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KANT: triangle et géométrie

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Le premier qui démontra le triangle isocèle (qu'il s'appelât Thalès ou comme l'on voudra) eut une grande lumière; car il trouva qu'il ne devait pas suivre à la trace ce qu'il voyait dans la figure, ni s'attacher au simple concept de cette figure comme si cela devait lui en apprendre les propriétés, mais qu'il lui fallait réaliser cette figure, au moyen de ce qu'il y pensait et s'y représentait lui-même a priori par concepts (c'est-à-dire par construction), et que, pour connaître sûrement quelque chose a priori, il ne devait attribuer aux choses que ce qui résultait nécessairement de ce que lui-même y avait mis, conformément à son concept. [...] Lorsque Galilée fit descendre sur un plan incliné des boules avec une pesanteur choisie par lui-même, ou que Torricelli fit porter à l'air un poids qu'il avait d'avance pensé égal au poids, connu de lui, d'une colonne d'eau, ou que, plus tard, Stahl transforma des métaux en chaux et celle-ci à son tour en métal, en leur retranchant ou en leur restituant certains éléments, alors ce fut une grande lumière pour tous les physiciens. Ils comprirent que la raison n'aperçoit que ce qu'elle produit elle-même d'après son projet, qu'elle doit prendre les devants avec les principes qui déterminent ses jugements suivant des lois constantes, et forcer la nature à répondre à ses questions, au lieu de se laisser conduire par elle comme en laisse ; car autrement, des observations faites au hasard et sans aucun plan tracé d'avance ne se rassemblent pas en une loi nécessaire, ce que cherche pourtant la raison et dont elle a besoin. Cette raison doit se présenter à la nature, tenant d'une main ses principes, d'après lesquels seulement des phénomènes concordants peuvent valoir comme lois, et de l'autre les expériences qu'elle a conçues d'après ces mêmes principes. Elle lui demande de l'instruire, non pas comme un écolier qui se laisse dire tout ce qui plaît au maître, mais comme un juge en fonctions, qui force les témoins à répondre aux questions qu'il leur pose. KANT

« Le premier qui démontra le triangle isocèle (qu'il s'appelât Thalès ou comme l'on voudra) eut une grande lumière; car il trouva qu'il ne devait pas suivre à la trace ce qu'il voyait dans la figure, ni s'attacher au simple concept de cette figure comme si cela devait lui en apprendre les propriétés, mais qu'il lui fallait réaliser cette figure, au moyen de ce qu'il y pensait et s'y représentait lui-même a priori par concepts (c'est-à-dire par construction), et que, pour connaître sûrement quelque chose a priori, il ne devait attribuer aux choses que ce qui résultait nécessairement de ce que lui-même y avait mis, conformément à son concept.

[...] Lorsque Galilée fit descendre sur un plan incliné des boules avec une pesanteur choisie par lui-même, ou que Torricelli fit porter à l'air un poids qu'il avait d'avance pensé égal au poids, connu de lui, d'une colonne d'eau, ou que, plus tard, Stahl transforma des métaux en chaux et celle-ci à son tour en métal, en leur retranchant ou en leur restituant certains éléments, alors ce fut une grande lumière pour tous les physiciens.

Ils comprirent que la raison n'aperçoit que ce qu'elle produit elle-même d'après son projet, qu'elle doit prendre les devants avec les principes qui déterminent ses jugements suivant des lois constantes, et forcer la nature à répondre à ses questions, au lieu de se laisser conduire par elle comme en laisse ; car autrement, des observations faites au hasard et sans aucun plan tracé d'avance ne se rassemblent pas en une loi nécessaire, ce que cherche pourtant la raison et dont elle a besoin.

Cette raison doit se présenter à la nature, tenant d'une main ses principes, d'après lesquels seulement des phénomènes concordants peuvent valoir comme lois, et de l'autre les expériences qu'elle a conçues d'après ces mêmes principes.

Elle lui demande de l'instruire, non pas comme un écolier qui se laisse dire tout ce qui plaît au maître, mais comme un juge en fonctions, qui force les témoins à répondre aux questions qu'il leur pose. VOCABULAIRE: A priori: Ce qui précède l’expérience, et n’est tiré que de l’esprit ou de la raison. Chez Kant, les formes a priori de la sensibilité (l’espace et le temps) et de l’entendement (les catégories) rendent possible l’expérience (l’a priori est ici transcendantal).

Les marques de l’a priori sont l’universalité et la nécessité.

L’expérience, quant à elle, n’offre que des généralisations et du contingent. QUESTIONNEMENT INDICATIF • La raison produit-elle des objets physiques (par exemple produit-elle les sphères qui roulent sur le plan incliné, l'air dont la pression agit sur la surface de l'eau) ? Que produit-elle alors ? Que signifie ici « voir » ? • En quoi les expériences de Galilée et Torricelli nous éclairent-elles sur ce qui est à l'œuvre dans l'expérimentation ? • Les « lois immuables » sont-elles les fois physiques ? • Qu'est-ce qu'une loi « nécessaire »? Pouvez-vous donner une définition de « nécessaire » et de « contingent »? • Qu'est-ce qu'avoir « l'autorité de lois » ? • Pourquoi, selon Kant, seuls les principes (de la raison) peuvent donner aux phénomènes concordants entre eux l'autorité de lois ? • En quoi l'expérimentation » est-elle nécessaire, selon Kant ? • Quelle est la fonction de la métaphore « filée » « écolier» « juge », « maître », « témoin » ? • Qu'est-ce qui doit être « premier » dans l'expérimentation ? • Ce texte a-t-il un intérêt simplement « épistémologique » ou se situe-t-il dans le domaine de la philosophie des sciences ? Alors que dans la Logique, selon Kant, « la raison n'a affaire qu'à elle-même », elle doit s'occuper, en géométrie, de figures et d'espace, et, en physique, d'objets matériels et de principes empiriques.

Comment peut-elle s'appliquer à l'expérience sans dériver ses concepts de l'expérience ? Kant n'entend pas ici faire oeuvre d'historien des sciences.

L'exactitude des dates et des noms ne lui importe guère.

« L'histoire de cette révolution de la façon de penser, écrit-il un peu auparavant, [...] et de l'homme qui eut le bonheur de l'accomplir, n'est point parvenue jusqu'à nous ».

Il propose une épure de la démarche scientifique, selon laquelle les opérations de la raison priment sur les propriétés de l'objet à connaître. Le premier alinéa du texte évoque la boutade selon laquelle « la géométrie est l'art de raisonner juste sur des figures fausses ».

En effet, la démonstration d'une propriété géométrique (par exemple : la somme des angles intérieurs d'un triangle quelconque est égale à deux angles droits) n'est pas une vérification sur pièces, (car alors chaque nouveau triangle tracé devrait être soumis à une mesure de ses angles, tâche approximative et. »

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