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Faut-il comprendre son passé pour construire son avenir ?

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« On définit traditionnellement le passé comme ce qui n'est plus et le futur ou l'avenir comme ce qui n'est pas encore.

Dès lors, puisque le passé est ce qui n'est plus, est ce qui est mort, on considère communément qu'il est ce dont il faut se détacher.

L'homme qui reste attaché au passé est attaché à ce qui n'est plus et qui ne sera jamais plus.

On affirme alors généralement que pour construire l'avenir il faut se détourner du passé, cesser de rester attaché à ce qui n'est plus.

On oppose ainsi l'homme du passé à l'homme de l'avenir qui est celui qui sait résolument faire table rase du passé pour construire de la nouveauté.

Pourtant, cette négation, ce refus ou cet oubli du passé permettent-ils de construire l'avenir ? En effet, la construction de l'avenir ne suppose-t-elle pas une prise en compte d'un passé et de l'expérience qu'il a permis de constituer ? Ainsi, d'un côté, parce qu'il n'est plus le passé semble inutile pour construire l'avenir, d'un autre en ce qu'il me constitue et constitue une expérience, le passé semble être nécessaire pour construire l'avenir.

Dès lors, quel rapport devons-nous entretenir avec le passé ? Une fois le problème posé, vous pouvez revenir d'abord à cette idée selon laquelle le passé doit être dépassé.

Vous pouvez alors, par exemple penser à la question du deuil tel que Freud l'aborde dans Deuil et mélancolie.

Le deuil apparaît ainsi comme ce temps de reconstruction de notre rapport au monde suite à une disparition. Lorsque l'autre disparaît, nous éprouvons sa présence sur le mode de l'absence, notre monde est dépeuplé.

Faire le deuil consiste à reconstruire un nouveau rapport au monde, sans l'autre.

Freud montre ainsi que si le deuil est un moment nécessaire, l'impossibilité de dépasser le deuil conduit à la mélancolie.

La construction de l'avenir suppose ainsi le dépassement de notre ancien rapport au monde.

Vous pouvez également analyser des notions telle que la nostalgie.

Il s'agit de montrer alors en quoi l'attachement au passé peut être un obstacle à la construction de l'avenir.

Pensez au slogan révolutionnaire qui dit que du passé il faut faire table rase.

Pourtant, ne peut-il pas y avoir un danger dans cette rupture avec le passé ? En effet, vous pouvez, par exemple penser à la notion de devoir de mémoire en montrant l'importance qu'il y a à prendre en compte le passé et à s'en souvenir.

Certes, il n'y a peut-être jamais de répétition à l'identique, mais le passé et son souvenir peuvent peut-être conduire à une forme de vigilance.

Vous pouvez également revenir alors sur la toute première définition du passé que nous avons donnée comme étant ce qui n'est plus et montrer en quoi il y a peut-être un présent du passé.

Montrez ainsi, par exemple, en quoi le passé me constitue et en quoi cette idée d'une rupture radicale avec le passé est peut-être une abstraction. On apprend par l'expérience On appelle homme d'expérience celui qui a beaucoup vécu et se serait instruit au contact de réalités diverses.

Ce que cet homme sait d'expérience, ce qu'il sait pour l'avoir éprouvé, vaudrait plus que toute théorie.

L'habitude, comme fruit de l'expérience, serait même comme l'affirme Hume «le grand guide de la vie humaine».

Une telle conception oublie que l'habitude n'engendre le plus souvent que des préjugés.

Or rien n'est plus éblouissant qu'un préjugé.

Il arrive donc fort fréquemment que l'éclat de la vérité ne soit que la patine du temps et que notre certitude ne soit pas le fait de la raison mais simplement l'éloquence de nos désirs. Sur le plan de l'action, les situations que nous rencontrons sont parfois si singulières et complexes que les leçons du passé ne servent à rien sans la capacité d'analyser rapidement les données du problème.

Sur le plan de la spéculation, on peut même soutenir, avec Descartes, que les leçons de la vie ne sont d'aucun secours.

Le voyageur égaré dans la forêt qui hésite sur la direction à suivre doit prendre des décisions qui lui permettront de sortir de son état de doute.

La loi de l'action est d'être raisonnable quand elle ne peut être rationnelle.

Ce qui est raisonnable c'est de ne pas hésiter perpétuellement sur la direction à prendre, même si un choix irrationnel met fin à la délibération. Aussi Descartes conseille-t-il au voyageur égaré de marcher le plus droit qu'il peut vers un même côté car arriver quelque part est mieux que piétiner sur place.

En revanche, l'esprit en quête de vérité doit provoquer des raisons de douter et se méfier de la séduction du probable car il peut arriver que ce qui nous paraît probable et même très probable soit faux et que ce qui est vrai ne nous paraisse pas probable. — Il faut, assure-t-on, «acquérir de l'expérience » pour atteindre une certaine maturité, savoir se conduire, effectuer des choix judicieux, etc.

Que peut nous apporter l'expérience ainsi acquise au quotidien? — Elle se présente spontanément au sujet, qui la «reçoit»: il reste passif, et interprète ce qu'il voit ou éprouve en fonction de sa propre subjectivité. — Dans ces conditions, et qu'elle soit « heureuse » ou «malheureuse», l'expérience quotidienne ne peut avoir de sens que par rapport aux normes ou valeurs que le sujet possédait déjà.

Elle s'inscrit dans un parcours singulier — d'où, dans la façon dont elle est rapportée, l'insistance fréquente sur son caractère exceptionnel, et l'attention au détail «significatif». — L'accumulation de telles expériences apprend, dit-on, « à vivre».

Elle serait donc orientée vers l'acquisition d'une « sagesse » — au sens populaire — et non d'un savoir théorique.

