l'art est-il un dévoilement de la vérité ?
Extrait du document
«
OEUVRE D'ART ET VÉRITÉ
Position réaliste
•
Faisant sienne la définition aristotélicienne de l'art comme imitation de la nature, le réalisme naïf voit dans la
conformité de l'oeuvre d'art à son modèle sa vérité et sa finalité.
•
Mais une oeuvre d'art n'est jamais objective, sa « vérité » procédant toujours d'un illusionnisme fondé sur
des conventions sociales.
Position idéaliste
•
Selon Platon, l'art est doublement faux dans la mesure où il est l'imitation (oeuvre d'art) d'une image (objet
naturel) de l'Idée qui seule est vraie (cf.
p.
61).
L'art ne saurait être vrai que dans la mesure où l'artiste se détourne
des formes naturelles pour se tourner vers les réalités idéales, tout comme l'Artisan du monde, le Démiurge, s'est
tourné vers ces Idées pour créer l'Univers (cf.
le Timée).
C'est pourquoi Platon attache une grande importance à la
musique qui n'imite pas le sensible, mais révèle des idéalités, des rapports mathématiques.
•
Pour Hegel, en revanche, il ne revient pas à l'artiste, mais au seul philosophe, de se tourner vers l'idée,
c'est-à-dire le concept.
L'artiste doit observer et reproduire la nature concrète en tant précisément qu'elle est une
manifestation de l'idée dans et par les formes sensibles.
Ainsi « l'art a pour destination de saisir et de représenter le
réel comme vrai, c'est-à-dire dans sa conformité avec l'idée, conforme elle-même à sa véritable nature ou parvenue
à l'existence réfléchie ».
L'art et la vérité de l'artiste
•
Si l'artiste exprime le monde extérieur, il exprime également le monde de son « âme », son monde intérieur.
Tout art, en effet, même réaliste, voire hyperréaliste, passe toujours par une sensibilité subjective.
Cette sensibilité
peut prendre dans l'oeuvre une importance croissante (cf.
l'impressionnisme et l'expressionnisme) jusqu'à un pur
subjectivisme (cf.
l'abstraction non figurative).
•
Dans cette perspective, l'idéalité de l'oeuvre d'art se confond avec la spiritualité de l'artiste, avec son
regard intérieur (cf.
le « principe de nécessité intérieure » du peintre Kandinsky comme coïncidence de la nécessité
immanente à l'oeuvre et de la nécessité intérieure à l'artiste), et sa vérité consiste dans sa coïncidence avec la
vérité de l'artiste, avec sa subjectivité.
Ce sujet ne va pas de soi car on ramène souvent l'art au lieu des apparences, de la tromperie, du mensonge.
Il
cacherait plutôt la vérité qu'il ne dévoilerait.
Aussi, il voit voir au-delà de cette condamnation de l'art au nom de
l'éventuelle confusion de l'apparence et de la réalité pour voir l'art comme le dévoilement de la vérité des
apparences et l'éventuelle apparition de quelque chose de plus profond, en vérité l'esprit, le divin ou de quelque
chose de plus lointain que la perception habituelle des choses ne nous permettrait pas d'approcher.
L'art permettrait
de se débarrasser de notre rapport habituel aux choses, pour conquérir le regard de l'esprit.
La subjectivité de
l'artiste serait un médium pour atteindre cette vérité, ce caractère essentiel des choses autrement à jamais
atteignable.
L'art permet-il réellement ce dévoilement ou en reste-t-il à un pur jeu d'apparence qui n'aurait que
d'autres visées que le plaisir esthétique ?
1) L'art ne dévoile pas la vérité.
Selon la conception platonicienne, l'art n'est tolérable, à défaut d'être exclu de la cité idéale, que comme instrument
d'une éduction dont la philosophie détermine le contenu et le projet.
Selon A.
Badiou dans Petit Manuel
d'inesthétique à propos de Platon : « La thèse est que l'art est incapable de vérité ou que toute vérité lui extérieure
(…) Il en résulte que l'art doit être ou condamné ou traité de façon instrumentale.
L'art, étroitement surveillé, peut
être ce qui accorde à une vérité prescrite du dehors la force transitoire du semblant, ou du charme.
L'art
acceptable doit être sous la surveillance philosophique des vérités (…)» Chez Platon, la connaissance de la vérité
est toute intelligible.
Il y a pourtant une exception qui se trouve dans l'épreuve du beau, qui immanent au sensible,
révèle la présence de l'intelligible .Le savoir, du côté de l'âme est une certaine activité de l'âme, qui procède non de
la raison mais de l'impulsion de l'amour.
Ainsi Socrate, notamment dans le Phèdre pense le délire ou mania, en
particulier le délire amoureux qui s'enflamme à la vue de la beauté et réveille l'âme de sa torpeur pour lui rendre le
souvenir de l'Idée, parce qu'elle est de toutes les idées la plus resplendissantes.
Le Beau est la seule Idée qui éveille
à l'intelligible.
Sans flatter les sens, le plus lointain, assimilable à l'intelligible devient le plus prochain.
Comment
comprendre cette esthétique presque contradictoire ? La véritable expérience esthétique entraîne l'homme au-delà
des objets immédiats car rien de sensible, d'immédiat ne peut satisfaire ce besoin de connaître les choses.
L'art que
critique Platon plaît en abolissant toute distance, il séduit, il enchaîne au lieu de libérer.
L'art ne peut que tenter
d'atteindre la beauté, tentative souvent raté.
Dans La « République » (X 597b-598c - cf.
texte), Platon montre que le peintre est « l'auteur d'une production
éloignée de la nature de trois degrés ».
En effet, il y a trois degrés de réalité..
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