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LOCKE: lois et bien général des hommes

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Une loi, suivant sa véritable notion, n'est pas tant faite pour limiter, que pour faire agir un agent intelligent et libre conformément à ses propres intérêts : elle ne prescrit rien que par rapport au bien général de ceux qui y sont soumis. Peuvent-ils être plus heureux sans cette loi-là ? Dès lors cette sorte de loi s'évanouit d'elle-même, comme une chose inutile ; et ce qui nous conduit dans des précipices et dans des abîmes, mérite sans doute d'être rejeté. Quoi qu'il en soit, il est certain que la fin d'une loi n'est point d'abolir ou de diminuer la liberté, mais de la conserver et de l'augmenter. Et certes, dans toutes les sortes d'états des êtres créés capables de lois, où il n'y a point de loi, il n'y a point non plus de liberté. Car la liberté consiste à être exempt de gêne et de violence, de la part d'autrui : ce qui ne saurait se trouver où il n'y a point de loi, et où il n'y a point, selon ce que nous avons dit ci-dessus, une liberté, par laquelle chacun peut faire ce qu'il lui plaît. Car qui peut être libre, lorsque l'humeur fâcheuse de quelque autre pourra dominer sur lui et le maîtriser ? Mais on jouit d'une certaine liberté, quand on peut disposer librement, et comme on veut, de sa personne, de ses actions, de ses possessions, de tout son bien propre, suivant les lois sous lesquelles on vit, et qui font qu'on n'est point sujet à la volonté arbitraire des autres, mais qu'on peut librement suivre la sienne propre. LOCKE

« Une loi, suivant sa véritable notion, n'est pas tant faite pour limiter, que pour faire agir un agent intelligent et libre conformément à ses propres intérêts : elle ne prescrit rien que par rapport au bien général de ceux qui y sont soumis.

Peuvent-ils être plus heureux sans cette loi-là ? Dès lors cette sorte de loi s'évanouit d'elle-même, comme une chose inutile ; et ce qui nous conduit dans des précipices et dans des abîmes, mérite sans doute d'être rejeté.

Quoi qu'il en soit, il est certain que la fin d'une loi n'est point d'abolir ou de diminuer la liberté, mais de la conserver et de l'augmenter.

Et certes, dans toutes les sortes d'états des êtres créés capables de lois, où il n'y a point de loi, il n'y a point non plus de liberté.

Car la liberté consiste à être exempt de gêne et de violence, de la part d'autrui : ce qui ne saurait se trouver où il n'y a point de loi, et où il n'y a point, selon ce que nous avons dit ci-dessus, une liberté, par laquelle chacun peut faire ce qu'il lui plaît.

Car qui peut être libre, lorsque l'humeur fâcheuse de quelque autre pourra dominer sur lui et le maîtriser ? Mais on jouit d'une certaine liberté, quand on peut disposer librement, et comme on veut, de sa personne, de ses actions, de ses possessions, de tout son bien propre, suivant les lois sous lesquelles on vit, et qui font qu'on n'est point sujet à la volonté arbitraire des autres, mais qu'on peut librement suivre la sienne propre. Introduction La loi apparaît comme une contrainte pour l'individu, elle lui pose des interdits.

Pourtant la loi est aussi ce qui préserve l'individu d'une liberté infinie que pourrait exercer dangereusement autrui sur lui. Dans quelle mesure la loi peut-elle alors garantir la sécurité des individus, tout en préservant leurs libertés individuelles ? Dans ce texte extrait du T raité du gouvernement civil, Locke va répondre que non seulement la loi protège de la liberté menaçante de l'autre mais que de plus, elle garantit un véritable espace de liberté d'agir. A insi, la loi, au service du bien général, vise le bonheur de chacun, et donc cherche à en augmenter la liberté.

En effet, la loi, en garantissant une liberté comme absence de contrainte, préserve aussi un espace d'autonomie.

M ais à quelles conditions la loi garantit-elle l'autonomie des individus ? 1.

La loi, en servant l'intérêt de chacun, est la condition nécessaire de la liberté A .

La loi vise le bien général La loi d'après sa définition vise le « bien général ».

En effet, la loi est établie par une autorité, l'État, qui vise l'organisation des rapports sociaux.

Elle réglemente l'action de ceux qui sont « intelligents et libres », c'est-à-dire responsables, en faveur de leurs intérêts.

M ais ici la loi semble concerner le bien de l'ensemble des individus d'une même société, plutôt que le bien de chacun d'eux en particulier. B.

Si elle s'oppose au bonheur, elle disparaît C omment savoir que la loi sert l'intérêt individuel de l'homme et le rend plus heureux ? Locke répond par un raisonnement par l'absurde : si la loi n'apporte pas plus de bonheur, alors elle « s'évanouit d'elle-même, comme une chose inutile ».

