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KANT et les cent thalers

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Être n’est évidemment pas un prédicat réel, c’est-à-dire un concept de quelque chose qui puisse s’ajouter au concept d’une chose. C’est simplement la position d’une chose ou de certaines déterminations en soi. […] Le réel ne contient rien de plus que le simple possible. Cent thalers réels ne contiennent rien de plus que cent thalers possibles. Car, comme les thalers possibles expriment le concept, et les thalers réels l’objet et sa position en lui-même, si celui-ci contenait plus que celui-là, mon concept n’exprimerait plus l’objet tout entier, et par conséquent il n’y serait plus conforme. Mais je suis plus riche avec cent thalers réels qu’avec leur simple concept (c’est-à-dire qu’avec leur possibilité). En effet, l’objet en réalité n’est pas simplement contenu d’une manière analytique dans mon concept, mais il s’ajoute synthétiquement à mon concept […], sans que les cents thalers conçus soient eux-mêmes le moins du monde augmentés par cette existence placée en dehors de mon concept. Quand donc je conçois une chose, quels que soient et si nombreux que soient les prédicats au moyen desquels je la conçois (même en la déterminant complètement), par cela seul que j’ajoute que cette chose existe, je n’ajoute absolument rien à la chose. […] Cette preuve ontologique (cartésienne) si célèbre, qui prétend démontrer par des concepts l’existence d’un Être suprême, fait dépenser en vain toute la peine qu’on se donne et tout le labeur consacré, et l’on ne deviendra pas plus riche en connaissances avec de simples idées qu’un marchand ne le deviendrait en argent si, dans la pensée d’augmenter sa fortune, il ajoutait quelques zéros à son livre de caisse. KANT

« « Être n’est évidemment pas un prédicat réel, c’est-à-dire un concept de quelque chose qui puisse s’ajouter au concept d’une chose.

C’est simplement la position d’une chose ou de certaines déterminations en soi.

[…] Le réel ne contient rien de plus que le simple possible.

Cent thalers réels ne contiennent rien de plus que cent thalers possibles.

Car, comme les thalers possibles expriment le concept, et les thalers réels l’objet et sa position en lui-même, si celui-ci contenait plus que celuilà, mon concept n’exprimerait plus l’objet tout entier, et par conséquent il n’y serait plus conforme.

Mais je suis plus riche avec cent thalers réels qu’avec leur simple concept (c’est-à-dire qu’avec leur possibilité).

En effet, l’objet en réalité n’est pas simplement contenu d’une manière analytique dans mon concept, mais il s’ajoute synthétiquement à mon concept […], sans que les cents thalers conçus soient euxmêmes le moins du monde augmentés par cette existence placée en dehors de mon concept. Quand donc je conçois une chose, quels que soient et si nombreux que soient les prédicats au moyen desquels je la conçois (même en la déterminant complètement), par cela seul que j’ajoute que cette chose existe, je n’ajoute absolument rien à la chose.

[…] Cette preuve ontologique (cartésienne) si célèbre, qui prétend démontrer par des concepts l’existence d’un Être suprême, fait dépenser en vain toute la peine qu’on se donne et tout le labeur consacré, et l’on ne deviendra pas plus riche en connaissances avec de simples idées qu’un marchand ne le deviendrait en argent si, dans la pensée d’augmenter sa fortune, il ajoutait quelques zéros à son livre de caisse.

» KANT. Cette preuve est, au fond, la formulation originale de l’argument ontologique de Saint Anselme (XI ième siècle).

Elle avait été critiquée par Gaunilon.

Kant la critique aussi dans la « Critique de la raison pure ».

Pour Kant, les preuves de l’existence de Dieu sont des niaiseries.

Il n’est pas possible de prouver l’existence d’un être transcendant.

Il est impossible de connaître un être qui nous dépasse.

Dans l’argument ontologique, le premier concept, ce n’est pas Dieu mais l’idée de Dieu.

Si nous disons Dieu, nous supposons qu’il existe avant même de le démontrer.

L’idée de Dieu est l’idée d’un être qui possède toutes les perfections.

Or, un être parfait est un être qui existe, donc l’idée de Dieu existe. Il s’agit pour Kant d’un jugement analytique du type : un tri-angle a trois angles.

Un tel jugement n’ajoute rien à l’idée de triangle.

Le prédicat est contenu dans le sujet.

Les propriétés du triangle sont contenues dans le concept même de triangle.

L’argumentation de Descartes reste donc au niveau des idées.

La preuve ontologique n’est qu’une misérable tautologie.

Pour Kant le concept n’est qu’une possibilité logique mais on ne peut pas conclure de la possibilité logique des concepts à la possibilité réelles des choses.

Autrement dit, de l’idée d’un Être parfait, j’ai bien le droit de conclure à l’idée que l’existence doit lui appartenir, mais nullement à son existence elle-même.

Dans la preuve cartésienne, le passage à l’existence, du Logique à l’Ontologique est indu.

Le concept est toujours possible quand il n’est pas contradictoire.

Ainsi, par exemple, le concept de carré est possible si je ne lui attribue pas deux prédicats contradictoires.

A contrario, « poser un triangle en en supprimant les trois angles est contradictoire », mais si je fais disparaître à la fois le triangle et les trois angles, « il n’y a plus là de contradiction ».

Il en est exactement de même du concept d’un être absolument nécessaire.

Si vous lui ôtez l’existence, vous supprimez la chose avec tous ses prédicats : « Si je supprime le prédicat d’un jugement en même temps que le sujet, il ne peut jamais en résulter une contradiction interne ».

Ainsi , pour Kant, l’existence ne peut se constater que par la voie empirique et non par la Raison.

Il faut distinguer le niveau des idées de celui de la vie.

Existe-t-il un Dieu réel ? Nous ne pouvons pas répondre en nous appuyant sur les principes de la Raison. Avec le grand rationalisme classique inauguré par Descartes, la raison apparaissait comme l’instrument infaillible d’une critique des illusions, généralement imputées aux sens ou à l’imagination. Or, avec Kant, l’illusion est portée au cœur même de la raison.

Le rationalisme fait place au criticisme, cad à une critique permanente des moyens de la connaissance, et à un incessant procès de la raison contre elle-même et ses prétentions abusives.

C’est le sens de l’illusion transcendantale : la raison prétend connaître au-delà des limites de l’expérience et déterminer des choses en soi, cad des objets qui ne sont pas donnés dans un phénomène sensible (le Moi, le monde, Dieu). L’illusion n’est plus seulement un déchet à éliminer (Platon, Descartes), mais elle est consubstantielle à l’instrument luimême, la raison, qui se trouve empêtrée dans ses propres contradictions (antinomies : opposition d’une thèse et de son antithèse).

La « Dialectique transcendantale » est donc cette partie de la « Critique de la raison pure » où Kant examine comment la raison se contredit elle-même lorsqu’elle veut connaître au-delà de l’expérience. Et il est bien question ici d’illusion, et non d’erreur, car l’illusion transcendantale est inévitable, incorrigible, à l’inverse de l’erreur.

L’illusion transcendantale est un besoin structurel de la raison pure, et aucun effort d’attention ne peut y remédier. La connaissance est unification.

Pas de connaissance sans données sensibles ; mais les formes a priori de la sensibilité (espace et temps) unifient déjà les données de l’expérience.

Puis cette expérience sensible est unifiée sous les catégories de l ‘entendement.

La raison, enfin, a pour destination d’unifier toute la connaissance en un système sous. »

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