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Jules Dumont d'Urville

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Rien ne semblait prédestiner un héritier des grands baillis de Condé-sur-Noireau, de vieille souche terrienne, à devenir le rival attardé de Cook et le véritable découvreur d'une Antarctique encore mystérieuse. Pourtant, au cours d'un troisième voyage en Océanie, après deux incursions vers le pôle austral, Dumont d'Urville écrivait à son ministre : "Ces pensées seules m'avaient poussé dans la carrière maritime, depuis ma plus tendre enfance." Cette vocation précoce s'explique plutôt par un demi-échec à Polytechnique, dû à la négligence de l'algèbre et de la géométrie. Mais ni à Brest (1807-08), ni au Havre (1809-10), ni à Toulon, il n'a l'occasion, rarement offerte à la Marine Impériale, de combattre ou de naviguer. Malgré l'opposition d'une mère à qui il reconnaissait devoir "la force de son tempérament", il épousait en 1815 Adèle Pépin, fille d'horloger, sa compagne à la vie et à la mort. Pour tuer le temps, il continue à lire ; sa science encyclopédique, quoique peu disciplinée, embrasse les langues anciennes et modernes jusqu'au chinois ; récits de voyage, minéralogie, entomologie, botanique et herborisation surtout le passionnent, plus, dit-on, que la partie technique du métier. La Restauration, ouvrant les mers à nos rares navires, le trouve prêt à adopter la carrière, alors à la mode, de marin savant.

« Jules Dumont d'Urville Rien ne semblait prédestiner un héritier des grands baillis de Condé-sur-Noireau, de vieille souche terrienne, à devenir le rival attardé de Cook et le véritable découvreur d'une Antarctique encore mystérieuse.

Pourtant, au cours d'un troisième voyage en Océanie, après deux incursions vers le pôle austral, Dumont d'Urville écrivait à son ministre : "Ces pensées seules m'avaient poussé dans la carrière maritime, depuis ma plus tendre enfance." Cette vocation précoce s'explique plutôt par un demi-échec à Polytechnique, dû à la négligence de l'algèbre et de la géométrie.

Mais ni à Brest (1807-08), ni au Havre (1809-10), ni à Toulon, il n'a l'occasion, rarement offerte à la Marine Impériale, de combattre ou de naviguer.

Malgré l'opposition d'une mère à qui il reconnaissait devoir "la force de son tempérament", il épousait en 1815 Adèle Pépin, fille d'horloger, sa compagne à la vie et à la mort. Pour tuer le temps, il continue à lire ; sa science encyclopédique, quoique peu disciplinée, embrasse les langues anciennes et modernes jusqu'au chinois ; récits de voyage, minéralogie, entomologie, botanique et herborisation surtout le passionnent, plus, dit-on, que la partie technique du métier.

La Restauration, ouvrant les mers à nos rares navires, le trouve prêt à adopter la carrière, alors à la mode, de marin savant. Évincé du tour du monde exécuté sur l'Uranie (1817-1820) par Freycinet, il se rejette comme enseigne sur les campagnes hydrographiques en Méditerranée de la Chevrette, d'où il revient avec un herbier, des cartes et un rapport loués par l'Académie des Sciences, et la découverte de la Vénus de Milo (1819-1820). L'occasion vint bientôt de tenter le tour du monde, dont le grand attrait demeurait la traversée du Pacifique.

Son ami Duperrey, comme lui lieutenant de vaisseau, hydrographe et physicien présenta en octobre 1821 au ministre Portal un plan de recherche scientifique, en le réclamant comme second.

La Coquille, gabare de trois cent quatre-vingts tonneaux, emmena de Toulon en août 1822 cinquante-neuf marins et douze officiers, dont les enseignes Jacquinot et Lottin, l'élève de Blosseville, le chirurgien Lesson.

Elle y rentra trente et un mois et treize jours après,"ayant parcouru vingt-quatre mille huit cent quatre-vingt-quatorze lieues sans perdre un homme et sans faire d'avaries." Des positions géographiques avaient été fixées, des reconnaissances de côtes et d'archipels à peine connus exécutées, ainsi que de sérieuses observations magnétiques.

D'Urville, pour sa part, ramenait un herbier et une collection d'insectes considérables et c'est en herborisant à Bora Bora qu'il sentit venir sa vocation d'ethnographe. La mort à sept ans de son fils aîné, la maladie de sa femme, les récompenses insuffisantes à son gré, ne le découragèrent pas de présenter au ministre Chabrol, en mai 1825, un nouveau plan de voyage destiné à compléter, en Nouvelle-Guinée et aux alentours, les résultats trop hâtifs de celui de la Coquille.

