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Les hommes peuvent ils être à la fois libres, égaux et différents ?

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Si Rousseau concède que dans l?état de nature, état hypothétique et fictif, construction méthodologique permettant à l?auteur d?appuyer sa réflexion, les hommes sont déjà inégaux physiquement, il ne croit pas que cette inégalité soit importante au point d?aboutir aux inégalités sociales que nous pouvons constater. Rousseau n?est pas Calliclès qui, dans le Gorgias, défend l?idée d?un droit du plus fort, les plus forts selon la nature devant à ses yeux occuper les places de maîtres dans la société.             C?est selon Rousseau, la naissance de la propriété qui est l?origine réelle de l?inégalité actuelle. La décision politique de l?attribution de terres à quelques hommes fait que le travail d?autres hommes sur des terres ne leur appartenant pas, profitera essentiellement aux propriétaires ; les travailleurs ne possédant pas de terre étant condamnés en somme à travailler pour autrui. La naissance de la propriété est justifiée par ailleurs comme réponse au problème de la revendication de quelques hommes, ceux-ci réclamant que leur revienne la terre sur laquelle ils se sont échinés.             C?est donc le partage inégal des terres qui serait à l?origine de la rupture chronologique correspondant à une dégradation générale du lien entre chaque homme. D?égaux ils sont devenus radicalement différents, ce qu?ils n?étaient auparavant que physiquement, ils le sont désormais socialement, politiquement, intellectuellement (du fait qu?ils ne bénéficient pas de la même éducation).   III-Un problème politique.               Les hommes peuvent enfin logiquement être dits libres et différents, on peut comprendre que, au sens fort c?est leur liberté qui leur permet de se distinguer les uns des autres et d?affirmer leurs singularités. Mais en réalité, comme nous l?avions déjà relevé, le concept de liberté est assez flou dans un tel contexte.

« Un article célèbre de la déclaration universelle des droits de l'homme stipule que les hommes naissent libres et égaux en droit.

Une telle proposition exprime davantage une pensée politique qu'un fait réel, l'optimisme qui s'en dégage a souvent été pris pour de la naïveté y compris par des philosophes.

Nous nous demanderons si, au-delà de leur naissance, les hommes peuvent effectivement être libre, égaux mais également différents.

L'intégration de ce dernier critère répond à une volonté de confronter ce qui apparaît comme le plus évident, à savoir les différences qui séparent les hommes, avec ce qui n'apparaît pas nécessairement réel, mais davantage relever d'un idéal, en l'occurrence la liberté et l'égalité des hommes entre eux. I-Le problème de l'égalité. On le voit c'est en premier lieu le concept d'égalité qui pose problème.

En effet, comment concilier égalité et liberté ou égalité avec différence ? Si l'on se situe sur un seul plan, celui de la description des faits, il paraît difficile de soutenir que les hommes sont à la fois égaux et libres mais plus encore qu'ils sont égaux et différents.

Si les hommes sont libres mais sont également égaux cela revient, nous semble t-il, à dire que l'homme est incapable d'affirmer sa singularité, de se distinguer d'autrui, par l'usage qu'il fait de sa liberté. L'efficacité de sa liberté est donc réduite à rien, affirmer que tout homme est libre c'est probablement faire acte de foi en l'humanité mais c'est en même temps affaiblir le concept de liberté et le réduire à une espèce de qualité abstraite. Il paraît enfin tout à fait contradictoire d'affirmer que sur le plan factuel les hommes soient à la fois égaux et différents.

Ce paradoxe nous oblige en fait à distinguer deux plans : l'un idéal, celui où tous sont égaux, et l'autre réel où ils sont tous différents.

Il faut donc distinguer ici le droit et le fait, c'est ce que Rousseau fait à sa manière dans le Contrat social en écrivant « l'homme est né libre, mais partout il est dans les fers ».

Evidemment, une fois cette distinction opérée on peut s'interroger sur l'intérêt d'énoncer, en une seule proposition, à la fois un idéal et la réalité qui l'annule. L'intérêt est probablement de nous conduire à la question, traitée là aussi à sa façon par Rousseau, dans le second discours, de la formation de ce hiatus entre un état originel, celui où les hommes sont égaux, et un état de fait, où ils sont différents, sous entendu inégaux.

C'est une variante du mythe de l'âge d'or et de la chute que nous retrouvons ici.

