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LA NOTION D'INCONSCIENT INTRODUIT-ELLE LA FATALITÉ DANS LA VIE DE L'HOMME ?

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« Problématique: Bien distinguer fatalité et déterminisme: la fatalité serait un déterminisme impossible à détecter et à surmonter.

La question est donc de savoir si la connaissance de l'existence de l'inconscient suffit pour atteindre le contraire de la fatalité, l'autonomie et donc la liberté. Que le moi ne soit plus, selon le mot de Freud, « maître en sa propre maison » n'est-ce pas là réintroduire l'idée d'un fatum, d'un destin, dans la vie de l'homme ? Si l'homme est dominé par des forces qui le dépassent, des tendances qui prennent la forme de pulsions symptomatiques, que reste-t-il de son pouvoir d'auto-détermination, de sa liberté ? Dès lors que la psychologie intègre l'idée d'inconscient il semble que nous ayons affaire à une forme raffinée de déterminisme certes moins rationnelle et prévisible que celle thématisée dans les sciences physico-chimiques ou mathématiques mais indéniable et problématique.

Si le sujet ne domine pas le sens de ses propres actions, si ses motifs lui échappent ne risque t-il pas de vivre ballotté et dirigé selon un sens qui, fatalement, lui échappe ? I- La législation de l'inconscient. Si le moi n'est pas maître c'est que l'inconscient légifère, non que je ne sache pas ce que je fais mais j'ignore, sans le savoir nécessairement, les raisons pour lesquelles je fais ou subis telle ou telle chose : choisir de suivre telles études, tomber amoureux de tel « type » de femme, être sensible à tel artiste plutôt qu'à tel autre… On en viendrait naïvement à hypostasier une lecture réelle et seule valable de nos actions, bien entendu la psychanalyse ne prétend nullement que toutes nos actions ont un sens caché mais elle s'appuie bel et bien sur une herméneutique (interprétation de sens) qui peut prendre pour objet des actes qui à nous semblent insignifiants (un acte manqué, un lapsus,…).

Cette herméneutique vise à dévoiler l'inconscient, à le rendre conscient en parti en soulevant les censures psychiques par le moyen de l'association d'idées, de la suggestion ou simplement en spéculant sur un mûrissement psychologique du sujet. Il n'en reste pas moins qu'un tel travail de dévoilement est délicat à mener et qu'il ne garanti pas au sujet la possibilité d'échapper à son inconscient.

Une cure permet d e révéler certains motifs, d'apaiser voire de faire disparaître des tensions ou des comportements pathologiques, mais jamais de libérer définitivement la conscience, l'inconscient n'est pas accidentel il est constitutif du psychisme humain. II- Problèmes éthiques. Or si l'homme ne domine pas le rythme, le sens, de sa propre vie, comment continuer de croire en la possibilité d'un sens moral puisque celui-ci exige comme condition de possibilité que l'homme puisse librement décider de ses actes.

La morale, la responsabilité, sont entamées dans leur sens même dès lors que l'homme n'est plus libre.

Alain ou Sartre ont vu cet écueil et c'est pourquoi l'inconscient leur est apparu comme « un autre nom pour la mauvaise fois ». Corrélativement la justice et le sens de la peine sont remis en cause : quel sens y a-t-il a enfermer un psychotique souffrant d'un dédoublement de la personnalité, incapable de composer une névrose (c'est-à-dire de gérer une frustration) et qui commet un crime ? L'œuvre de Foucault n'a cessé de poser de telles questions ; or celles-ci sont également valables dans le cas d'un crime passionnel, où on le sait la justice reconnaît au criminel des circonstances atténuantes. La vie de l'homme est donc ouverte à l'influence de son inconscient non comme une force extérieure et incontrôlable mais comme une force souterraine grondant du plus profond de nous-même jusqu'à immerger dans nos rêves, nos paroles (lapsus) ou à la surface de notre corps (paralysés hystériques de Charcot, cas d'eczéma ou autres manifestations psychosomatiques).

Mais convient-il de reconnaître ici l'introduction de la fatalité ? III- L'homme demeure un individu libre. L'inconscient est immanent à notre psychisme, il en est même le « composant » le plus profond, il ne nous tombe pas dessus du dehors telle la fatalité.

La fatalité tient davantage du sort jeté, bref elle est de l'ordre de l'incontrôlable on ne peut l'atténuer, or nous pouvons composer avec notre inconscient, soit en le dévoilant, soit en le refoulant (bien refouler c'est être en bonne santé). Certes il y a une parenté entre l'inconscient et la fatalité, elle est davantage une analogie qu'une filiation réelle, analogie suggérée par le confrontation de la psychanalyse et de la tragédie grecque ou shakespearienne, mais la psychanalyse n'a pas pour autant fait s'égaler inconscient et fatalité, au contraire la psychanalyse n'est pas littérature descriptive mais une tentative pour apprivoiser l'inconscient, le déjouer, en canaliser l'énergétique.

L'inconscient ne peut donc être assimilé à une fatalité autrement c'est l'entreprise psychanlytique elle-même qui n'aurait pas de sens. Finalement on peut dire que la justice fonctionne d'après l'idée de la liberté kantienne et sauve son sens par là même : en effet, d'après Kant je jouis d'une liberté nouménale, c'est-à-dire que je suis capable d'auto-détermination, je décide de mes actes.

Quand bien même je dis être dominé par une pulsion irrésistible qui fait que je ne pouvais pas faire autre chose que ce que j'ai fais, je reste libre pour la seule raison que je reconnais, à travers le remord que j'éprouve, que j'aurais pu faire autrement (cf.

l'exemple un peu radical de celui qui fréquente le bordel, poussé par une pulsion qui le domine et qui le jour où l'on place une potence à la sortie n'y entre plus, dans Fondements de la métaphysique des moeurs).

La peine demeure donc valable même s'il est des cas où elle n'a définitivement plus de sens (pour les malades mentaux). Conclusion : L'inconscient est donc une force plus fine que la fatalité, c'est une force suggestive, latente, parfois violente dans son expression mais toujours apprivoisable, canalisable par exemple dans la sublimation artistique ou que l'on saura refouler d'une autre façon.

Or devant la fatalité on est toujours impuissants et irresponsables, l'inconscient ne nous rend pas tels.

Il n'y a de fatalité que si l'on adopte une vision à la Schopenhauer où les motifs psychiques agissent comme des forces physiques.. »

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