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La libération du désir peut-elle constituer un idéal moral ?

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« Définition des termes du sujet Une libération, c'est-à-dire une opération par laquelle on passe d'un état de non liberté à un état de liberté, est une émancipation, une délivrance, ce qui suppose que l'objet concerné par la libération soit prisonnier ou bien encore emprisonnant.

Le mot « du » dans l'expression « libération du désir » pose effet problème en ce qu'il peut avoir un sens double : ou bien on considère qu'il est question ici de la libération de l'objet « désir », que le désir est ce qui est délivré (au sens où l'on parle par exemple de la libération d'un prisonnier), ou bien l'on comprend « libération du désir » comme délivrance de l'homme d'une puissance oppressante : le désir (au sens où l'on peut dire que l'on se libère d'une obsession, par exemple).

Il faudra prendre en compte ces deux compréhensions possibles. Le désir se définit comme une aspiration à un objet que l'on ne possède pas, et un caractère passionnel, irraisonné, lui est parfois attaché – ce qui peut expliquer que l'on puisse penser avoir à s'en délivrer. « Pouvoir », c'est « être en mesure de », mais c'est aussi « avoir le droit de » : il est question à la fois d'une possibilité de fait et d'une possibilité de droit. « Constituer » est à prendre ici dans un sens fort : celui de construire de manière fondamentale et réglée – la Constitution d'un Etat renferme ainsi ses principes fondamentaux. Un idéal est le stade de perfection ultime d'un phénomène ou d'un concept ; on y aspire ou on le prend comme référence.

Il est question ici d'un « idéal moral », c'est-à-dire que cet idéal concerne, dans une compréhension courante, ce qui est ou n'est pas convenable pour un homme de faire ou de penser, ou, dans une compréhension philosophique, ce qui doit régler la conduite de la vie humaine. Ce sujet a la particularité de pouvoir être compris de deux manières différentes, qu'il faudra confronter.

Il pose la question générale de la place qu'il faut accorder au désir, considéré dans son rapport à la liberté, dans la fondation d'une morale idéale.

Plus précisément, il est présupposé que l'on fait une place à cette question, et on interroge la pertinence de cette place. Proposition de plan I.

Le désir comme force d'oppression contraire à la constitution d'une morale : se libérer du désir constitue un idéal moral Une des positions traditionnelles de la philosophie sur le désir consiste à faire de lui une force irrationnelle entravant l'exercice de la raison, cet exercice de la raison étant seul à pouvoir fonder une morale.

Si l'on suit cette compréhension, le fait de se libérer du désir constitue un idéal moral, mais, plus encore, fournit à la constitution de cet idéal moral une de ses conditions de possibilité. Platon, Phédon « Socrate - A ressentir avec intensité, plaisir, peine, terreur ou désir, alors, si grand que soit le mal dont on puisse souffrir à cette occasion, entre tous ceux qu'on peut imaginer, tomber malade par exemple ou se ruiner à cause de ses désirs, il n'y a aucun mal qui ne soit dépassé cependant par celui qui est le mal suprême ; c'est de celui-là qu'on souffre, et on ne le met pas en compte ! Cébès - Qu'est-ce que ce mal, Socrate ? Socrate - C'est qu'en toute âme humaine, forcément, l'intensité du plaisir ou de la peine à tel ou tel propos s'accompagne de la croyance que l'objet précisément de cette émotion, c'est tout ce qu'il y a de plus clair et de plus vrai, alors qu'il n'en est point ainsi.

Il s'agit alors au plus haut point de choses visibles, n'est-ce pas ? Cébès - Hé ! absolument. Platon - N'est-ce pas dans de telles affections qu'au plus haut point l'âme est assujettie aux chaînes du corps ? Cébès - Comment, dis ? Socrate - Voici : tout plaisir et toute peine possèdent une manière de clou, avec quoi ils clouent l'âme au corps et la fichent en lui, faisant qu'ainsi elle a de la corporéité et qu'elle juge de la vérité des choses d'après les affirmations mêmes du corps.

» Transition : cette posture pessimiste sur l'efficace aliénante du désir demande à être interrogée : est-il en effet pertinent de vouloir fonder la morale en combattant le désir ? Pour répondre à cette question, il faut envisager un autre rapport de l'homme au désir. II.

Le désir, constitutif de l'homme et de sa morale – il faut alors libérer l'objet désir des chaînes que la philosophie lui a traditionnellement imposées. »

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