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« La rêverie est le dimanche de la pensée. La flânerie n'est pas seulement délicieuse, elle est utile. C'est un bain de santé qui rend la vigueur et la souplesse à tout l'être, à l'esprit comme au corps, c'est le signe et la fête de la liberté, c'est un

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« La rêverie est le dimanche de la pensée. La flânerie n'est pas seulement délicieuse, elle est utile. C'est un bain de santé qui rend la vigueur et la souplesse à tout l'être, à l'esprit comme au corps, c'est le signe et la fête de la liberté, c'est un banquet joyeux et salutaire, le banquet du papillon qui lutine et butine sur les côteaux et dans les prés. Or, l'âme est aussi papillon. » (Amiel, Fragments d'un journal intime.) En faisant appel à vos souvenirs littéraires et à votre expérience personnelle, vous commenterez ce passage en vous demandant à quelles conditions la rêverie peut être féconde. INTRODUCTION. - La rêverie, comme l'imagination à laquelle elle se rattache, n'a pas bonne presse. Lorsque, surtout au retour des vacances, le professeur interpelle un élève : « Attention, l'élève du dernier banc, vous rêvez », il veut dire que c'est là du temps perdu. Et si son appréciation d'un premier travail écrit porte : « Rêveries, mais point dissertation », cela signifie qu'il juge décousues ou incohérentes les idées dont le jeune philosophe était peut-être fier. Néanmoins la rêverie ne manque pas d'apologistes; parmi eux, AMIEL, qui, en une comparaison heureuse, voit en elle « le dimanche de la pensée ». L'auteur du Journal intime, il est vrai, était un incorrigible rêveur; par suite, on ne saurait le considérer comme un juge impartial. C'est pourquoi, après avoir commenté les lignes dans lesquelles il fait l'éloge de la rêverie, nous tâcherons de déterminer à quelles conditions celle-ci, au lieu d'être nocive, peut devenir bienfaisante.

« « La rêverie est le dimanche de la pensée.

La flânerie n'est pas seulement délicieuse, elle est utile.

C'est un bain de santé qui rend la vigueur et la souplesse à tout l'être, à l'esprit comme au corps, c'est le signe et la fête de la liberté, c'est un banquet joyeux et salutaire, le banquet du papillon qui lutine et butine sur les côteaux et dans les prés.

Or, l'âme est aussi papillon.

» (Amiel, Fragments d'un journal intime.) En faisant appel à vos souvenirs littéraires et à votre expérience personnelle, vous commenterez ce passage en vous demandant à quelles conditions la rêverie peut être féconde. INTRODUCTION.

- La rêverie, comme l'imagination à laquelle elle se rattache, n'a pas bonne presse.

Lorsque, surtout au retour des vacances, le professeur interpelle un élève : « Attention, l'élève du dernier banc, vous rêvez », il veut dire que c'est là du temps perdu.

Et si son appréciation d'un premier travail écrit porte : « Rêveries, mais point dissertation », cela signifie qu'il juge décousues ou incohérentes les idées dont le jeune philosophe était peutêtre fier. Néanmoins la rêverie ne manque pas d'apologistes; parmi eux, AMIEL, qui, en une comparaison heureuse, voit en elle « le dimanche de la pensée ».

L'auteur du Journal intime, il est vrai, était un incorrigible rêveur; par suite, on ne saurait le considérer comme un juge impartial.

C'est pourquoi, après avoir commenté les lignes dans lesquelles il fait l'éloge de la rêverie, nous tâcherons de déterminer à quelles conditions celle-ci, au lieu d'être nocive, peut devenir bienfaisante. I.

- COMMENTAIRE La rêverie est le dimanche de la pensée.

Etymologiquement, le dimanche est le jour du Seigneur, dies dominica, celui qui est consacré à Dieu.

De cette destination, il reçoit comme une auréole qui le distingue des autres jours de la semaine, un peu comme, pour le croyant, le ciel se distingue de la terre.

D'ailleurs les réjouissances terrestres, en chrétienté, se fondaient intimement avec la religion : les fêtes étaient celles de la liturgie; n'est-ce pas sur le parvis des églises qu'avec les Mystères commença le théâtre moderne.

Encore dans nombre de nos villages, c'est pour aller à la messe que nos paysans s'endimanchent, et ceux-là mêmes qui ne pratiquent plus, en laissant de côté leurs habits de travail, obéissent encore sans le savoir à l'obligation de respecter le jour du Seigneur.

