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Le savant et l'artiste ?

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« Termes du sujet: SAVOIR / SAVANT: * Savoir: a) Comme nom, ensemble de connaissances acquises par l'apprentissage ou l'expérience.

b) Comme verbe, avoir appris quelque chose, et pouvoir le dire, le connaître, le répéter. * Savoir-faire: ensemble de procédés de gestes habituels permettant la réalisation régulière de certains buts. * Savant: a) Celui qui possède un maximum de connaissances.

b) Celui qui exerce une activité scientifique (un physicien, un biologiste). Il est intéressant de situer l'activité scientifique non seulement par rapport à la technique, mais aussi par rapport à l'art, en entendant par ce terme ambigu la discipline de l'artiste, non plus celle de l'artisan.

L'artisan est à la fois, d'ailleurs, le père du savant et celui de l'artiste.

Nous avons vu que la technique est l'origine de la science.

Encore au XVIIe siècle les deux fonctions étaient souvent mal distinguées.

Colbert réclama Huyghens en France, non pour faire des cours de physique, mais pour aménager des cascades pittoresques l Marly; (en cet exemple typique les trois fonctions de la technique, de la science et de la production artistique se trouvent réunies.) Au Moyen Age l'artiste et l'artisan sont confondus (les artistes-peintres sont rangés avec les marchands de couleur dans la corporation des épiciers-droguistes).

Ce n'est qu'à partir de la deuxième moitié du XVlle siècle que les beaux-arts se distinguent Les peintres et les sculpteurs du roi ne veulent plus être confondus avec des barbouilleurs, des marbriers et des polisseurs de marbre en une mécanique société ».

Les beaux-arts suivront alors en France le destin de la Cour.

Les beaux-arts cependant, un peu des techniques au sens étroit d'activité « opératoire » : le savant demeurent reconstruit le réel, l'artiste crée une oeuvre.

Toutefois les créations du pur savant et du pur artiste n'ont rien de directement utilitaire (même si elles sont exploitées par la suite à des fins pratiques).

Par là, science et art se rapprochent et se distinguent des activités communes. a) Rapprochements possibles entre la science et l'art. On a souvent souligné le désintéressement commun à l'art et à la science et à juste titre, car c'est par là que ces deux activités sont typiquement humaines.

L'animal ne connaît que des obstacles pratiques et ignore les problèmes théoriques.

De même l'animal se soucie non du beau mais de l'utile.

Anatole France nous dit que « le petit chien de M.

Bergeret ne regardait jamais le bleu du ciel incomestible ». C'est par l'homme seulement — comme le souligne justement M.

Pradines — que l'objet peut être dépouillé de ses caractéristiques utilitaires.

« L'optique a évidemment pour objet la lumière indépendamment de ce qu'elle éclaire et l'acoustique le son indépendamment de ce qu'il annonce.

» De même pour l'artiste les qualités sensibles cessent de « représenter » quelque objet utile ou dangereux pour l'action ; elles « se présentent » tout simplement.

Lorsque je contemple le célèbre tableau de Van Gogh : les Oliviers de Saint-Rémy, mon attitude n'est pas celle que j'aurais devant un véritable champ d'oliviers.

Les vrais oliviers m'inviteraient à la cueillette ou peut-être à la sieste sous leurs ombrages.

Le champ d'oliviers réel serait devant moi, simple moyen pour mes désirs.

C'est moi tout au contraire qui suis devant les oliviers de Van Gogh. Tous deux désintéressés, l'art et la science ne cherchent-ils pas l'un et l'autre à nous révéler un monde caché sous les apparences? La science cherche la structure intelligible au-delà de l'apparence sensible.

L'art semble s'intéresser aux apparences fugitives, mais c'est pour en fixer ce qui mérite d'être éternisé, c'est pour en révéler les harmonies secrètes dissimulées à un regard profane.

Une théorie scientifique qui condense en quelques équations des phénomènes apparemment très divers, qui ramène « à l'invisible simple le visible compliqué », est par là même une oeuvre d'art.

Poincaré proscrivant de l'activité scientifique toute préoccupation utilitaire assure que le savant « digne de ce nom » travaille « pour ressentir une émotion esthétique et la communiquer à ceux qui sont capables de l'éprouver ».

Réciproquement, la musique, l'architecture, sont une mathématique. On pourrait invoquer le rôle de l'imagination créatrice sans laquelle il n'y aurait ni science ni art.

Le savant comme l'artiste fait preuve d'intuition créatrice.

La création d'une oeuvre d'art de valeur exige autre chose que l'application de recettes.

De même une découverte scientifique n'est pas le produit automatique d'une mécanique déductive.

Il y a des recettes pour «prouver», il n'en est pas pour « trouver ».

Le savant qui trouve, qui propose une hypothèse féconde, ne fait-il pas surgir, en quelque sorte, une oeuvre d'art? L'artiste et le savant ne copient pas le monde, ils le recréent.

Einstein, comme Balzac, fait surgir un univers.

On a dit : « Le génie scientifique est le don d'inventer le monde tel qu'il est.

» Mais de telles analogies ne doivent évidemment pas nous faire méconnaître les différences fondamentales de visée entre l'art et la science. b) Opposition entre l'art et la science. Les valeurs esthétiques demeurent intérieures aux qualités sensibles.

Mais la science récuse le sensible et ne connaît que la « quantité ».

Connaître, lit Brunschvicg, « c'est mesurer ». L'art est concret, la science abstraite.

Par là la vision de l'artiste demeure subjective tandis que la science atteint l'objectivité.

C'est l'opposition de l'illusion à la vérité mais aussi l'opposition des richesses subjectives à l'impersonnalité froide.

«L'art, mes enfants, c'est être absolument soi-même », dira Verlaine et Claude Bernard avait déjà noté : « L'art c'est moi, la science c'est nous.

» Alors que le savant essaie de dépouiller sa connaissance de toute subjectivité pour ne s'occuper que des rapports que les objets ont entre eux, l'artiste voit la nature « non pas comme elle est mais comme il est ».

L'artiste refuse cette « psychanalyse » de la perception que le savant exige.

Ne vit-il pas de ces rêves, de ces désirs, de ces. »

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