L'État est-il l'ennemi de la liberté ?
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«
Remarque
Le problème majeur posé par cette formulation tient dans le caractère très général de l'emploi des termes Etat et
liberté.
Pas plus qu'il n'est possible de définir l'Etat de façon unique, il n'est envisageable de réduire la liberté à une
seule conception.
Introduction
Les discours idéologiques sur l'Etat sont souvent aujourd'hui critiques, alors que les institutions étatiques se
multiplient et interviennent dans des domaines de plus en plus nombreux.
« Le plus froid des monstres froids » pour
certains (selon la formule de Nietzsche), mal nécessaire pour d'autres, l'Etat est tenu en suspicion.
Est-il l'ennemi de
la liberté ?
1 - L'Etat comme menace et garantie
a) La peur du Léviathan
L'analyse classique conçoit l'Etat simultanément comme une nécessité et une menace.
Depuis Hobbes, la nécessité
de l'Etat pour maintenir la cohésion du groupe social, pour « empêcher la guerre de chacun contre tous », est
réaffirmée.
Même Locke ou Rousseau, qui ne sont pas absolutistes, définissent l'Etat comme une nécessité, soit
pour garantir la liberté et la sécurité de chacun (Locke), soit pour permettre une organisation telle que chacun soit
libre, tout en étant protégé par la force du corps social (Rousseau).
Mais, si la nécessité est affirmée, le danger de
despotisme n'est pas moins perçu comme premier.
En un sens, toute la théorie du Contrat social de Rousseau est
une réflexion sur les moyens de le conjurer.
Toute la pensée classique est à la recherche d'un équilibre entre la
liberté individuelle et l'Etat.
b) L'Etat de droit
Plus généralement, l'Etat de droit, dont la conception se précise aux XVIIe et XVIIIe siècles, tente de concilier
l'exigence de liberté individuelle et la nécessité de lui donner des cadres qui la garantissent.
L'Etat est conçu comme
l'émanation de la volonté de chacun lorsqu'elle a pour but l'intérêt général.
Il est également pensé comme le
défenseur des droits innés de l'individu, qu'il ne peut aliéner.
Il s'opère donc une conciliation qui vise à conjurer la
puissance étatique en la mettant au service de l'individu.
Ceci est obtenu par un double mécanisme
qui, d'une part ne fait pas dépendre la liberté de l'Etat, à l'origine, et qui, d'autre part, rend l'Etat garant de cette
liberté (formulée en termes de droits : déclaration de 1789).
c) Les ambiguïtés de l'Etat de droit
Dans les perspectives sommairement évoquées ci-dessus, l'Etat, loin d'être conçu comme un ennemi de la liberté,
est au contraire l'institution qui rend possible son exercice.
Néanmoins cette conception n'est pas dépourvue
d'ambiguïtés, dont on peut citer quelques exemples :
• Pratiquement, l'Etat acquiert une autonomie et une indépendance qui peuvent devenir dangereuses et conduire à
la mort du corps politique (cf : le chapitre intitulé ainsi le Contrat social).
• En cas de litige, qui départagera le citoyen et la puissance étatique ? Locke, comme Rousseau, envisagent le
problème, sans donner de solutions satisfaisantes, du moins qui garantissent la liberté individuelle.
C'est tout le
problème historique du droit à l'insurrection.
• Plus profondément, est-il légitime, comme le postulent les philosophes politiques du XVIIIe de croire que les droits
de l'individu préexistent à l'organisation sociale ? La genèse historique de l'Etat s'accommode assez mal de cette
conception.
Garant de la liberté, l'Etat peut en devenir l'ennemi s'il s'arroge des prérogatives qui dépassent le cadre habituel qui
lui est attribué.
Mais, en outre, une telle conception n'est pas toujours susceptible d'expliquer les formes réelles de
l'Etat.
2 - L'Etat producteur de liberté.
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