Ainsi, dans notre monde occidental, le dimanche n'est pour personne un jour comme les autres : il ouvre la semaine ou il la termine; il est hors série. Le dimanche est aussi le jour de repos, tandis que le reste de la semaine est consacré au travail.

Mais, sauf dans des cas d'extrême fatigue, le repos ne consiste pas dans l'inertie complète du dormeur.

On ne prend plaisir à se reposer que grâce à des occupations qui distraient du travail professionnel : visites ou promenades, jeux ou sports, ou encore petits travaux qui répondent à des tendances que la vie de tous les jours ne permet pas de satisfaire. Ainsi le dimanche, le travailleur est à soi et à ce qu'il aime : il n'est pas talonné par les exigences du service, encadré par un horaire rigoureux; il peut suivre ses goûts et sa fantaisie.

En définitive, beaucoup travaillent toute une semaine pour jouir de leur dimanche; d'autres — en particulier les candidats aux grands concours — s'astreignent durant des années à une existence ne comportant pas de dimanche dans la perspective d'une situation dans laquelle tous les jours ressembleront au dimanche, c'est-à-dire d'une situation permettant d'organiser sa vie suivant ses goûts.

Ainsi le dimanche est le but que vise le travail quotidien : « La quotidienneté et la profession, sont plutôt un commerce avec les moyens qu'avec les fins.

La fin est pour nos dimanches. La pensée, elle aussi, a ses jours ouvrables et ses dimanches, des moments où elle s'absorbe dans des intérêts terre à terre et d'autres où, comme l'âme qui prie, elle s'élève vers le ciel. La semaine de la pensée consiste dans le travail professionnel : le professeur prépare ses classes et corrige ses copies au jour le jour; l'élève apprend ses leçons et fait ses devoirs.

Ils ont l'impression de travailler pour d'autres et non pour eux-mêmes.

En tout cas, ils font la besogne qui s'impose à eux et non celle qu'ils auraient spontanément choisie.

La pensée prend son dimanche, non pas nécessairement ni exclusivement le jour officiellement consacrée au repos, mais lorsque, s'évadant de sa tâche, elle va où sa fantaisie la porte.

Plus bas, souvent, et alors ce dimanche de la pensée marque un abaissement plus qu'une élévation : privé des cadres qui le maintiennent, l'esprit s'abandonne à des soucis vulgaires .ou à ses tendances inférieures.

Parfois aussi plus haut, les.

nobles aspirations comprimées par ta tâche quotidienne pouvant s'épanouir librement. Le dimanche de la pensée, pour AMIEL, c'est la rêverie durant laquelle, sans objet précis, nous nous laissons doucement aller au jeu des associations et à la pente des sentiments.

Nous pourrions, il est vrai, lui faire cette objection : rêver est une façon d'occuper ses dimanches, les moments de détente qui se glissent au cours du travail, tout aussi bien que le jour hebdomadaire de repos, mais il en est d'autres.

Certains consacrent les jours et les heures laissés libres par le travail à de véritables études ou à des réflexions méthodiques vers lesquelles se reporte l'esprit dès qu'il peut se détacher de son travail ordinaire.

Mais AMIEL et ceux qui lui ressemblent seraient pleins de pitié pour ces forçats qui, non contents de leur tâche professionnelle, s'en imposent une autre qui accapare ou plutôt supprime tous leurs dimanches.

Un travail sérieux n'est pas un travail de dimanche. La suite du texte accentue encore cette note en faisant l'éloge de la flânerie : La flânerie n'est pas seulement délicieuse, elle est utile.

Le flâneur est plus désoeuvré encore que celui qui rêve.

On peut rêver à des entreprises qu'on réalisera, et en rêvant s'y préparer.

La rêverie d'ailleurs peut ne durer qu'un instant ou même se contenter de la marge laissée libre par le travail auquel on se livre.

Le flâneur, au contraire, s'attarde dans l'inaction : il se promène au hasard, sans but déterminé, n'accordant aux hommes et aux choses qu'une attention superficielle, ne faisant groupe avec les gens de son espèce que pour tuer le temps. Il va de soi, pour AMIEL, quo cette flânerie est délicieuse.

C'est que l'auteur du Journal intime à l'action en horreur : « Aimer, rêver, sentir, apprendre, comprendre, je puis tout, pourvu qu'on me dispense de vouloir, qu'on m'affranchisse de l'ennui et de l'effort d'agir.

».

Mais ils sont plus nombreux ceux qui, pressés par l'action que souvent ils aiment pour elle-même, ne peuvent supporter la flânerie, tandis qu'ils sont heureux dans l'agitation des. »

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