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Le problème du libre arbitre

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« La définition cartésienne du libre arbitre Ce texte, véritable définition de la liberté selon Descartes, est resté célèbre : partant, dans la première phrase, de la définition de la liberté dite «d'indifférence », Descartes corrige (« ou plutôt ») et définit la liberté par l'absence de toute contrainte reconnue par le sujet.

De la définition négative de la liberté, Descartes passe ensuite à une définition positive : la définition de la liberté qui suit cette première phrase est celle de la liberté dite « éclairée », liberté d'autant plus grande que la connaissance des raisons qui nie poussent à embrasser un choix sont claires.

La liberté d'indifférence ou libre arbitre, pouvoir absolu de choisir, « le plus bas degré de la liberté », cède la place à la liberté suprême de celui qui saurait toujours toutes les raisons d'agir de telle ou telle façon. "[La volonté] consiste seulement en ce que nous pouvons faire une chose, ou ne la faire pas (c'est-à-dire affirmer ou nier, poursuivre ou fuir), ou plutôt seulement en ce que, pour affirmer ou nier, poursuivre ou fuir les choses que l'entendement nous propose, nous agissons en telle sorte que nous ne sentons point qu'aucune force extérieure nous y contraigne.

Car, afin que je sois libre, il n'est pas nécessaire que je sois indifférent à choisir l'un ou l'autre des deux contraires ; mais plutôt, d'autant plus que je penche vers l'un, soit que je connaisse évidemment que le bien et le vrai s'y rencontrent, soit que Dieu dispose ainsi l'intérieur de ma pensée, d'autant plus librement j'en fais choix et je l'embrasse.

Et certes la grâce divine et la connaissance naturelle, bien loin de diminuer ma liberté, l'augmentent plutôt, et la fortifient.

De façon que cette indifférence que je sens, lorsque je ne suis point emporté vers un côté plutôt que vers un autre parle poids d'aucune raison, est le plus bas degré de la liberté, et fait plutôt paraître un défaut dans la connaissance, qu'une perfection dans la volonté ; car si je connaissais toujours clairement ce qui est vrai et ce qui est bon, je ne serais jamais en peine de délibérer quel jugement et quel choix je devrais faire ; et ainsi je serais entièrement libre, sans être jamais indifférent." R.

DESCARTES, Méditations métaphysiques, « Quatrième méditation », Garnier-Flammarion, 1979, p.

139 La négation du libre arbitre chez Spinoza La marque négative de la liberté que Descartes reconnaît comme sa preuve – « agir en telle sorte que nous ne sentons point qu'aucune force extérieure nous y contraigne » – est reléguée dans le texte suivant au rang d'une illusion.

Nous croyons que nous sommes libres – notez la répétition du verbe « croire » dans ce texte –, parce que nous ignorons les causes de nos actions, qui nous semblent par conséquent ne pas en avoir.

Nous sommes en réalité le jouet des pulsions de notre corps, lui-même déterminé par les corps qui nous entourent ; le « libre décret de l'Âme » est en réalité mécanique des passions.

A la liberté éclairée de Descartes, déterminée par la connaissance des raisons de l'action, correspond l'illusion de liberté de Spinoza, déterminée par l'ignorance des causes véritables de l'action.

Les deux dernières phrases du texte sont une véritable critique de la liberté d'indifférence. "Un petit enfant croit librement appéter le lait, un jeune garçon en colère vouloir la vengeance, un peureux la fuite.

Un homme en état d'ébriété aussi croit dire par un libre décret de l'Âme ce que, sorti de cet état, il voudrait avoir tu ; de même le délirant, la bavarde, l'enfant et un très grand nombre d'individus de même farine croient parler par un libre décret de l'Âme, alors cependant qu'ils ne peuvent contenir l'impulsion qu'ils ont à parler; l'expérience donc fait voir aussi clairement que la Raison que les hommes se croient libres pour cette seule cause qu'ils sont conscients de leurs actions, et ignorants des causes par où ils sont déterminés ; et, en outre, que les décrets de l Âme ne sont rien d'autre que les appétits eux-mêmes et varient en conséquence selon la disposition variable du C orps.

C hacun, en effet, gouverne tout suivant son affection, et ceux qui, de plus, sont dominés par des affections contraires, ne savent ce qu'ils veulent ; pour ceux qui sont sans affection, ils sont poussés d'un côté ou de l'autre par le plus léger motif." B.

SPINOZA, Éthique, III, prop.

II, scolie, trad.

C h.

Appuhn, Garnier-Fiammarion, 1965, p.

139 CITATIONS: « La principale perfection de l'homme est d'avoir un libre arbitre, et [...] c'est ce qui le rend digne de louange ou de blâme.

» Descartes, Principes de la philosophie, 1644. « Si à un instant la roue du monde s'arrêtait et qu'il y eût là une intelligence calculatrice omnisciente pour mettre à profit cette pause, elle pourrait continuer à calculer l'avenir de chaque être jusqu'aux temps les plus éloignés et marquer chaque trace où cette roue passera désormais.

» Nietzsche, Humain, trop humain, 1878. « Telle est cette liberté humaine que tous se vantent de posséder et qui consiste en cela seul que les hommes sont conscients de leurs désirs et ignorants des causes qui les déterminent.

» Spinoza, Lettre à Schuller, 1674. Pour Spinoza, l'illusion du libre arbitre vient du fait que les hommes sont tout à fait conscients de leurs actions, mais qu'ils ignorent les causes qui les déterminent. « C'est par l'effet de [la] volonté éternelle et primitive [de Dieu] que tous les animaux se meuvent selon leur libre arbitre, et que l'homme a le pouvoir de faire tout ce qu'il veut, ou tout ce qu'il préfère d'entre les actions dont il est capable.

» Maimonide, Le Guide des égarés, xiie s. Le libre arbitre désigne primitivement la faculté qu'aurait l'homme de pouvoir choisir (arbitrer) entre deux actions librement, c'est-à-dire indépendamment de toute contrainte externe, sans autre cause que le vouloir lui-même. « On dirait que [la plupart de ceux qui ont parlé des sentiments et des conduites humaines] conçoivent l'homme dans la Nature comme un empire dans un empire.

» Spinoza, Éthique, 1677 (posth.) Autrement dit, ils croient à tort que l'homme est à l'origine de ses sentiments et de ses conduites et qu'il a sur ses propres actions «une puissance absolue ». « Aucun physicien ou physiologue qui étudierait minutieusement le corps de Mozart, et tout particulièrement son cerveau, ne serait capable de prédire sa Symphonie en sol mineur d'une manière détaillée.

» Popper, L'Univers irrésolu, 1982. Rien, ni dans le cerveau de Mozart ni dans son passé proche ou lointain, ne le prédisposait à composer cette symphonie plutôt que telle autre.

Ainsi, l'oeuvre d'art, dans la mesure où elle ne se laisse épuiser par aucune explication de type déterministe, témoigne au plus haut point du libre arbitre de l'homme.. »

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