Ce qui lui interdit d'accéder à ce dernier, c'est précisément sa singularité — le savoir exigeant au contraire l'universalité.

C'est aussi bien la dimension purement sensible, empirique, ou affective, alors que, pour qu'il y ait savoir, il faut des concepts et une élaboration abstraite. La personnalité se construit pendant l'enfance Pour Freud, les événements déterminants pour la constitution de la personnalité ont lieu pendant la petite enfance.

Ils sont ensuite rejetés dans l'inconscient et recouverts par une chape d'oubli. Certains de ces événements peuvent être traumatisants et provoquer des troubles de la personnalité à l'âge adulte.

La psychanalyse a pour but de guérir le patient par une «cure», en lui faisant prendre conscience de ce passé enfoui. L'histoire nous permet de comprendre l'actualité et de préparer l'avenir Le présent est souvent bien incompréhensible.

Pourquoi telle explosion de violence dans un corps social ? Pourquoi voit-on l'actualité comme une suite d'événements accidentels voire fortuits ? Réponse : l'ignorance de la situation passée interdit de comprendre ce présent que nous vivons mais dont le sens nous échappe.

A un niveau individuel, la connaissance et la recherche au travers d'une psychanalyse des traumatismes qui ont structuré notre personnalité psychique sont autant de moyens pour mieux comprendre ce que l'on est au présent et que l'on doit au passé, considéré comme élément de structuration de sa propre histoire.

Il semble donc aller de soi que l'on est dépendant du passé pour comprendre le présent. [Ce n'est qu'en rompant avec son passé que l'on peut construire librement son avenir.

Ce qui est important, ce n'est pas ce qui est derrière nous, mais ce vers quoi nous allons.] Les hommes décident librement Il n'est pas nécessaire de comprendre le passé pour construire l'avenir.

L'homme peut forger son avenir suivant ses propres projets, dans la nouveauté et la liberté. La signification du passé est étroitement dépendante de mon projet présent.

Cela ne signifie nullement que je puis faire varier au gré de mes caprices le sens de mes actes antérieurs; mais, bien au contraire, que le projet fondamental que je suis décide absolument de la signification que peut avoir pour moi et pour les autres le passé que j'ai à être.

Moi seul en effet peux décider à chaque moment de la portée du passé: non pas en discutant, en délibérant et en appréciant en chaque cas l'importance de tel ou tel événement antérieur, mais en me « pro-jetant » vers mes buts, je sauve le passé avec moi et je décide par l'action de sa signification.

Cette crise mystique de ma quinzième année, qui décidera si elle « a été » pur accident de puberté ou au contraire premier signe d'une conversion future? Moi, selon que je déciderai - à vingt ans, à trente ans - de me convertir.

Le projet de conversion confère d'un seul coup à une crise d'adolescence la valeur d'une prémonition que je n'avais pas prise au sérieux.

Qui décidera si le séjour en prison que j'ai fait, après un vol, a été fructueux ou déplorable? Moi, selon que je renonce à voler ou que je m'endurcis.

Qui peut décider de la valeur d'enseignement d'un voyage, de la sincérité d'un serment d'amour, de la pureté d'une intention passée, etc.

? C'est moi, toujours moi, selon les fins par lesquelles je les éclaire. Sartre. Dans un premier mouvement, la pensée de Sartre est théorique.

Thèse sur la signification du passé humain, sur le caractère choisi et construit du passé.

Ensuite, une série d'exemples nous est présentée.

Passage de l'abstrait au concret, de l'élucidation philosophique à l'illustration concrète. 1) « La signification du passé … sa signification » : mon « projet originel » et mon projet présent décident de la signification de mon passé, lequel n'est donc pas un bloc figé. a) « La signification… projet présent » : énoncé de la thèse générale, selon laquelle le passé est informé par le présent. b) « Cela… j'ai à être » : ce ne sont pas des déterminations arbitraires et fantaisistes qui décident de mon passé, mais bien mon projet originel. a) c) « Moi seul… signification » : ma projection permanente vers le futur décide de mon passé. 2) « Cette crise mystique… je les éclaire » : les exemples illustrent la thèse générale énoncée. « Cette crise mystique…au sérieux » : exemple d'une crise mystique, d'une phase critique où j'ai eu le sentiment d'entrer en rapport direct avec Dieu.

A moi de lui donner un sens à travers mon projet présent. b) « Qui décidera… m'endurcis » : exemple d'un moment dont je construis perpétuellement le sens (le séjour en prison). c) « Qui peut… éclaire » : ce sont les buts vers lesquels je tends qui éclairent les diverses modalités de mon passé (voyages, serment d'amour). · Quelle est l'idée directrice du texte ? Le présent, le futur et le « projet fondamental » de mon existence décident du sens du passé, lequel n'est pas un bloc figé, mais une perpétuelle transformation. · Le problème soulevé par le texte : si le passé pèse sur moi, tel un ensemble de déterminismes, ou bien s'il est une matière pour la liberté humaine.

Le passé, obstacle ou organe d'une liberté ? · · Quel est l'enjeu du texte, ce qu'il me fait gagner ou perdre, théoriquement et pratiquement ? S'il s'avère que je décide librement, dans l'instant présent, de mon passé, alors je redécouvre le champ de ma liberté et de ma pratique dans le monde, la sphère des infinis possibles.

Si l'analyse de Sartre est exacte, alors rien ne me structure de manière définitive et je décide seul de mon destin et de ma vie.

Loin d'être opacité, le passé est organe de ma liberté et je puis donc échapper à tout ce qui tend à me figer en « essence ». Quant à l'intérêt philosophique : ces lignes me renvoient à la liberté du sujet pleinement responsable de lui-même.

Leur intérêt est de me recentrer sur ma totale responsabilité et sur mon choix. L'homme est anticipation. »

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