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l'obéissance est-elle toujours synonyme de sagesse ?

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« Introduction -Obéir, c'est se placer sous la domination de quelqu'un ou de quelque chose d'extérieur à soi, c'est faire acte de soumission ; ce que permet la soumission, c'est l'auto-limitation de la sphère du sujet agissant, grâce à laquelle d'autres sphères peuvent coexister avec celle de ce sujet. -En tant qu'elle permet une coexistence des sujets par l'auto-limitation qu'ils s'imposent, l'obéissance peut-être assimilée à la sagesse, si l'on entend par celle-ci une sorte d'attitude raisonnée qui permet une certaine cohésion sociale ou politique qui, sans elle, serait impossible. -Néanmoins, on peut se demander si l'obéissance, pour être assimilée à la sagesse, ne devrait pas faire appel à un principe supérieur que la simple obéissance, puisque celle-ci peut se révéler être tout aussi néfaste pour un bon équilibre, tant individuel que social : en effet, comment pourrait-on considérer que l'obéissance à ses pulsions ou à tyran sont des signes de la sagesse ? -Ainsi, quel critère fondamental faut-il assurer pour que l'obéissance constitue une voie solide vers la sagesse ? Comment distinguer la "bonne" de la "mauvaise" obéissance, en ce sens ? I.

Au niveau individuel, il y a deux formes opposées de l'obéissance, dont l'une seulement peut être dite comme "synonyme de la sagesse" (Kant). La volonté constitue l'une des facultés majeures de l'esprit humain.

Au sein de cette faculté, Kant distingue deux tendances opposées : la faculté inférieure de désirer, et la faculté supérieure. Selon la faculté inférieure, l'on désire ce qui nous est agréable, c'est-à-dire, plus précisément, que la maxime de notre action se trouve extérieure à nous.

Ce qui caractérise cette manière de désirer, c'est l'hétéronomie, par laquelle nous n'obéissons qu'à ce qui nous détermine de l'extérieur.

Tandis que dans la faculté supérieure de désirer, la maxime de notre action est rationnelle, en ce sens qu'elle est déterminée par la forme pure de la raison dans son usage pratique ; ici, la volonté prend son sens et sa fonction véritables, et se confond avec la raison pure pratique : l'obéissance est autonomie de la volonté, qui s'autodétermine dans l'élément de sa liberté constitutive.

La sagesse morale, ainsi, consiste en une obéissance à nos propres lois morales rationnellement déterminées. II.

Au niveau collectif, l'une des formes de l'obéissance doit être contestée dans sa légitimité, si précisément elle ne suit pas le sens de la "sagesse" d'une constitution politique démocratique (Rousseau). L'obéissance constitue un élément majeur de la cohésion socio-politique.

Chaque citoyen doit obéir à un ensemble de règles et de lois qui limitent sa capacité d'action et qui permettent ainsi la coexistence de libertés qui s'auto-limitent réciproquement.

Or, c'est précisément dans ce sens d'une inter-limitation réciproque des citoyens, c'est-à-dire dans un sens horizontal, que l'obéissance est valable et légitime.

Elle garantit la liberté du citoyen et la cohésion socio-politique de la cité.

L'obéissance politique suppose la liberté du citoyen, parce que celui-ci obéit à une loi qu'il a lui-même voulue. De ce point de vue, une forme d'obéissance est rendue illégitime si elle s'oppose à la liberté du citoyen (dans un sens vertical), par exemple si un tyran prend les commandes du pouvoir, et s'interpose ainsi entre les citoyens et les lois qui doivent être l'expression pure de sa propre volonté ; l'obéissance à un tel tyran serait une servitude, et serait contraire à la sagesse, car contraire à la liberté du citoyen.

C'est en ce sens que l'obéissance du citoyen rend illégitime l'obéissance au tyran : car l'une suppose une liberté que l'autre abolit. III.

L'obéissance peut être synonyme de sagesse si son principe directeur se trouve dans la partie rationnelle de l'âme (Platon). Selon Platon, la sagesse constitue avant tout un savoir, d'où leur appellation commune, en grec, de sophia. Si l'obéissance a quelque rapport à la sagesse, c'est donc qu'elle a rapport au savoir, et plus précisément à la partie de l'âme où est rendue possible l'accès à la science : la partie rationnelle.

Toute obéissance est "sage" si elle tire son principe recteur dans la partie rationnelle de l'âme, parce que cette partie a rapport avec la vérité, c'est-à-dire avec la Forme immuable du Bien.

Si l'on norme tant notre action individuelle que la cohésion socio-politique selon l'ordre propre de la raison, alors l'homme, dans ses deux dimensions individuelle et social trouve la "sagesse", qui consiste, ici, en ce que chaque élément organique du tout obéisse au principe qui lui est hiérarchiquement supérieur : ainsi, la partie désirante de l'âme devra obéir à la partie rationnelle, tout comme la classe sociale des artisans devra obéir à l'élite gouvernementale.

Obéir, c'est rester confiné dans sa fonction propre sans tenter d'outrepasser ses propres limites légitimes ; et le principe de cette obéissance, c'est l'acceptation de se soumettre à un principe reconnu comme hiérarchiquement supérieur, celui de la raison. Conclusion -Il est possible de distinguer plusieurs niveaux d'obéissance, tant du point de vue individuel que collectif, qui ne confinent pas tous à la sagesse.

Si l'obéissance seule ne suffit pas à nous faire accéder à la sagesse, c'est donc bien qu'il doit y avoir un principe recteur de cette obéissance. -Ce principe, c'est l'élément rationnel, qui permet à une totalité de bien fonctionner, en permettant la bonne articulation des parties entre elles ; et la condition de cette bonne tenue de l'organisation d'ensemble, c'est que chaque partie accepte de se soumettre à ce qui la dépasse naturellement comme lui étant naturellement supérieur. -La raison, comme principe recteur de l'obéissance, est ce qui permet l'accès à la sagesse : la santé morale chez l'individu, et la santé sociale dans la communauté politique.. »

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