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KANT

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Devoir ! nom sublime et grand, toi qui ne renfermes rien en toi d'agréable, rien qui implique insinuation, mais qui réclames la soumission, qui cependant ne menaces de rien de ce qui éveille dans l'âme une aversion naturelle et épouvante, pour mettre en mouvement la volonté, mais poses simplement une loi qui trouve d'elle-même accès dans l'âme et qui cependant gagne elle-même, malgré nous, la vénération (sinon toujours l'obéissance), devant laquelle se taisent tous les penchants, quoiqu'ils agissent contre elle en secret ; quelle origine est digne de toi, et où trouverait-on la racine de ta noble tige, qui repousse fièrement toute parenté avec les penchants, racine dont il faut faire dériver, comme de son origine, la condition indispensable de la seule valeur que les hommes peuvent se donner à eux-mêmes ? Ce ne peut être rien de moins que ce qui élève l'homme au-dessus de lui-même (comme partie du monde sensible), ce qui le lie à un ordre de choses que l'entendement seul peut concevoir et qui en même temps commande à tout le monde sensible et avec lui à l'existence, qui peut être déterminée empiriquement, de l'homme dans le temps, à l'ensemble de toutes les fins qui est uniquement conforme à ces lois pratiques et inconditionnées comme la loi morale. Ce n'est pas autre chose que la personnalité, c'est-à-dire la liberté et l'indépendance à l'égard du mécanisme de la nature entière, considérée cependant en même temps comme un pouvoir d'un être qui est soumis à des lois spéciales, c'est-à-dire aux lois pures pratiques données par sa propre raison, de sorte que la personne, comme appartenant au monde sensible, est soumise à sa propre personnalité, en tant qu'elle appartient en même temps au monde intelligible. Il n'y a donc pas à s'étonner que l'homme, appartenant à deux mondes, ne doive considérer son propre être, relativement à sa seconde et à sa plus haute détermination, qu'avec vénération, et les lois auxquelles il est en ce cas soumis, qu'avec le plus grand respect. Pour cette raison, toute volonté, même la volonté propre à chaque personne, dirigée sur la personne elle-même, est astreinte à la condition de l'accord avec l'autonomie de l'être raisonnable, [...] par conséquent à ne jamais employer le sujet simplement comme moyen, mais conjointement avec elle-même comme fin. KANT

« Devoir ! nom sublime et grand, toi qui ne renfermes rien en toi d'agréable, rien qui implique insinuation, mais qui réclames la soumission, qui cependant ne menaces de rien de ce qui éveille dans l'âme une aversion naturelle et épouvante, pour mettre en mouvement la volonté, mais poses simplement une loi qui trouve d'ellemême accès dans l'âme et qui cependant gagne elle-même, malgré nous, la vénération (sinon toujours l'obéissance), devant laquelle se taisent tous les penchants, quoiqu'ils agissent contre elle en secret ; quelle origine est digne de toi, et où trouverait-on la racine de ta noble tige, qui repousse fièrement toute parenté avec les penchants, racine dont il faut faire dériver, comme de son origine, la condition indispensable de la seule valeur que les hommes peuvent se donner à eux-mêmes ? Ce ne peut être rien de moins que ce qui élève l'homme au-dessus de lui-même (comme partie du monde sensible), ce qui le lie à un ordre de choses que l'entendement seul peut concevoir et qui en même temps commande à tout le monde sensible et avec lui à l'existence, qui peut être déterminée empiriquement, de l'homme dans le temps, à l'ensemble de toutes les fins qui est uniquement conforme à ces lois pratiques et inconditionnées comme la loi morale.

Ce n'est pas autre chose que la personnalité, c'est-à-dire la liberté et l'indépendance à l'égard du mécanisme de la nature entière, considérée cependant en même temps comme un pouvoir d'un être qui est soumis à des lois spéciales, c'est-à-dire aux lois pures pratiques données par sa propre raison, de sorte que la personne, comme appartenant au monde sensible, est soumise à sa propre personnalité, en tant qu'elle appartient en même temps au monde intelligible.

