
Or, c'est l'expérience qui nous
met en contact avec ce qui existe puisqu'il n'est pas en notre pouvoir de provoquer l'existence du réel.
Lorsque
nous ouvrons les yeux nous voyons le réel et nous ne provoquons pas cette existence.
Dès lors, faire une
expérience semble être une condition nécessaire de notre mise en relation avec le réel.
Lorsque nous percevons quelque chose nous sommes en contact immédiat avec ce qui existe.
Par conséquent, nous
semblons, dans un premier temps au moins, être passif face au réel puisqu'il est nécessaire de le recevoir pour en
avoir conscience.
Nous avons donc besoin d'une faculté passive pour être en contact avec le réel et nous
appellerons cette faculté, avec E.
Kant dans le Critique de la raison pure, « sensibilité ».
En effet, ce sont les sens
qui nous mettent originellement en prise avec le réel.
2.
Pour autant, la passivité n'est pas suffisante, nous devons être « actifs » face au réel
Aux XVIIeme et XVIIIeme siècle, le problème de Molyneux a suscité de nombreuses réponses de la part des
philosophes.
Ce problème, originellement posé par John Locke dans l'Essai sur l'entendement humain se pose de la
manière suivante : imaginons qu'un aveugle ait appris à reconnaître un globe et un cube en les touchant, s'il arrivait
que cet aveugle retrouve la vue, pourrait-il reconnaître le globe et le cube sans les toucher mais en les regardant ?
Le problème de Molyneux interroge ainsi l'existence d'un apprentissage de la perception.
En effet, si l'aveugle
parvient à percevoir immédiatement le globe et le cube, alors notre perception nous met naturellement en contact
avec un réel organisé en objets alors que si l'aveugle doit apprendre à voir le globe et le cube, cela signifie que la
perception est le fruit d'un apprentissage et que nous ne sommes pas en contact avec un réel qui nous est donné
organisé mais que nous organisons le réel, que nous en constituons les objets.
Or, l'aveugle, lorsqu'il ouvre les yeux et se retrouve face au réel n'est pas face à des objets qu'il peut nommer ou
reconnaître mais face à des tâches de couleurs et à un monde qui change par degrés sans qu'il puisse trouver un
objet auquel s'attacher.
Par conséquent, la simple réception du réel n'est pas suffisante pour percevoir son
organisation, il s'agit d'organiser le réel et d'apprendre à la faire.
La perception n'est donc pas uniquement réceptive
ou passive mais doit posséder un élément actif qui nous permette d'organiser le réel, nous devons constituer les
objets et l'organisation du réel.
Nous nous rapprochons ainsi ici de la position kantienne de la Critique de la raison pure.
Dans la « déduction
transcendantale », Kant montre ainsi que la sensibilité nous fournit la matière de la perception mais que pour autant
nous devons organiser le réel pour pouvoir percevoir des objets.
Comme nous l'avons dit, l'aveugle se retrouve face
à un réel qui est mouvant et qui n'est pas organisé, il lui faut donc briser la continuité du réel qui est en perpétuelle
transformation pour en faire des objets.
Kant montre que pour ce faire nous appliquons des concepts à nos
perceptions.
Parmi ces concepts se trouvent les « catégories », c'est à dire les règles fondamentales d'organisation
du réel que l'entendement va appliquer à nos perceptions.
Ainsi appliquons nous au réel la catégorie de la
« substance » (une substance est un objet qui persiste à travers le temps), pour rattacher plusieurs perceptions à
un même objet.
Ainsi en rattachant la perception de la rotondité, de la douceur etc.
à un même objet nous.
»
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