De vagues informations touchant le sort de La Pérouse étant parvenues en France, il reçut l'ordre d'exécuter des recherches à ce sujet ; sa corvette fut rebaptisée l'Astrolabe.

Précédé sur le lieu du naufrage à Vanikoro par l'Irlandais Dillon (1827), d'Urville, aiguillonné par cette nouvelle à sa relâche de Hobart, décida de s'y rendre.

Il fut assez heureux, tremblant de fièvre sur son cadre, pour faire repêcher des ancres et des canons de l'ancienne Astrolabe, établir les circonstances du double naufrage, élever sur un îlot voisin de son mouillage un modeste cénotaphe et faire lever par l'enseigne Gressien le plan de l'île (février-mars 1828). En vingt-trois mois de navigation (1826-1828), il avait en outre reconnu le détroit de Cook et l'île nord de la Nouvelle-Zélande, les Tonga, les Fiji, les Loyalty, le nord de la Nouvelle-Guinée, la Nouvelle-Bretagne et la Louisiade.

Ses officiers rapportaient avec lui un magnifique butin.

Peu de documents sont aussi suggestifs de la flore, des indigènes, des paysages et des pirogues de l'Océanie, que les grands Atlas de l'Astrolabe, dont les nombreuses cartes enrichirent aussi l'hydrographie.

Rossel, ancien officier de d'Entrecasteaux, fit à l'Académie un rapport des plus élogieux.

Encensé, chargé de la publication du voyage, d'Urville n'estime pourtant ni lui ni ses compagnons assez récompensés. Sa rédaction achevée (1835), d'Urville parut se complaire en sa villa de Toulon aux joies familiales et à l'éducation dé son fils Jules, né en 1826.

Mais il rêve chaque nuit qu'il s'avance vers le pôle à travers des canaux qui ne s'ouvrent que pour se refermer.

Ce n'est pourtant pas le pôle qui l'attire : c'est l'Océanie, dont il a entrepris l'étude ethnographique et linguistique, qu'il a décrite dans son Voyage pittoresque (1834-1835) et dont il nous a laissé la division classique.

Reprenant au début de 1837 le projet ébauché en conclusion du Voyage de l'Astrolabe, il présente au ministre un nouveau plan.

Louis-Philippe, amateur de géographie, au courant de la tentative où le baleinier Weddell avait, en 1823, atteint en mer libre le 74e degré sud, ajouta de son cru une pointe en même direction. La Zélée est adjointe à l'Astrolabe sous les ordres du fidèle Jacquinot.

Vingt-trois officiers, cent soixante-dix marins, l'hydrographe Vincendon-Dumoulin, le phrénologue Dumoutier, le dessinateur Goupil, forment le personnel.

Malgré l'hostilité de l'Académie des Sciences, d'Urville, encouragé par le Dépôt des cartes et plans, par la Société de Géographie qui, au retour, lui décernera sa grande médaille d'or, s'apprête à mener à bien "la plus glorieuse expédition qui eût jamais été entreprise." Une des plus pénibles aussi.

Par deux fois, au début, puis après le gros de son périple océanien, il tente de forcer la route du pôle.

Pendant six jours, 4-9 février 1838, phoques et pingouins de la mer de Weddell virent avec un étonnement compréhensible deux coques noires aux agrès surchargés de neige et semblant porter leur deuil prochain, lutter pour se libérer de la banquise, sans dépasser le 64e degré.

A l'ouest, du 22 février jusqu'au 5 mars, entre 63° et 64°, on découvrit et on releva la terre Louis-Philippe et l'île Joinville, au sud des South Shetland et dans le prolongement de la terre de Graham.

On revint au Chili soigner les équipages atteints du scorbut. Le 1er janvier 1840, laissant de nouveaux malades à Hobart, d'Urville appareille encore au sud.

Ce ne fut pas la glace qui l'arrêta : le 21 janvier, sous le cercle polaire et par le plus beau temps du monde, ses officiers et savants débarquent sur un îlot rocheux au pied d'énormes falaises de glace, pour hisser, en buvant à la santé du Roi, le pavillon sur la terre Adélie, premier morceau connu du continent austral.

Le 30, plus à l'ouest, on vit une Côte Clarie que personne n'a revue, barrière de glace partie en dérive. Fait contre-amiral, enfin satisfait des récompenses reçues, Dumont d'Urville ne put mettre la dernière main à ses travaux.

Lui, sa femme et son fils trouvèrent une mort atroce dans l'accident du chemin de fer de Versailles le 8 mai 1842.. »

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