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Le désir est-il une misère pour l'homme ?

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Le désir n?est-il autre chose que passivité ? N?est-il pas, par l?absence même qu?il signale, l?aiguillon qui excite l?industrie des hommes ? Et ne peut-on alors déceler dans le désir l?indice de la grandeur de l?homme (sa capacité d?agir et de produire du nouveau, de faire venir à l?être des choses inédites) ? 2-     Le désir étant moteur de l?action n?est pas une misère a)     L?inquiétude = « aiguillon qui excite l?industrie et l?activité des hommes » (Locke) Le désir, selon Locke, est d?abord inquiétude ressentie à l?égard d?une chose « qui si elle était présente nous causerait du plaisir ». Le désir se distingue de l?aversion et en cela, il n?est pas simple réceptivité du manque, pure passivité : l?inquiétude nous met en mouvement, nous fait tendre vers cet objet qui nous manque. On quitte alors le plan statique du simple constat de l?absence pour passer au plan dynamique de l?attraction (et en ce qui concerne la peine) de la répulsion. b)     Le désir est un mixte Dès lors, on voit la nature double du désir : ni pur pauvreté (misère) ni exclusive abondance (grandeur) : le désir est à la charnière du vide et de la plénitude comme le fait remarquer Platon dans le Banquet. Eros, représentation du désir, est fils de Poros et Pénia, de l?ingéniosité et de la pauvreté. Insatisfait par essence (le désir est privation mais aussi inquiétude - aporia), il dispose cependant des ressources faisant défaut à sa mère et lui venant de son père (expédient) dont la mère est Mêtis, l?intelligence. Ainsi comme l?écrit Léon Robin : « Cette naissance explique les caractères de sa nature : toujours déçu et mourant, il est cependant toujours plein de courage et de vie, jusqu?à se flatter d?être même éternel ; pauvre en satisfactions complètes et durables, il est riche d?aspiration ; ni absolument ignorant, ni absolument savant [?] il est en revanche curieux et vraiment philosophe ».


« Problématique : Poser que le désir est une misère, c'est inscrire le désir dans une anthropologie pessimiste.

Si le désir signale certes notre imperfection, étant aussi tension vers ce qui nous manque, et en cela, désignant ce qui est susceptible de nous mettre en mouvement, n'est-il pas dans ce cas un bienfait ? N'y a-t-il pas une certaine positivité à manquer au sens où comme le dit Rousseau, « vivre sans peine n'est pas un état d'homme ; vivre ainsi, c'est être mort » ? La misère ne serait-elle pas justement de ne manquer de rien, d'être privé de désirs ? Enjeu : quelle attitude adopter face au désir ? Doit-il être tenu pour mauvais de sorte que l'on ne pourrait être heureux que délivrés de ses désirs, dans un état de non-désir (= perspective chrétienne et celle du pessimisme de Schopenhauer) ? Ou bien devons-nous lui accorder une valeur telle que la souffrance ou le manque qu'il signale ne seraient des défauts que d'un certain point de vue (le bonheur dans la quête plus que dans l'obtention) ? 1- LE DÉSIR EN TANT QUE PRIVATION ET SOUFFRANCE, a) Qu'est-ce que la misère ? EST UNE MISÈRE POUR L'HOMME Le terme de « misère » signifie au sens premier une condition pénible aussi bien physique, matérielle que morale à laquelle s'ajoute un sentiment de pitié : la misère est appréciation d'un état posé comme défaut.

Plus précisément, la misère est d'un point de vue religieux, la condition humaine en tant que déchue : sa faiblesse et son incapacité à bien agir spontanément.

A partir de là, il est facile de ranger le désir en tant que signalant notre incomplétude (on ne désire que ce dont on est privé, non ce que l'on possède déjà) sous le régime de la misère : le désir renvoie l'homme à sa condition d'être déchu (le désir est là, « tant pour nous punir que pour nous faire sentir d'où nous sommes tombés » Pascal : l'homme désire parce qu'il est déchu, il est ce « roi dépossédé » par sa propre faute, désormais incapable de vrai et de bien, et impuissant à se suffire à lui-même. Le désir participe de ces choses décidées par Dieu pour nous punir, c'est-àdire que la jouissance intacte de notre être nous est désormais inaccessible à moins du secours de la Grâce que Dieu est libre de nous accorder ou non.) b) Symptôme de notre imperfection En effet le propre du désir est donc de nous mettre face à ce que l'on est ou ce que l'on a pas ; son essence est négative ; le désir se conjugue toujours sur le mode de la privation.

Ainsi Descartes montre bien que c'est par contraste avec l'idée d'un être parfait que nous éprouvons notre condition d'être finis : « comment serait-il possible que je puisse connaitre que je doute et que je désire, c'est-à-dire qu'il me manque quelque chose, si je n'avais en moi aucune idée d'un être plus parfait que le mien par la comparaison duquel je connaîtras tous les défauts de ma nature » (Méditations métaphysiques, III).

Autrement dit, le doute valant comme signe de notre manque de connaissance, le désir vaut comme signe de notre manque d'être.

C'est parce que nous désirons que nous avons conscience de n'être pas Dieu, mais des êtres relatifs, dépendant de l'être suprême. c) Le désir est souffrance Désirer, n'est pas simplement constater que l'on est fini ; c'est aussi éprouver à l'égard de cette condition une certaine souffrance morale, c'est-à-dire adopter à l'égard du désir un jugement de valeur où celui-ci est déprécié : à la caractérisation simplement ontologique donnée par Descartes, s'adjoint une dévalorisation psychologique où se manifeste alors le terme de « misère » dans toute son acuité : désirer, c'est souffrir, c'est-à-dire sentir en soi-même une douleur, un mouvement qui perturbe son être propre : le désir = ce qui sort le sujet de la jouissance intacte de son essence et qui, le met en position de passivité et d'impuissance. Transition : Si le désir est misère, c'est-à-dire qu'il signale notre faiblesse, notre imperfection, tant qu'il désire, l'homme ne saurait donc être heureux Dès lors, seule l'ascèse peut nous rendre heureux.

Pour Schopenhauer, le bonheur consiste en un détachement à l'égard du cycle des désirs, un retrait du monde au profit de la contemplation esthétique. D'où le problème : comment un tel retrait est-il seulement possible ? Chercher à en finir avec le désir, n'est-il pas, comme le remarque Nietzsche, encore le fait d'un désir ? [Cf.

Troisième dissertation de la généalogie de la morale : « l'homme préfère vouloir le rien que de ne pas vouloir du tout » ; l'ascète en renonçant à ses désir fait encore preuve de désirs (désir de rien mais non pas état de Non-désir] Manquer, est-ce nécessairement souffrir, et subir une absence éprouvée douloureusement ? Le désir n'est-il autre chose que passivité ? N'est-il pas, par l'absence même qu'il signale, l'aiguillon qui excite l'industrie des hommes ? Et ne peut-on alors déceler dans le désir l'indice de la grandeur de l'homme (sa capacité d'agir et de produire du nouveau, de faire venir à l'être des choses inédites) ? 2- LE DÉSIR ÉTANT MOTEUR DE L'ACTION N'EST PAS UNE MISÈRE a) L'inquiétude = « aiguillon qui excite l'industrie et l'activité des hommes » (Locke). »

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