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L'objectivité de la science est-elle moralement neutre ?

Extrait du document

« Il s'agit d'évaluer l'objectivité scientifique au point de vue de la morale.

Cela suppose évidemment que l'on ait une idée assez claire et complète de ce qu'il faut entendre par objectivité de la science.

Analysez la neutralité de la science vis-à-vis de la morale - ou au contraire son engagement - ne sera possible qu'à partir de données concrètes fournies par l'histoire des connaissances et découvertes scientifiques, ainsi que des cas où un conflit (ou au contraire une alliance) se sont effectivement produits.

On évitera de se limiter à l'exemple trop classique du nucléaire et de la bombe atomique. Introduction La technique fait l'objet de débats passionnés en raison de l'affirmation évidente de son pouvoir sur nos modes de vie.

Les jugements s'opposent de manière antithétiques.

Certains déclarent qu'elle détruira notre planète, rappellent les horreurs de la guerre et évoquent les périls du nucléaire.

D'autres leur répondent que les malades sont heureux de bénéficier d'une technologie de pointe et font valoir le recul des fléaux que les hommes d'autrefois subissaient sans recours.

La solution la plus sage paraît donc être de conclure en faveur d'une neutralité axiologique.

La technique ne serait ni bonne ni mauvaise.

Le bien et le mal n'appartiendraient pas à ses valeurs.

C'est la moralité de l'usager qui serait en cause, non celle des moyens qu'il emploie.

Cette thèse est-elle cependant fondée ? Que signifie être neutre ? Nous pensons spontanément qu'il s'agit d'un état de fait mais ce pourrait être la conséquence d'un choix engageant notre responsabilité.

Si la technique apparaît d'abord comme un moyen, il faut se demander quel rapport il entretient avec sa fin.

Dès lors, une question surgit.

L'indifférence de la technique consiste-t-elle en une simple ignorance de la morale ou exprime-t-elle le désir de la neutraliser ? Technique et culture A.

L'idée de neutralité La neutralité est une notion intéressante car elle suppose nécessairement un conflit.

Un pays neutre refuse de prendre parti dans une guerre parce qu'il juge que les buts poursuivis par les belligérants sont équivalents.

Cette indifférence est parfois synonyme de tiédeur, de manque de relief.

La prudence excessive de celui qui ne s'engage pas est condamnée au nom de la nécessité de choisir en vue d'une vie meilleure.

On peut toutefois objecter que l'enrôlement systématique est également condamnable.

Il y a donc une ambivalence de la neutralité.

Est-elle l'attitude passive de celui qui par faiblesse ou crainte attend de connaître l'issue d'une lutte, ou la marque d'un esprit réfléchi qui refuse de rejoindre une cause car il estime qu'elle lui est radicalement étrangère ? La question se pose bien dans le cas de la technique.

Serait-il illégitime d'estimer que les débats sur sa moralité ou son immoralité soient finalement des sujets dérivés qui ne concernent pas son essence ? À l'instar de l'épistémologie qui étudie les concepts et les méthodes scientifiques en proposant une histoire des sciences indépendante de leur dimension sociale ou morale, la pensée de la technique pourrait faire valoir son droit à exister sans être évaluée en fonction de ses conséquences sur la civilisation.

Revendiquer la neutralité s'entend donc comme la condition de possibilité d'une conception de la technique qui la libérerait des idéologies et permettrait de l'étudier vraiment.

Le passionné de voitures, par exemple, cherche à connaître le progrès de la motorisation sans avoir en tête la question des victimes de la route.

Il peut prendre plaisir à découvrir les inventions des grands ingénieurs et estimer qu'elles valent pour elles-mêmes, c'est-à-dire comme des manifestations du génie humain. B.

Le savoir-faire Pourquoi s'inquiéter du rapport de la technique à la morale ? N'est-elle pas une activité purement instrumentale ? Son registre est celui des moyens, non des fins.

Leur valeur réside dans leur utilité, non dans leur bonté ou leur méchanceté.

Un examen un peu attentif révèle cependant la complexité du sujet. La technique se définit comme un savoir-faire.

L'étymologie nous renvoie à l'idée d'un ajustement bien réalisé.

Nous en retrouvons la trace dans le terme « d'architecte » qui désigne celui ayant la connaissance du principe (arche) selon lequel des matériaux seront bien assemblés (tuktos).

Nous voyons ainsi que la valeur dominante est celle de la qualité d'une opération relativement au but fixé.

Nul ne voudrait habiter une demeure dont les murs seraient de guingois ou fuiraient.

La vertu du technicien est donc la compétence qu'il acquiert par un apprentissage fait d'exercices répétés.

Personne ne naît habile, nous devons le devenir par l'éducation.

On aurait tort, d'ailleurs, de limiter cette vérité aux seules opérations de fabrication.

L'écolier assimile aussi des démarches intellectuelles afin de réaliser avec aisance des tâches de plus en plus complexes.

Que vaudraient des connaissances non ordonnées par une méthode ? Tout ceci montre que la technique est une notion dont l'extension est très large, au point que l'on peut se demander ce qui lui échappe dans l'usage qu'un homme fait de ses facultés.

L'ethnologue Marcel Mauss le souligne en répertoriant toutes les techniques du corps.

Ce que nous croyons être naturel, comme manger, marcher, dormir s'accomplit toujours moyennant des gestes appris qui témoignent de notre appartenance à une civilisation. Nous sommes inconsciemment modelés par des valeurs éthiques. [Transition] Nous venons de voir que le savoir-faire a une valeur culturelle qui ne se limite pas à la compétence professionnelle. La technique a donc des enjeux moraux.

Dès lors, nous pouvons comprendre qu'il y ait matière à débats.

Comment préciser ce point ? 2.

Le conflit des interprétations. »

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