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L'histoire n'est-elle que le récit des faits tels qu'ils se sont passés ?

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Mais toujours il rat¬tache un acte à ses causes ou à ses conséquences : réponse adaptée ou inadaptée, décision efficace ou inefficace [des acteurs historiques]. En ce sens, il utilise le critère que suggère l'éthique historique : le succès » (Op. cit., p. 358.) ? On voit qu'il semble impossible de tracer la frontière qui séparerait une histoire exposant les faits tels qu'ils se sont passés et une histoire construisant son objet, un passé jugé significatif. b) La synthèse historique ? On oppose souvent à l'établissement des faits - qui n'impliquerait aucune thèse philosophique - l'élaboration d'une synthèse historique, l'articulation des faits à l'intérieur d'un ensemble qui permet de les interpréter, de définir causes et conséquences, etc. C'est sur ce plan que l'historien ferait appel à des philosophies ou à des thèses philosophiques. ? Une telle opposition, cependant, est un peu artificielle : le choix des faits, nous l'avons vu, mais aussi leur détermination, requièrent une idée de leur sens, de leur valeur, qui engage déjà une démarche de synthèse. ? Un exemple.


« introduction a) A première vue, si l'on veut que l'histoire ne reste pas, comme elle l'a souvent été, leçon de morale, somme d'anecdotes distrayantes, «belles histoires» plus ou moins imaginaires, récit d'aventures merveilleuses, si l'on veut qu'elle devienne une science, une connaissance objective, il est nécessaire qu'elle soit «le simple récit des faits, tels qu'ils se sont passés ». b) le problème.

Une telle conception de l'histoire, si naturelle qu'elle puisse paraître au premier abord, est-elle cependant possible ? Quelle histoire expose l'historien qui décide de faire abstraction de toute théorie et de toute philosophie de l'histoire pour « laisser parler les faits » ? Peut-il vraiment tenir cette position ? Autrement dit, il faut se demander si l'histoire peut réellement n'être que le simple récit des faits, tels qu'ils se sont passés. 1) établir les faits historiques a) La critique historique, méthode scientifique • Tout d'abord, pour parvenir à une connaissance vraie des faits qu'il étudie, l'historien professionnel soumet les documents sur lesquels il travaille à une « critique historique » qui permet d'en apprécier la valeur de vérité. On distingue ainsi : — La critique «externe» (qui porte sur l'intégrité et l'authenticité du document : l'historien doit par exemple s'assurer qu'il n'est pas en présence d'un «faux», d'une contrefaçon, etc.) ; — la critique «interne» (sincérité du contenu des documents problème de concordance entre les sources, vraisemblance des témoignages, etc.). b) Positivisme historique et refus de la philosophie • Héritiers du positivisme, certains historiens ont tenté d'exclure toute philosophie comme toute théorie explicative, et de ne considérer comme histoire scientifique que les résultats des méthodes qui permettent d'établir les faits objectivement.

Pour eux, « l'analyse critique du document est tout le travail de l'historien, qui, selon la formule d'Halphen, doit s'effacer devant le témoignage» (R.

Mandrou, art.

«Histoire» de l'Encyclopaedia Universalis, 1968). S'interdire de philosopher serait la condition d'une pratique scientifique de l'histoire. • Mais les historiens montrent aujourd'hui qu'une telle histoire « qui se croit et se veut débarrassée de toute implication philosophique, se révèle, en réalité, fondée sur des partis pris et des postulats desséchants qui affectent gravement la nature et l'extension de son champ d'études» (J.

Ehrard et G.

Palmade, L'Histoire, A.

Colin, 1965, p. 78-79). • Parmi les présupposés philosophiques implicites qu'admet une telle histoire positiviste, on peut noter : - Une survalorisation des événements politiques.

« Comme les faits les plus faciles à établir sont alors les grands "événements", la traditionnelle histoire politique, avec ses divers visages, dynastique et guerrière, diplomatique, parlementaire, etc., retrouve tous ses droits» (ibid.); seraient ainsi négligés ou considérés comme inessentiels des faits culturels, économiques, psychologiques, dont l'importance pourrait passer inaperçue, parce que les documents sont moins nombreux ou moins directement accessibles que les Mémoires, Chroniques, etc., politiques. - Une théorie de la causalité historique en résulte : les faits politiques permettraient de rendre compte de toute la réalité historique. Par exemple, l'historien Seignobos, en 1924, conclut que la crise mondiale ouverte en 1914 oblige à «reconnaître à quel point les phénomènes superficiels de la vie politique dominent les phénomènes profonds de la vie économique, intellectuelle et sociale» (ibid.). - Sur le plan des événements politiques, l'explication positiviste mettrait en œuvre «une philosophie déterministe du changement, du devenir humain», puisque «la succession des faits en un récit chronologiquement ordonné (...) postule des relations simples de cause à conséquence » (R.

Mandrou, article cité). • Ainsi, l'historien positiviste qui voudrait n'exposer que le simple récit des faits, telle qu'une méthode objective les établit, ne dit pas simplement ce qui s'est passé : il exprime nécessairement, sans les critiquer, des thèses philosophiques, celles qui sont dominantes à son époque ou celles qui lui sont propres. 2) la philosophie nécessaire ? a) Comment choisir des faits significatifs ? • Si rigoureuse que soit sa méthode, si objective et parfaite que puisse être sa connaissance des faits, l'historien doit commencer par choisir, parmi tous les faits possibles, ceux qu'il considérera comme significatifs, par opposition à ceux qui seront insignifiants. • Un tel choix est nécessaire : il serait impossible de tout retenir, le passé est trop riche.

Refuser de choisir, c'est accepter et entériner d'autres choix, ceux que dicte l'époque historique dans laquelle s'inscrit l'historien et qui s'imposent à lui éventuellement à son insu, ou encore ces choix qui expliquent l'abondance et l' « évidence » de certains documents sur certains faits (par exemple les événements politiques) et l'absence, ou la rareté et l'obscurité d'autres données, portant sur d'autres faits, dont l'insignifiance peut être et a été discutée (par exemple les mentalités, les faits économiques, etc.). • Le choix des faits significatifs s'appuie sur des critères, explicites ou non, qu'aucune «méthode scientifique» ne peut donner, puisqu'elle les suppose. • Un exemple, proposé par P.

Valéry : «On peut raisonnablement penser que la découverte des propriétés du quinquina est plus importante que tel traité conclu vers la même époque [à savoir vers 1639] ; et, en effet, en 1932. »

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