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La civilisation de l'image condamne-t-elle l'écrit à disparaître ?

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« L'expression « civilisation de l'image » est employée pour désigner le monde contemporain depuis les années 1960 environ, c'est-àdire à partir du moment où les différentes formes de production et de diffusion de l'image (télévision, cinéma, publicité, presse à grands tirages qui comprennent plus de photos que de textes…) sont devenues omniprésentes et occupent une place importante dans le paysage.

La civilisation de l'image est donc la société qui est la notre, où l'image est devenue omniprésente et dont on suppose qu'elle joue un rôle considérable par son influence immédiate sur les comportements. A l'image s'oppose l'écrit, c'est-à-dire le moyen d'expression et de diffusion des idées majeur jusqu'à l'émergence de l'image dans les sociétés contemporaines.

Par écrit nous entendrons toutes les formes par lesquelles la pensée s'énonce dans la forme du langage scripturaire, par opposition au langage pictural, ou iconique, c'est-à-dire celui des images. Si quelque chose condamne une autre à disparaître, c'est parce que son existence et son action sont une menace directe et efficace pour elle.

Ainsi, la civilisation de l'image peut être considérée comme une menace pour l'écrit, dans la mesure où la place de l'image en vient peut être à occuper toute celle jadis occupée par l'écrit. Nous nous demanderons donc si la civilisation de l'image peut être considérée comme la cause efficiente de la disparition de l'écrit, ou si l'image et l'écrit se nourrissent réciproquement sans que l'un participe à la disparition de l'autre. I. a. La civilisation de l'image est une menace directe pour l'épanouissement de l'écrit L'image occupe la place jadis investie par l'écrit A première vue, il semble tout à fait incontestable que l'image occupe actuellement la place jadis investie par l'écrit.

Jusqu'aux années 60, c'est-à-dire avant le véritable essor de l'image au cinéma et à la télévision, l'écrit était le seul moyen de produire un discours sur le monde qui en traduisait l'actualité.

C'est aujourd'hui la télévision, avec sa « grande messe de 20 heures » qui est chargée de communiquer sur les évènements à l'œuvre dans le monde.

Il semble donc assuré que la civilisation de l'image menace l'écrit, dans la mesure où l'image remplace les fonctions occupées par l'écrit. b. La lecture de l'image est une menace pour celle de l'écrit Allant plus loin, nous dirons que la civilisation de l'image menace celle de l'écrit dans la mesure où la lecture de l'image est une lecture intuitive, immédiate, qui délivre immédiatement un message et dont le pouvoir de suggestion est puissant.

A l'inverse, il y a un apprentissage de la lecture et de la compréhension de l'écrit, auquel peut faire obstacle la civilisation de l'image en promouvant une forme plus accessible de communication. II. a. La civilisation de l'image s'accompagne de fait d'une persistance de l'écrit La civilisation de l'image est encore une civilisation de l'écrit Cependant, malgré ces considérations, force est de constater que la civilisation de l'image n'a nullement entraînée la disparition de l'écrit.

En effet, il est certain que la lecture n'a jamais été autant pratiquée que de nos jours, ce qui est la conséquence d'un taux d'alphabétisation et d'instruction plus élevés dans les pays développés que par le passé.

Il semble donc que la civilisation de l'image n'a pas encore entraîné un recul majeur de l'écrit dans nos sociétés. b. La place de l'image s'accompagne d'un commentaire par l'écrit Par ailleurs, si la civilisation de l'image n'a pas entrainé de disparition de l'écrit, il semble a fortiori que l'image nourrit et encourage la production de l'écrit.

En effet, pensons à la presse de cinéma, à la presse informatique, à la presse télévisuelle, qui ont pour fonction de décoder la spécificité du visuel, et d'en permettre la compréhension affinée au moyen de l'écrit.

La civilisation de l'image n'est donc pas seulement le fossoyeur de l'écrit, mais elle donne lieu à l'émergence de nouvelles formes d'écrit qui ont pour fonction de commenter l'image. III. La civilisation de l'image condamne moins l'écrit qu'elle ne l'amène à repenser sa spécificité, sa valeur et sa place a. L'écrit détrôné de sa place prépondérante mais non menacé de disparition En définitive, ce que nous pouvons soutenir est que, certes, l'écrit a été détrôné de sa place prépondérante par l'invasion des images. On s'informe moins de nos jours par la presse écrite, qui connait de grandes difficultés, que par le moyen de la civilisation.

De même, nos loisirs laissent de plus en plus de place à l'image (pensons au marché en pleine expansion du jeu vidéo, que l'on nomme même le « huitième art ») et nous détournent de la consommation de l'écrit, à commencer de la lecture.

Cependant, l'écrit demeure présent de nos jours, et occupe une place moindre mais non menacée de disparition, en ceci que nous sommes amenés à prendre conscience de sa spécificité. b. Une prise de conscience de la singularité de l'écrit et des limites de l'image dans la civilisation de l'image Dans sa leçon inaugurale au collège de France, Antoine Compagnon s'interroge sur la place de la littérature de nos jours, et de l'écrit en général, dans la civilisation de l'image qui est la notre.

Il montre que l'inflation des images nous amène à repenser la spécificité, la valeur et la place de l'écrit dans nos sociétés.

Nous dirons donc que la civilisation de l'image menace moins l'écrit qu'elle ne nous contraint à penser sa valeur : l'écrit n'est plus le médium unique de la pensée, il est un moyen parmi d'autres, sans doute plus riche et complexe que l'image, de représenter le monde et de susciter notre réflexion sur lui. Conclusion : A première vue, il ne fait pas de doute que la civilisation de l'image menace l'écrit : en effet, l'image a remplacé des domaines traditionnellement dévolus à l'écrit, et remet en cause notre faculté à manipuler le langage écrit.

Néanmoins, l'image menace moins l'écrit de disparition qu'elle ne lui dispute sa place prépondérante, en le contraignant à penser sa valeur, sa spécificité et sa place dans le monde actuel.. »

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