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Les idées et les sentiments s'échangent-ils ?

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« Introduction : Que ce soit lors d'un débat, d'une discussion, ou d'un cours ; en lisant un livre, en regardant la télévision ou en admirant une œuvre d'art, nous avons parfois l'impression qu'à travers la communication interhumaine nous échangeons des idées et des sentiments.

Échanger, c'est donner en contrepartie d'autre chose, c'est faire passer quelque chose à autrui sans le lui imposer, car il accepte librement le don en en rendant un autre (le « contre don »).

C'est parce qu'il y a réciprocité qu'il y a échange.

Cependant, les idées et les sentiments ne sont pas des bien matériels qui se monnaient comme les objets.

Les idées et les sentiments s'échangent-ils ? C'est la circulation des idées et des sentiments qu'il s'agit d'étudier à travers cette interrogation.

Les idées et les sentiments peuvent-ils circuler d'un individu à un autre, où sont-il au contraire inaliénables à la personnalité qui les pense et les éprouve ? 1ère partie : Les idées et les sentiments se partagent (se communiquent). - Les idées et les sentiments, qui, parmi les êtres vivants, sont propres aux hommes, entrent dans les échanges humains.

En effet, c'est par l'expression que les hommes entrent en relation, en partageant leurs points de vue, en se liant d'amitié, ou en contractant toute autre sorte de sentiments entre eux, tels que l'orgueil, la compassion, l'amour, la haine, la jalousie, la colère, l'admiration, la bienveillance, etc. Rousseau explique au livre IV de l'Emile que c'est lorsque les hommes entrent en relation, et se mettent à vivre en société que leurs sentiments se développent.

Les sentiments sont donc produits par les échanges humains, et plus les hommes se lient, plus leurs passions grandissent, les relations et les passions s'alimentant mutuellement.

Ainsi, les sentiments lient les hommes entre eux, et les relations engendrent à leur tour de nouvelles passions. Néanmoins, les sentiments, s'ils participent aux échanges, ne s'échangent pas eux-même mais se partagent.

En effet, les idées comme les sentiments se communiquent sans faire l'objet d'un don.

Les idées et les sentiments sont immatériels et sont reçus dans l'esprit humain sans que celui qui les exprime n'en soit dépossédé pour autant.

Ainsi la parole permet d'échanger des idées tout en laissant vivre la pensée.

Les idées et les sentiments ne sont pas figés, ils évoluent au travers de leur circulation.

C'est dans l'échange de la discussion que les idées se forment, au contact les unes des autres, de même que c'est dans la vie en société que les sentiments se développent. Socrate a montré les vertus du dialogue, qui permet la confrontation des idées, et l'avancée de la spéculation philosophique vers la vérité. Pour Socrate, la parole, contrairement à l'écrit, n'est pas figée, elle est imputable à un individu, qui se doit de la défendre.

La parole est donc par essence destinée à l'échange d'idées, puisqu'elle est lancée en direction d'autrui, et attend d'autrui une réaction.

Ainsi dans le dialogue socratique, l'ensemble des participants doit acquiescer à une idée avant que l'on passe à une autre, et c'est en résolvant les questions pas à pas, dans une recherche commune, que l'on avance vers la vérité. 2ème partie : Mais les idées et les sentiments se partagent différemment. Une idée ne se transmet pas comme un sentiment.

En effet, une idée, qui est une production de la pensée, peut être communiquée à autrui au moyen de la parole qui est l'expression de la pensée raisonnante de l'homme.

On argumente pour convaincre quelqu'un du bien-fondé de son idée, ou on fait appel à ses sentiments au moyen de techniques rhétoriques pour l'en persuader.

Mais si l'on peut agir sur la pensée d'autrui, en la formant au moyen de la réflexion, il est difficile de déterminer les sentiments qui ne sont pas des constructions théoriques de la pensée, mais plutôt des intuitions, des émotions, ressenties indépendamment de toute rationalité.

Ainsi, si les idées peuvent passer d'une personne à l'autre par la communication, un sentiment exprimé par une personne n'est pas éprouvé par la personne à qui il est exprimé.

Par exemple, un amoureux ne rendra pas son aimée amoureuse de lui en lui exprimant son amour, il ne fera que l'en informer. Un sentiment peut être commun à deux personnes (par exemple, deux personnes peuvent aimer la même chose), mais une personne ne peut pas transférer son sentiment à autrui.

En outre, le sentiment est toujours intimement personnel, et singulier à l'individu qui l'éprouve.

La colère peut être ressentie par diverses personnes, mais elle sera différente pour chacune d'entre elles, de même que l'amour est vécu de façon singulière pour chacun, même au sein d'un même couple. Seules les idées s'échangent en tant qu'elles peuvent être transmises par la communication, tandis que les sentiments ne circulent pas d'une personne à l'autre 3ème partie : Les idées et les sentiments ne s'échangent pas. Les idées comme les sentiments ne peuvent faire l'objet d'un commerce, et entrer ainsi dans un échange entre deux partis.

En effet, même si l'on peut convaincre autrui de son idée, ou influencer ses sentiments, on ne se dépossède pas de son idée ou de son sentiment, on le partage seulement.

Les idées et les sentiments s'expriment, mais ne sont pas donnés comme des objets.

Il est plus correct de dire que les idées et les sentiments se répandent, se propagent entre les individus, de manière gratuite.

Un sentiment ou une idée ne se monnaie pas, car il n'a pas de valeur indépendamment de la personne qui l'éprouve.

On ne peut vouloir posséder un sentiment ou une idée avant de l'avoir, car on ne le connaît pas tant que l'on ne le vit pas intérieurement, c'est-à-dire que l'idée ou le sentiment fait partie de notre intime personnalité. Les idées et les sentiments font partie de ce que Dilthey appelle « l'expérience vécue », c'est-à-dire de la profondeur intime de l'être de individu.

Cette expérience vécue peut être découverte par autrui, par l'historien par exemple, qui peut révéler l'esprit d'une époque au moyen d'un travail de comparaison.

C'est parce que les hommes ont en commun l'expérience de la vie, que les sentiments et les idées peuvent avoir une dimension universelle, c'est-à-dire être compris par tous, et donc échangés.

Mais s'il y a un « caractère commun » qui peut être échangé, Dilthey affirme toutefois qu'il reste une part de subjectivité, liée à l'expérience vécue propre à chaque personne, qui empêche que l'idée ou le sentiment soit absolument inaltéré dans l'échange.

Au contraire, c'est dans la communication des idées et des sentiments que ceux-ci évoluent, et se transforment, car le point de vue change. Conclusion : L'échange d'idées et de sentiments est une métaphore, car si les idées se transmettent, on ne se dépossède pas de l'idée que l'on donne, mais on la partage seulement (en la conservant pour nous-même).

Les idées et les sentiments circulent entres les hommes car ils peuvent être communiqués, mais ils ne sont pas aliénables à l'individu qui les pense et les éprouve.

Donner une idée ou un sentiment, c'est donner de soi sans rien retirer de soi néanmoins.

On ne perd pas l'idée que l'on transmet, mais au contraire, on la répand, car nos idées et nos sentiments ont pour nous plus de valeur que ceux d'autrui, et il est insensé de vouloir l'idée ou le sentiment d'autrui à la place des nôtres, puisque se serait comme vouloir ne plus être soi.. »

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