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Faut-il travailler pour être humain ?

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« Le travail n'humanise pas seulement la Nature indifférente aux besoins des hommes... Le travail dans l'Antiquité marque un asservissement de l'homme à la nécessité, c'est une servitude qui l'enchaîne à la nature par le besoin et qui, par conséquent, ne peut convenir à l'homme libre.

Aux yeux d'un Grec « homme libre » est un pléonasme, partant on comprend qu'il ne faut surtout pas travailler pour être humain ! Le travail est un châtiment des dieux destiné à punir l'hybris (l'excès de confiance) des hommes pour qui Prométhée avait dérobé la foudre et la technique.

Les Grecs trouvent alors la parade : l'esclavage. Que fait donc l'esclave qui travaille? Qu'est-ce que ce travail, tout simplement, auquel le soumet son maître ? Le travail apparaît comme cette action de l'homme sur la Nature grâce à laquelle des objets naturels sont transformés en vue d'un usage humain ou bien en vue de leur consommation.

Par le travail l'homme « humanise » la Nature au sens où il l'aménage, il en fait son « milieu », c'est-à-dire qu'il la dispose à répondre à ses besoins.

La nature, grâce au travail des hommes, devient le moyen du développement de l'espèce et du confort nécessaire à ce développement. C'est que la Nature ne répond pas spontanément aux besoins des hommes.

L'image de la mère nourricière que chérit Rousseau ne convient guère.

Car si la mère donne à l'enfant le lait dont il a besoin, l'homme dans la nature doit puiser son eau.

« Sa peine a tiré cette eau — argumente J.

Locke dans le Traité du gouvernement civil —, pour ainsi dire, des mains de la Nature, entre lesquelles elle était commune et appartenait également à tous ses enfants et l'a appropriée à la personne qui l'a puisée.

» Le travail est bien un acte d'appropriation.

Mais cette action n'est-elle pas si pénible qu'elle finit par déposséder, en retour, l'homme de son humanité? ...

il permet à l'homme de se créer. On est conduit à distinguer alors le savoir-faire de la pure force de travail.

Si le travail est cette confrontation de l'homme avec la Nature, qui réclame du premier à la fois réflexion et habileté pour résoudre les difficultés que la présence inerte de la seconde suscite, alors l'homme se crée par le travail.

En modifiant son milieu, il se modifie luimême en ce qu'il est conduit à découvrir en lui des ressources physiques et intellectuelles qu'il ne soupçonnait pas. Ce travail fait de science et de technique autant que de force et de peine humanise l'homme.

Il faut travailler pour être humain parce que le travail est le moyen par lequel l'homme réalise sa nature perfectible.

L'homme est davantage un animal laborans qu'un animal rationnel. Mais encore faut-il que ce travail-là soit celui de l'artisan qui conçoit le geste et l'outil de son action sur la nature. La division du travail qu'impose la société industrielle — et qui l'a également rendu possible — permet de vendre et d'acheter désormais non plus un savoir-faire, une « technique » de transformation de la Nature, mais une simple force de travail. Le travail réduit à la force ramène alors l'homme au rang de l'animal.

Ceux dont le travail se limite à l'exercice d'une force physique toujours appliquée de manière identique, Marx les appelle « prolétaires ».

La fatigue qui résulte de cette répétition de l'effort et le caractère absurde d'une tâche dont on ne perçoit pas la signification font du travailleur une bête de somme, attachée à son travail par le simple besoin d'assurer sa subsistance.

Le travail devient alors l'instrument de la négation de l'humanité de l'homme. S'il faut travailler pour être humain, c'est seulement quand ce travail libère, or : « Le domaine de la liberté ne commence que lorsque cesse le travail déterminé par le besoin et l'utilité extérieure.

» K.

Marx, Le capital. 1- "Je pose en principe un fait peu contestable: que l'homme est l'animal qui n'accepte pas simplement le donné naturel, qui le nie...

l'homme parallèlement se nie lui- même, il s'éduque, il refuse par exemple de donner à la satisfaction de ses besoins animaux ce cours libre, auquel l'animal n'apportait pas de réserve." G.

bataille, L'Érotisme, Minuit, page 238. 2- "...

l'obligation de travail a aussi un rôle de sanction et de contrôle moral.

C'est que, dans le monde bourgeois en train de se constituer, le péché par excellence, ce n'est plus l'orgueil ni l'avidité comme au Moyen-âge, c'est l'oisiveté." R.

Jaccard, La folie, Que sais-je, page 18. 3- "L'oeuvre exige pendant toute sa durée, outre l'effort des organes qui agissent, une attention soutenue, laquelle ne peut elle-même résulter que d'une tension constante de la volonté." Marx, Le Capital , I.

GF page 139. - "Mais ce qui distingue dès l'abord le plus mauvais architecte de l'abeille la plus experte, c'est qu'il a construit la cellule dans sa tête avant de la construire dans la ruche.

Le résultat auquel le travail aboutit préexiste idéalement dans l'imagination du travailleur." Marx, Le Capital, I.

Editions Sociales, page 180. »

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