Nos pensées dépendent-elles de notre volonté ?
Extrait du document
«
Juger est un acte volontaire
Penser, c'est avant tout juger, c'est-à-dire affirmer ou nier un rapport entre deux idées.
Pour Descartes, juger est
un acte de la volonté.
Pour Descartes, notre volonté est infinie: elle est ce qu'il y a de divin en l'homme.
C'est ce
que l'on appelle le libre-arbitre: la faculté de décider d'agir, que chacun peut ressentir en soi-même au moment où il
décide de faire ou de ne pas faire un geste par exemple.
Mon entendement (faculté de comprendre) me présente les
idées et ma volonté décide de les accepter ou de les refuser.
Je suis donc responsable de mes pensées, de mes
erreurs comme de mes idées vraies.
"Mais, parce que nous savons que l'erreur dépend de notre volonté, et
que personne n'a la volonté de se tromper, on s'étonnera peut-être
qu'il y ait de l'erreur en nos jugements.
Mais il faut remarquer qu'il y a
bien de la différence entre vouloir être trompé et vouloir donner son
consentement à des opinions qui sont cause que nous nous trompons
quelquefois.
Car encore qu'il n'y ait personne qui veuille expressément
se méprendre, il ne s'en trouve presque pas un qui ne veuille donner
son consentement des choses qu'il ne connaît pas distinctement : et
même il arrive souvent que c'est le désir de connaître la vérité qui fait
que ceux qui ne savent pas l'ordre qu'il faut tenir pour la rechercher
manquent de la trouver et se trompent, cause qu'il les incite à
précipiter leurs jugements, et prendre des choses pour vraies,
desquelles ils n'ont pas assez de connaissance." DESCARTES
Dans un texte consacré au thème de l'erreur, Descartes se demande
comment l'erreur est possible.
Son existence pose en effet un problème dans
la mesure où elle est contraire au désir de connaître la vérité que l'on peut
observer en chacun.
Comment l'erreur peut-elle exister puisqu'elle n'est jamais
voulue ? Et, puisqu'en dépit de ce désir elle existe, à quoi est-elle due ?
Ce que soutient Descartes, c'est, paradoxalement, que la cause de nos
erreurs est le désir de connaître la vérité lui-même, en ce qu'il nous fait nous
précipiter dans nos jugements.
En quoi consiste exactement le problème que pose l'existence de l'erreur ? Comment est-elle possible malgré la
volonté de ne pas se tromper ? En quoi peut-on dire que c'est la volonté de connaître la vérité qui est à l'origine de
l'erreur ?
Au moyen d'un raisonnement, Descartes pose un problème par lequel l'existence de l'erreur, pourtant si familière,
devient un sujet d'étonnement :
"Mais, parce que nous savons que l'erreur dépend de notre volonté, et que personne n'a la volonté de se tromper,
on s'étonnera peut-être qu'il y ait de l'erreur en nos jugements."
Reformulation-explicitation.
On peut constater que personne ne veut se tromper, ne souhaite délibérément être dans l'erreur.
Pourtant, on doit
aussi constater qu'il arrive que l'on se trompe, que l'erreur existe quoique personne ne la veuille.
Or, l'erreur dépend
de nous, de notre volonté.
Alors comment est-il possible que nous nous trompions, qu'il y ait de l'erreur puisqu'il
semble que nous pouvons et que nous voulons l'éviter ?
Explication.
Une erreur, c'est une proposition fausse, c'est-à-dire non conforme à la réalité à propos de laquelle elle se
prononce, mais que j'ignore comme fausse, que je tiens pour vraie, que j'affirme comme vraie.
Une erreur n'est pas
un mensonge : lorsque je mens, je sais que ce que j'affirme est faux, ce n'est pas le cas lorsque je me trompe.
Mais en quoi peut-on dire que l'erreur est en rapport avec la volonté ? Vouloir, n'est-ce pas agir de manière
délibérée, sans contrainte extérieure, sans y être forcé ou obligé, en un mot librement ? Agir librement et non pas
juger ou affirmer librement ? Certes, mais, lorsque je me trompe, ne le fais-je pas tout aussi délibérément ? Lorsque
j'affirme comme vrai quelque chose qui est faux sans que je le sache, c'est moi qui l'affirme, sans contrainte
extérieure, et, par-là librement, donc volontairement.
De sorte que la seule cause possible de l'erreur, c'est bien la
volonté.
Non que je me trompe volontairement, en connaissance de cause, mais je ne suis jamais forcé de me.
»
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