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LE PANTHÉISME N'EST-IL QU'UN ATHÉISME DÉGUISÉ ?

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« Étymologiquement le « panthéisme » affirme que tout (pan) est dieu (theos) ou que Dieu est partout.

Bien entendu il ne faut pas confondre le panthéisme avec un fétichisme polythéiste qui verrait des dieux dans tous les objets, qui diviniserait des plantes, des animaux.

Les panthéistes sont au contraire persuadés de l'Unité fondamentale de l'Univers. Pour eux — et c'est en ce sens qu'ils divinisent la nature — Dieu ne se distingue pas du monde ; ce qui est est rejeté ici c'est l'idée de transcendance, c'est-à-dire de l'extériorité de Dieu par rapport à l'univers.

Dieu est immanent au monde, ou encore le monde est en Dieu non à l'extérieur de lui. Ainsi pour les stoïciens Dieu était l'âme du monde, la Raison immanente à toutes choses ; notre âme elle-même n'était qu'une parcelle du souffle divin.

Pour Plotin les êtres particuliers et concrets ne sont pas l'objet d'une création de Dieu — car Dieu n'est pas réellement transcendant au monde — mais sont plutôt une dégradation de l'Unité divine, le multiple procédant de l'Un par éparpillement dans le temps et dans l'espace.

Le devenir, le cours changeant des choses, est un dégradé de l'Éternel. Mais la doctrine panthéiste par excellence est celle de Spinoza.

Pour lui Dieu est «l'être absolument infini, c'est-à-dire une Substance consistant en une infinité d'attributs ».

De ces attributs nous ne connaissons que deux : l'Étendue et la Pensée dont toutes les choses particulières sont les modes. Ainsi l'homme n'est qu'un mode fini de la Substance infinie ; son âme n'est qu'un rayon de la Pensée infinie et son corps un tout petit fragment de l'Étendue infinie ; l'homme n'est « qu'une partie de la nature », c'est-à-dire littéralement, Dieu se confondant avec la nature (« Deus sive natura »), une partie de Dieu. Dieu c'est-àdire la nature. Deus sive natura. Par cette formule, Spinoza affirme l'idée d'une substance infinie.

Dieu s'identifie avec la nature et n'est donc pas un créateur ontologiquement séparé du monde.

Spinoza s'oppose à l'idée d'un Dieu anthropomorphe, agissant selon des fins.

On en a conclu (à tort) à l'athéisme de Spinoza.

En réalité, il est panthéiste. Toute philosophie de l'immanence incline au panthéisme.

L'idéalisme absolu des postkantiens pour lequel la matière n'est qu'image de nos esprits, eux-mêmes reflets de l'Esprit, ne manque pas d'y aboutir.

Pour Hegel tout ce qui est rationnel est réel, tout ce qui est réel est rationnel : Dieu ne saurait donc être un juge transcendant, extérieur et supérieur à l'Histoire.

Il est immanent à l'Histoire.

Il est cet Esprit absolu d'abord endormi dans la nature et qui se réalise progressivement dans l'Histoire pour ne se révéler qu'à la fin dans toute sa plénitude et son éclat. En fait les systèmes philosophiques les plus divers — pourvu qu'ils se réclament du principe d'immanence — pourront être qualifiés de panthésites.

Par exemple l'idéalisme de Brunschvicg refuse toute transcendance de Dieu ; Dieu est ici le foyer le plus intime de notre âme en tant qu'elle vise dans un acte de générosité désintéressée la vérité et la moralité.

Ainsi, quand on dit que Dieu est amour, il ne faut pas entendre par là que Dieu est une Personne mystérieuse qui nous aurait créé et nous aimerait, mais simplement que Dieu est « ce qui aime en nous le principe spirituel, intérieur à l'âme, d'un amour désintéressé.

Les penseurs qu'on appelait au début de ce siècle « modernistes », issus du catholicisme, ont été également considérés comme panthéistes — au moins par leurs adversaires — à cause de leur « immanentisme ».

Certains d'entre eux, il est vrai, ne professaient qu'un immanentisme de méthode, un immanentisme pédagogique : pour Maurice Blondel, on ne saurait convertir réellement une âme à Dieu en Le lui présentant comme une réalité extérieure.

Il faut que l'âme elle-même apprenne à reconnaître en chacune de ses pensées un écho de la Pensée absolue, en chacune de ses « volontés voulues », explicites et portant sur des objets déterminés un reflet de la « Volonté voulante » qui tend obscurément vers le Bien absolu.

D'autres, comme Le Roy et Loisy, semblent professer un immanentisme doctrinal : « L'individu conscient, dit Loisy, peut être présenté presque indifféremment comme la conscience de Dieu dans le monde...

et comme la conscience du monde subsistant en Dieu.

» Tel est le « principe d'immanence » qui, énonçant que « tout est intérieur à tout », est une forme de panthéisme. Le panthéisme est-il un athéisme déguisé ? On conçoit qu'il est difficile de répondre nettement, le principe fondamental d'immanence étant susceptible d'interprétations opposées. Un matérialisme qui absorbe tout, y compris la conscience humaine, dans la nature ne peut être confondu avec un idéalisme absolu qui réduit la nature à une pensée.

Le panthéisme est le refus de distinguer Dieu et le monde.

Or ceci peut s'entendre en deux sens : ou bien Dieu seul est réel.

En termes spinozistes n'existe que la « nature naturante », l'unité de la Substance ; le monde concret, divers en sa multiplicité, la « nature naturée » n'est qu'apparence. NATURE NATURANTE ET NATURE NATURÉE. Ces deux expressions appartiennent à la théologie mystique médiévale d'inspiration plotinienne (Eckhart). »

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