Le pouvoir de l'Etat est-il fondé sur une illusion ?
Extrait du document
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Définition des termes du sujet
L'État est l'ensemble des institutions qui organisent une communauté politique donnée.
Cela suppose que l'Etat
exerce un certain pouvoir sur ces institutions, ce pouvoir étant compris comme une force de domination et
éventuellement de contrainte, dans la mesure à la soumission à un État n'est pas une attitude spontanée.
Ce qui
est en question ici, c'est le fondement de ce pouvoir de l'État.
Fonder quelque chose, c'est à la fois lui donner une
cause, une raison d'être, et une base de fonctionnement.
Le soupçon est porté plus particulièrement sur la
possibilité d'un caractère illusoire de ce fondement.
Si l'on envisage la pluralité de sens possible de la notion de
fondement, la question est donc double : est-il illusoire de recourir à la notion d'un pouvoir de l'État pour organiser
la communauté humaine ? L'État crée-t-il une illusion pour asseoir son pouvoir ?
On entend par illusion une pensée fausse dont on ne se rend pas compte qu'elle est fausse.
Dans le cadre du sujet,
on pourrait aussi envisager une compréhension plus active de l'illusion comme étant une mystification organisée pour
occasionner des pensées qui, si elles sont fausses, permettent quand même d'atteindre certaines fins.
Il faudra donc résoudre deux problèmes, l'un concernant la validité pratique du concept de « pouvoir de l'Etat », sa
compatibilité avec le réel, l'autre adoptant un point de vue critique sur les pratiques politiques : l'idée même d'un
« pouvoir de l'Etat » est-elle une illusion ? L'Etat fonde-t-il son pouvoir par la mise en place d'une illusion collective,
qui s'assimile alors à une tromperie et à un mensonge, afin de soumettre ses sujets ?
Proposition de plan
I.
La valeur du concept de « pouvoir de l'État » : ce concept est-il une illusion ?
Cette première partie va évaluer le concept de pouvoir de l'Etat afin de déterminer s'il est ou non une illusion.
On
pourra se référer aux théoriciens du contrat social, et examiner les raisons qu'ils donnent de la nécessité d'établir un
tel contrat, et donc de justifier le fait qu'il faille organiser un pouvoir de certains hommes sur d'autres.
Cela
permettra de fonder philosophiquement le concept de pouvoir de l'Etat.
Rousseau, Du contrat social
Il n'y a qu'une seule loi qui par sa nature, exige un consentement unanime.
C'est le pacte social : car l'association
civile est l'acte du monde le plus volontaire ; tout homme étant né libre et maître de lui-même, nul ne peut, sous
quelques prétexte que ce puisse être, l'assujettir sans son aveu.
Décider que le fils d'un esclave naît esclave, c'est
décider qu'il ne naît pas homme.
Si donc, lors du pacte social, il s'y trouve des opposants, leur opposition n'invalide
pas le contrat, elle empêche seulement qu'ils n'y soient compris ; ce sont des étrangers parmi les Citoyens.
Quand
l'Etat est institué le consentement est dans la résidence ; habiter le territoire c'est se soumettre à la souveraineté.
Hors ce contrat primitif, la voix du plus grand nombre oblige toujours les autres ; c'est une suite du contrat même.
Mais on demande comment un homme peut être libre, et forcé de se conformer à des volontés qui ne sont pas les
siennes.
Comment les opposants sont-ils libres et soumis à des lois auxquelles ils n'ont pas consenti ? Je réponds
que la question est mal posée.
Le Citoyen consent à toutes les lois, même à celles qu'on passe malgré lui, et même
à celles qui le punissent quand il ose en violer quelqu'une.
La volonté constante de tous les membres de l'Etat est la
volonté générale ; c'est par elle qu'ils sont citoyens libres.
Quand on propose une loi dans l'assemblée du peuple, ce
qu'on leur demande n'est pas précisément s'ils approuvent la proposition ou s'ils la rejettent, mais si elle est
conforme ou non à la volonté générale qui est la leur ; chacun en donnant son suffrage dit son avis là-dessus, et du
calcul des voix se tire la déclaration de la volonté générale.
Quand donc l'avis contraire au mien l'emporte, cela ne
prouve autre chose sinon que je m'étais trompé, et que ce que j'estimais être la volonté générale ne l'était pas.
Si
mon avis particulier l'eût emporté, j'aurais fait autre chose que ce que j'avais voulu, c'est alors que je n'aurais pas
été libre.
Hobbes, Léviathan
Nous pouvons trouver dans la nature humaine trois causes principales de querelles : premièrement, la rivalité ;
deuxièmement, la méfiance ; troisièmement, la fierté.
La première de ces choses fait prendre l'offensive aux hommes en vue de leur profit.
La seconde, en vue de leur
sécurité.
La troisième en vue de leur réputation.
Dans le premier cas, ils usent de la violence pour se rendre maîtres
de la personne d'autres hommes, de leurs femmes, de leurs enfants, de leurs biens.
Dans le second cas, pour
défendre ces choses.
Dans le troisième cas, pour des bagatelles, par exemple pour un mot, un sourire, une opinion
qui diffère de la leur, ou quelque autre signe de mésestime, que celle-ci porte directement sur eux-mêmes, ou qu'elle
rejaillisse sur eux, étant adressée à leur parenté, à leurs amis, à leur nation, à leur profession, à leur nom.
Il apparaît clairement par là qu'aussi longtemps que les hommes vivent sans un pouvoir commun qui les tienne tous
en respect, ils sont dans cette condition qui se nomme guerre, et cette guerre est guerre de chacun contre chacun
Transition : il ne semble pas que le concept de « pouvoir de l'Etat », qui fonde l'existence de l'organisation politique
et des mécanismes de pouvoir existant dans cette organisation, soit en soi illusoire.
Il faut alors déplacer le
problème vers les modes d'application pratiques de ce concept, et s'intéresser donc aux mécanismes de
fonctionnement du pouvoir de l'Etat.
II.
L'Etat doit-il organiser une illusion collective afin d'asseoir son pouvoir ?.
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