Il n'y a donc pas à s'étonner que l'homme, appartenant à deux mondes, ne doive considérer son propre être, relativement à sa seconde et à sa plus haute détermination, qu'avec vénération, et les lois auxquelles il est en ce cas soumis, qu'avec le plus grand respect.

Pour cette raison, toute volonté, même la volonté propre à chaque personne, dirigée sur la personne elle-même, est astreinte à la condition de l'accord avec l'autonomie de l'être raisonnable, [...] par conséquent à ne jamais employer le sujet simplement comme moyen, mais conjointement avec elle-même comme fin. Problématique. les caractéristiques du devoir moral marquent bien la condition particulière de l'homme dans le monde.

Il n'a rien d'agréable, et cependant nous lui obéissons, quelquefois contre nos intérêts.

L'origine du devoir, qui manifeste la dignité de l'homme, c'est sa liberté, son pouvoir de dépasser les influences de la nature.

L'instrument et la source de ce pouvoir est la raison, qui nous dicte ses exigences. Enjeux Par la raison et la liberté, l'homme occupe une place particulière dans le monde.

L'expérience universelle du devoir, que tous les hommes connaissent d'une façon ou d'une autre, est la marque de cette originalité. Il ne fait pas de doute que cette prosopopée du devoir ait été inspirée à Kant par celle de la conscience dans l'Émile. Mais si l'invocation à la conscience trouve au sein de la Profession de foi du vicaire savoyard une place pour ainsi dire naturelle, en revanche, cette personnification du devoir et cet élan d'éloquence de forme mystique ont un caractère insolite dans un ouvrage de philosophie qui se veut un traité scientifique et dont le livre premier débute, à la manière de l'Éthique de Spinoza, par une suite de définitions, de scolies, de théorèmes et corollaires, de problèmes.

Il semble que Kant, emporté soudain par un mouvement irrésistible d'enthousiasme, abandonne la méthode patiente de l'analyse pour se laisser aller à une sorte de syncrétisme lyrique, comme s'il voulait dire tout à la fois sur l'unique grandeur du devoir et en submerger son lecteur.

Mais sous cette envolée on retrouve aisément la notion de devoir que Kant a dégagée dans les Fondements de la métaphysique des moeurs et qui distingue le respect ou vénération qu'engendre la conscience du devoir aussi bien de l'inclination que de la crainte, bien qu'il ne soit pas sans quelque analogie avec l'une et avec l'autre.

D'une part, si le devoir n'a rien en lui de l'attrait et de la séduction insinuante du plaisir, du moins une fois qu'on a «donné à ce sentiment de respect une influence pratique, on ne peut se rassasier de contempler la majesté de la loi morale et l'âme croit s'élever d'autant plus qu'elle voit cette loi sainte plus élevée au-dessus d'elle et de sa nature plus fragile ».

D'autre part, le respect, en nous faisant prendre conscience de notre subordination à l'autorité absolue de la loi, rabaisse, en l'humiliant, la suffisance et la satisfaction de soi. Mais comment s'explique ce sentiment original du respect ? Cette seconde partie du texte, d'une extrême densité, enferme en quelques lignes l'essentiel de la philosophie pratique de Kant.

La préface de la Critique de la Raison pratique, confirmant les analyses de la 3e section des Fondements, rappelle les résultats de la critique spéculative selon lesquels il y a lieu « de ne voir dans les objets de l'expérience, pris comme tels et comprenant notre propre sujet, que des phénomènes, mais en même temps de leur laisser comme fondement des choses en soi, partant de ne prendre ni tout objet supra-sensible pour une fiction, ni son concept pour un concept vide ».

Or, poursuit Kant, «voici maintenant la raison pratique qui, par elle-même et sans s'être concertée avec la raison spéculative, accorde de la. »

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