Si elle ne sert à rien, elle est oubliée.

Si elle est néfaste, il faut la rejeter.

La liberté est un bien pour l'homme et la loi ne peut que l'augmenter.

Tels sont les principes que l'on doit exiger d'une loi.

Locke définit encore ici non pas ce que la loi est de fait mais ce qu'elle doit être « suivant sa véritable notion ». [Transition] A insi l'auteur pose, dans un premier mouvement du texte, le principe au coeur de la loi : alors qu'elle soumet les individus, elle doit pourtant répondre au bien général, et donc à travers lui elle vise l'intérêt de chacun.

La loi, en visant l'intérêt de l'homme, vise donc aussi sa liberté.

Toute loi ne répondant pas à ce principe ne doit pas perdurer. 2.

Car la loi garantit un espace de liberté face à la menace des autres A .

La loi permet de disposer de sa personne et de ses biens C omment la loi, expression d'une autorité, peut-elle augmenter la liberté ? Pour répondre, Locke va introduire un troisième terme entre la loi et la liberté : autrui.

En effet, la liberté, comme absence de contrainte, consiste à ne pas être limitée par la volonté d'autrui.

C hacun peut constituer une menace à l'action d'autrui dans la mesure où il peut se montrer gênant, voire agressif.

C hacun peut empêcher l'autre de faire ce qui lui plaît : la loi permet donc de ne pas être gêné » par autrui, et en ce sens donne toute la latitude pour agir librement.

La loi ne limite pas la liberté, mais limite les contraintes empêchant d'être libre. B.

La loi est alors garante d'autonomie Mais la liberté comme absence de contrainte n'est qu'une définition négative de la liberté.

Dire que la loi limite les contraintes qui nuisent à l'exercice de la liberté, c'est dire seulement que la loi donne les conditions d'une liberté possible.

L'auteur va plus loin en affirmant que la loi permet une véritable autonomie. En effet, être libre, ce n'est pas seulement ne pas être « sujet à la volonté arbitraire des autres », mais c'est aussi « librement suivre la sienne propre ». Disposer de ses biens, de sa personne et de ses actions, constitue une véritable « autonomie », c'est-à-dire, d'après son étymologie, la possibilité de se donner à soi-même sa propre loi (auto-nomos). [Transition] A insi l'auteur explique dans un second mouvement du texte comment la loi préserve et même augmente la liberté.

En effet, d'une part, la loi en préservant chacun de la volonté infinie des autres garantit une liberté qui est alors définie comme absence de contrainte.

Et d'autre part, la loi préserve ainsi un espace où l'individu peut lui-même s'autodéterminer, agir par sa propre volonté. Quelles sont alors les conditions de réalisation de ces principes qui font de la loi non pas l'instrument de l'aliénation et de la répression, mais l'instrument de la liberté ? 3.

Mais à quelles conditions la loi garantit-elle l'autonomie des individus ? A .

Le contrat social exprime la volonté générale Pour Locke, il s'agit dans la société civile de préserver des droits qui à l'état de nature sont menacés par l'agressivité d'autrui.

L'État résulte donc d'un contrat social qui exprime la volonté générale, en sorte que chacun obéit à une loi qu'il s'est lui-même prescrite.

En ce sens, la loi n'est plus ce qui soumet, ce qui contraint, mais ce qui « oblige », c'est-à-dire ce qui s'impose de manière légitime.

La fonction de la loi reste d'assurer la liberté de chacun (être maître de soi) et la préservation de ses possessions (la propriété privée).

C 'est en ce sens que Locke est à l'origine du libéralisme. B.

La séparation des pouvoirs préserve des abus de l'État La limite de l'État se situe donc dans ses abus de pouvoirs, lorsqu'il porte atteinte à la liberté plutôt que de la garantir.

Pour éviter un tel écueil, il faut, comme l'a décrit Montesquieu dans L'Esprit des lois, séparer les pouvoirs en législatif, exécutif et juridique de manière à ce que l'équilibre des puissances soit préservé.

C 'est en ce sens que Locke peut s'opposer à l'absolutisme. Conclusion A insi, selon Locke, la loi garantit aux individus une liberté comme absence de contrainte dans la mesure où elle limite la liberté qu'autrui peut exercer sur les individus de manière malencontreuse.

Mais elle est aussi de ce fait ce qui permet à l'individu d'exercer sa propre volonté sans être limité par celle d'autrui, et d'user alors de la conservation de ses biens et de sa propre personne. La difficulté de tels principes réside dans leur application : dans quelle mesure l'intérêt général qu'exprime la loi, peut-il servir l'ensemble des intérêts particuliers ? La liberté individuelle ainsi préservée, est-elle bien la liberté de tous les individus ? Et par ailleurs, jusqu'à quand la loi peut-elle assoire son autorité sans limiter en quelque façon la liberté de certains individus ?. »

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