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Le corps : agent de servitude ou de liberté ?

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« Le mot corps a un sens général en tant qu'il désigne les objets matériels en général et un sens restreint mais prépondérant qui s'applique au corps humain.

Le corps a été défini par Descartes comme substance étendue, identique aux choses et appartenant au monde sensible, par opposition à l'âme définie comme substance pensante, immatérielle.

Nous faisons tous les jours l'expérience de notre attachement au sensible, au monde à travers notre corps.

Celui-ci fut durant certaines périodes de notre civilisation un objet qu'il convenait de cacher ou d'ignorer.

Le terme de servitude dans le sujet suppose que le corps soumet l'individu à son pouvoir despotique.

En effet, puisqu'il est attachement au sensible, il est le lieu des désirs mauvais, des passions et s'oppose à l'activité de l'âme, de la raison et de la contemplation.

Le corps nous soumet aux lois de la nature.

Pourtant, n'est-ce pas par lui que nous pouvons agir sur le monde, faire en sorte de transformer le monde pour ne plus y être soumis ? De plus, le corps et l'esprit ne sont-ils pas unis de sorte que l'on ne peut pas dire si l'un domine l'autre, l'asservi ? N'est-ce pas dans une union harmonique des deux substances que l'homme peut se libérer et mieux agir sur lui-même et sur le monde ? Le corps est attachement au sensible et soumission aux lois de la nature - On rapporte que Platon a adopté un jeu de mots consistant à confondre somâ (qui signifie corps en grec) et sema qui désigne le tombeau.

Dès l'antiquité, le corps est considéré comme l'élément avilissant qui s'oppose à la partie divine de l'homme qui est l'âme.

En effet, en tant qu'il appartient à l'ordre des choses matérielles, le corps est rattaché aux lois de la nature et ne peut s'y substituer.

Il lui faut donc, comme le dit Schopenhauer, retomber dans l'inconscience caractéristique de la nature pendant le sommeil, se nourrir,… « Le corps nous cause mille difficultés par la nécessité où nous sommes de le nourrir, qu'avec cela des maladies surviennent » (Phédon) Le corps par exemple ne peut s'affranchir de la loi de pesanteur, ne peut aller au-delà de ses ressources et est soumis aux maladies, à toutes ces choses que l'homme ne peut contrôler.

Le corps est en effet ce qui rattache l'homme à l'animalité, étant commun avec les animaux et leur instinct. - de plus, le corps est lieu où naissent désirs, passions qui rendent l'homme esclave et incapable de se servir de sa raison.

La plus grande servitude que nous apporte le corps a été pendant longtemps les désirs sexuels, considérés comme néfastes et menant à la perversité.

Platon dit encore pour incriminer le corps que « c'est le corps seul et ses appétits qui sont la cause [des guerres, dissensions], car on ne fait la guerre que pour amasser des richesses et nous sommes forcés d'en amasser à cause du corps, dont le service nous tient en esclavage ».

C'est pour ces raisons que l'épicurisme et le stoïcisme placent le corps sous haute surveillance, bien que leurs méthodes soient très opposées.

Epicure classe les besoins selon des catégories et enjoint les hommes à n'assouvir que les besoins nécessaires et naturels( tel que se nourrir et boire, mais sans excès et sans faste) alors que les stoïciens exhortent à se rendre indifférent du corps et de tout élément extérieur indépendant de la volonté de l'homme qui toucherait le corps. Puisque le corps est le lieu des désirs, passions qui nous rendent égoïstes et aveugles, le corps gêne l'esprit dans sa recherche de vérité et de connaissance.

« Le corps nous remplit d'amour, de désirs, de craintes, de chimères de toute sorte si bien, que comme on dit, il nous ôte vraiment et réellement toute possibilité de penser »(Platon, Le Phédon) Descartes affirme ainsi dans Les passions de l'âme, « je considère que nous ne remarquons point qu'il y ait aucun sujet qui agisse plus immédiatement CONTRE notre âme, que le corps auquel elle est jointe.

» - Enfin le corps est corruptible et destiné à disparaître.

Nous ne pouvons pas lutter contre le processus de vieillissement et contre la mort.

C'est sans doute la plus grande servitude de l'homme. Mon corps me permet d'agir sur le monde - En quel sens le corps peut-il être un agent de liberté ? En quoi peut-il caractériser une liberté ? La liberté est difficile à définir parce qu'elle connaît plusieurs sens.

Dans un sens premier et immédiat, la liberté se définit comme la possibilité de faire ce que l'on veut faire.

Or, on peut se dire que cette possibilité dépend du corps, puisque lui seul peut entrer en contact avec le monde et d'agir sur lui. Par suite, incriminer le corps et faire de lui un objet tyrannique qui empêche mon esprit de faire ce qu'il veut est paradoxal.

En effet, il est difficile de concevoir un individu sans corps et difficile d'imaginer une action sur le monde sans corps matériel qui puisse avoir une force.

Notre corps est l'agent de notre vie dans le monde.

Bergson disait ainsi que « mon corps est ce qui se dessine au centre des perceptions ; ma personne est l'être auquel il faut rapporter ces actions.

»( Matière et mémoire).

Le corps est donc ce qui fait la puissance de l'individu, la force par lequel il peut agir et contrer d'autres forces pour ne pas en être l'esclave. Michel Henry décrit le corps comme « ensemble de nos pouvoirs, son être n'est compréhensible qu'à partir de l'essence de la puissance.

» Ainsi, mon corps se définit comme une force particulière qui peut entrer en action pour permettre à l'individu de ne pas esclave d'une autre force. Plus loin dans l'ouvrage Incarnation, une philosophie de la chair, Michel Henry. »

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