Ne prend-on conscience que par opposition de soi a soi ?
Extrait du document
«
• La conscience psychologique
La conscience spontanée
On peut d'abord comprendre l'idée d'Alain sur le plan psychologique.
Prendre conscience de soi-même et du monde,
est-ce prendre conscience par opposition de soi à soi ?
• Il ne le semble pas, sur le plan de la conscience immédiate ou spontanée, qui accompagne, sans que nous y
réfléchissions expressément, chacun de nos actes.
Mais, alors, puis-je dire que je prends conscience de quelque
chose ?
La conscience réfléchie, selon Alain
• Prendre conscience est l'acte essentiel de la véritable conscience, toujours réflexive chez Alain.
Cette conscience
implique une séparation entre soi et soi, et entre soi et le monde.
«Dans le sommeil, écrit Alain, je suis tout ; mais je n'en sais rien.
La conscience n'est pas immédiate.
Je pense, et
puis je pense que je pense, par quoi je distingue Sujet et Objet.
Moi et mon idée» (Textes choisis, P.U.F., pp.
137138).
• On notera qu'une telle séparation ne brise pas l'unité profonde de la conscience : «Quel est donc le principe des
principes ? C'est que toute expérience possible doit s'accorder avec l'unité de la conscience.
Je pense ce que je
pense.
C'est toujours moi le même et indivisible.
Principe purement formel, Il ne s'agit pas de savoir si je suis le
même en fait, mais de savoir si je puis me penser autre absolument, ou double absolument.
Dès que je pense que je
change, il faut bien que je pense que c'est moi le même qui change, etc.
Cela compris, et il y faudra du temps, on
sait a priori qu'une expérience qui romprait cette unité ne peut entrer dans la conscience» (Histoire de mes pensées,
p.
130).
Le doute et la conscience de soi : Descartes
• Alain prolonge, en un sens, les analyses de Descartes.
Dans ces analyses, le doute apparaît comme le travail par
lequel je m'occupe à moi-même, à toutes les idées reçues que je peux avoir sur ce que je suis, pour percevoir que je
suis précisément ce mouvement d'opposition, cette capacité de refuser quelque évidence que ce soit, révélée par
l'acte de douter.
(Lire Descartes, Méditations, I et II)
Cf.
Alain : l'éclosion du doute est toujours consécutive à une crise, à un désaccord rompant l'harmonie entre moi
et le monde ou entre moi et moi.
On voit donc que l'on n'a pas conscience de soi, c'est-à-dire «qu'on ne se connaît
point si on ne se condamne, ce qui est se diviser de soi et en même temps se reconnaître.
Car pourquoi se réveillet-on, sinon par quelque conflit intérieur ?» (Histoire de mes pensées, p.
266).
• La conscience morale
▪ On appelle conscience morale la capacité de porter un jugement sur nos actes, de les tenir pour bons ou mauvais.
• Pour Alain, consciences morale et psychologique..
Le langage commun ne distingue pas entre la «conscience
«conscience psychologique».
Il faut, selon Alain, lui donner raison.
langage, note Alain, enferme bien des secrets ;
et qui saurait bien sa langue saurait tout ce qui importe», Propos, éd.
Pléiade, I, p.
844).
En effet :
– La conscience est corrélative à un sentiment d'insuffisance, de manque, de défaillance suscité par un obstacle
(autrement il y a automatisme).
– Être conscient, comme l'indique l'étymologie (cumsciens), c'est posséder un savoir «rassemblé» autour d'un
centre, celui qui constitue la personne.
La conscience, écrit Alain, «c'est le savoir revenant sur lui-même et prenant
pour centre la personne humaine elle-même, qui se met en demeure de décider et de juger.
Ce mouvement intérieur
est dans toute pensée ; car celui qui ne se dit pas finalement : "Que dois-je penser ?" ne peut pas être dit penser»
(Définitions, p.
64).
• Dans ces conditions, il est clair que «La conscience est toujours implicitement morale; et l'immortalité consiste
toujours à ne point vouloir penser qu'on pense, et à ajourner le jugement intérieur.
On nomme bien inconscients
ceux quine posent aucune question d'eux-mêmes.
Ce qui d'exclut pas les opinions suries opinions et tous les savoirfaire, auxquels il manque la réflexion, c'est-à-dire le recul en soi-même qui permet de se reconnaître et de se juger;
et cela est proprement la conscience» (id.).
Conclusion
L'être conscient est l'être qui se sépare de lui-même, prend du recul et se juge.
L'être conscient n'est pas le simple
spectateur du monde, mais le spectateur du spectateur, celui qui se regarde comme spectateur.
Tel est, nous dit
Alain, l'enseignement de la tragédie grecque.
Car cette ancienne tragédie «donnait au centre le spectacle, et,
autour du spectacle, des spectateurs en spectacle, qui formaient le coeur ; ainsi les spectateurs avaient sous les
yeux, non seulement le drame, mais le spectateur tel qu'il ne devait pas être, le spectateur quine sait pas qu'il est
spectateur.
Image sublime de la réflexion, et véritable école de la pensée.
Voilà, se dit le spectateur, voilà ce que je
serais si je me laissais être, si je me croyais.» (Propos, op.
cit., p.
845)..
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