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L'Etat est-il l'ami de tous en même temps que l'ennemi de chacun ?

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« VOCABULAIRE: AMI / AMITIÉ: Lien d'attachement et de sympathie entre deux ou plusieurs personnes, qui ne repose ni sur l'attrait sexuel ni sur la parenté. ÉTAT: 1) Avec une minuscule, manière d'être, disposition (un état d'esprit). 2) Avec une majuscule, un ensemble d'individus soumis à une même autorité politique, ou plus précisément cette autorité politique elle-même.

L'État c'est le gouvernement et l'ensemble des structures par lesquelles il manifeste son autorité. 3) État de droit: tout État qui s'applique à respecter la personne et à garantir les libertés individuelles. 4) Raison d'État: motif d'intérêt public invoqué par l'État pour justifier une action contraire à la loi ou à la morale. TEMPS: Milieu indéfini et homogène, analogue à l'espace, dans lequel se déroulent les événements. Temps objectif: Mouvement continu et irréversible (« flèche du temps ») par lequel le présent rejoint le passé. Temps subjectif: Sentiment intérieur de la temporalité, telle qu'elle est vécue par le sujet (synonyme : durée). [Introduction] Dans les conversations courantes, on parle souvent de l'État comme d'un mal nécessaire.

D'un côté, il imposerait des entraves aux individus à travers le système judiciaire et menacerait les libertés à cause des dérives des gouvernants; de l'autre, il serait incontournable pour garantir la sécurité et la propriété privée, assurer le bon état des infrastructures, etc.

Garant d'un certain nombre d'intérêts qui nous concernent tous, il menacerait ou risquerait de nuire régulièrement à nos intérêts privés.

À partir de là, faut-il aller jusqu'à dire que l'État est l'ami de tous en même temps que l'ennemi de chacun? Le problème d'une telle formulation est qu'elle personnifie le concept d'État en même temps qu'elle décrit les relations politiques avec des termes affectifs et utilisés généralement dans la sphère privée.

En nous laissant entraîner dans cette voie, ne risquons-nous pas de mal comprendre le lien entre État et individu, ainsi qu'entre État et citoyen? Ceux-ci ne doivent-ils pas être envisagés d'une tout autre manière et laquelle? Dans un premier temps, nous verrons quels sont les risques impliqués par une approche « sentimentale » du lien politique.

Il s'agira alors de se demander sur quelles bases fonder un tel lien, s'il ne peut s'inspirer de ce qui a lieu dans la famille, par exemple.

Ce lien est-il entièrement objectif? Ou bien comporte-t-il encore des éléments de subjectivité qui maintiendraient une certaine pertinence de la connotation évoquée par les mots « ami » et « ennemi »? Dans ce cas, ne faut-il pas éclairer les limites du pouvoir d'État et ses risques de dérive, tout en soulignant aussi ses intérêts? [I.

Fonder les liens politiques sur des sentiments?] La formulation du sujet nous place d'emblée face à un problème de registre, en utilisant les termes « ami » et « ennemi ».

Ils sont en effet utilisés généralement dans le domaine de la vie privée et marquent un attachement ou une aversion associés à des sentiments (amitié/haine) d'ordre affectif et subjectif.

D'ailleurs, l'étymologie peut nous éclairer sur ce point car le mot « ennemi » est tiré du latin inimicus qui signifiait ennemi privé ou ennemi intime (quelqu'un qui nous veut du mal personnellement) par différence avec hostis qui désignait l'ennemi à la guerre, le peuple ou l'Empire voisins dont l'hostilité était politique et militaire (donc publique ou collective et non privée). Néanmoins, nous allons voir que cette dimension n'est pas absente de l'esprit des hommes vivant dans un État. [1.

Attachement affectif et servitude] D'abord, les membres d'un État entretiennent des liens d'attachement avec lui.

L'État est en effet aussi la « patrie » (de patria, « pays du père » [pater]), c'est-à-dire un symbole d'appartenance à un territoire, à une culture, à une langue, à des traditions.

En un sens, ce sentiment présente des aspects positifs puisqu'il permet de se repérer, de se reconnaître dans une communauté, d'avoir un ancrage quelque part.

Par opposition, on dit des exilés qu'ils sont « apatrides », ce qui signifie aussi qu'ils n'ont pas d'État qui les reconnaisse et dans lequel ils se reconnaissent. Cependant, ce type de lien présente également de gros risques d'enfermement et d'exclusion.

On passe assez facilement de l'estime pour sa patrie au chauvinisme, défense exclusive des qualités de son propre pays par rapport à celui des autres.

De plus, les gouvernants utilisent très souvent le patriotisme pour manipuler leur peuple: c'était particulièrement le cas lors de la Première Guerre mondiale entre la France et l'Allemagne, comme ça l'a été plus récemment entre les États-Unis et l'Irak.

Il faut dire que le sentiment produit un attachement aveugle, non réfléchi et non distancié.

Dès lors, il peut servir à tout et en particulier à réduire les hommes à la servitude.

D'autant qu'ils semblent naturellement y être enclins, comme le remarquait La Boétie dans le Discours sur la servitude volontaire.

Il est en effet frappant de voir combien les hommes se laissent facilement gouverner et entraîner par un État, jusque et y compris vers la guerre et la mort.

« Chose vraiment surprenante (et pourtant si commune, qu'il faut plutôt en gémir que s'en étonner!), c'est de voir des millions d'hommes misérablement asservis et soumis tête baissée à un joug déplorable, non qu'ils y soient contraints par une force majeure, mais parce qu'ils sont fascinés et, pour ainsi dire, ensorcelés.

» Néanmoins, il n'y a là aucune magie.

Et c'est pourquoi il ne faut pas personnaliser l'État comme s'il était un être supérieur aux forces obscures et maléfiques.

Le mal est à rechercher dans les hommes eux-mêmes. Dans leur désir d'appartenance et de reconnaissance, ils attachent à l'État qui les gouverne des sentiments qui les aveuglent et les amènent volontairement, quoique souvent inconsciemment, à se soumettre aux décisions des dirigeants.. »

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