Deux solutions sont donc possibles pour affirmer que les hommes sont à la fois égaux et différents, soit on distingue le droit du fait, mais cela ne semble pas réellement satisfaisant, soit on opère une distinction chronologique, et c'est la solution suivie par Rousseau. II-Une évolution historique. Dans Le discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, Rousseau s'attache à comprendre comment les hommes, a priori égaux, en sont arrivés à un point où l'inégalité de rang les condamnent à des vies et des labeurs inégaux, profitables pour certains et donc injustes pour d'autres.

Si Rousseau concède que dans l'état de nature, état hypothétique et fictif, construction méthodologique permettant à l'auteur d'appuyer sa réflexion, les hommes sont déjà inégaux physiquement, il ne croit pas que cette inégalité soit importante au point d'aboutir aux inégalités sociales que nous pouvons constater.

Rousseau n'est pas Calliclès qui, dans le Gorgias, défend l'idée d'un droit du plus fort, les plus forts selon la nature devant à ses yeux occuper les places de maîtres dans la société. C'est selon Rousseau, la naissance de la propriété qui est l'origine réelle de l'inégalité actuelle.

La décision politique de l'attribution de terres à quelques hommes fait que le travail d'autres hommes sur des terres ne leur appartenant pas, profitera essentiellement aux propriétaires ; les travailleurs ne possédant pas de terre étant condamnés en somme à travailler pour autrui.

La naissance de la propriété est justifiée par ailleurs comme réponse au problème de la revendication de quelques hommes, ceux-ci réclamant que leur revienne la terre sur laquelle ils se sont échinés. C'est donc le partage inégal des terres qui serait à l'origine de la rupture chronologique correspondant à une dégradation générale du lien entre chaque homme.

D'égaux ils sont devenus radicalement différents, ce qu'ils n'étaient auparavant que physiquement, ils le sont désormais socialement, politiquement, intellectuellement (du fait qu'ils ne bénéficient pas de la même éducation). III-Un problème politique. Les hommes peuvent enfin logiquement être dits libres et différents, on peut comprendre que, au sens fort c'est leur liberté qui leur permet de se distinguer les uns des autres et d'affirmer leurs singularités.

Mais en réalité, comme nous l'avions déjà relevé, le concept de liberté est assez flou dans un tel contexte.

Il semble sous-entendu qu'il s'agisse d'une liberté de droit, une liberté politique, celle de ne pas être exploité ni asservi au bon vouloir d'autres hommes mais en aucun cas de la liberté nouménale kantienne qui correspond à notre pouvoir d'auto-détermination dans l'action ou à une quelconque variante métaphysique de la liberté. Nous voudrions pointer en dernière analyse la faiblesse de ce type de profession de foi qui consiste à vouloir définir l'homme en général.

Il ne faut peut être pas tant essayer de concilier, par un esprit de synthèse artificiel, toutes les qualités possibles et imaginables, que d'apporter des réponses concrètes et précises à des situations réelles où le sort de quelques hommes est engagé. Autrement dit l'action politique à probablement plus d'intérêt qu'une réflexion philosophico-politique sur l'homme en général.

C'est ce que relève Deleuze dans L'Abécédaire, œuvre filmographique, lorsqu'il remarque que les droits de l'homme n'ont jamais contraint personne et que seule l'élaboration de jurisprudences internationales pourrait décider quelques Etats à secourir au plus vite des communautés d'hommes menacées par d'autres. On peut toujours répondre à la question en disant que les hommes sont libres en idéal, égaux en droit et à la naissance, ou dans l'état fictif de nature, et différents en fait.

Il apparaît que les trois qualités sont de toute façon inconciliables dans un temps simultané et un même plan factuel.

Il y a donc un conflit entre ces trois qualités, conflit essentiellement politique et auquel, comme Auguste Comte le remarquait déjà, il n'est pas sûr que des généralités du type de la déclaration universelle des droits de l'homme, nous offre réellement les moyens d'y répondre. Conclusion : Vouloir maintenir que les hommes sont à la fois libres, égaux et différents c'est se condamner à un effort systématique et peut-être vain.

La philosophie ne peut ici servir la pensée politique qu'à cette condition d'être modeste et de concéder qu'il y a là des difficultés réelles plutôt que de tenter de les résoudre abstraitement.

La polémique philosophique doit ici déboucher sur la formulation de problématiques politiques précises.. »

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