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Faut-il combattre nos désirs ?

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« La condamnation du désir par la philosophie «Quant aux désirs, pour le moment, renonces-y totalement.» Épictète, Manuel (lei siècle ap.

J.-C.). • Pour la philosophie stoïcienne, le désir est dangereux, et il vaut mieux y renoncer.

C'est la seule voie possible pour qui veut atteindre la sagesse qui consiste en l'«ataraxie» ou absence de trouble, obtenue par la reconnaissance rationnelle de la nécessité qui gouverne le monde. • D'après Épictète, il y a deux sortes de désirs: les premiers portent sur «ce qui ne dépend pas de nous»: notre corps, la richesse, la célébrité, le pouvoir...

Désirer ces choses-là, c'est s'exposer aux plus grands malheurs puisque ce sont des choses qui nous échappent complètement et qui sont très changeantes.

On pourrait donc désirer au moins «ce qui dépend de nous», c'est-à-dire désirer la sagesse.

Mais celle-ci ne peut être l'objet que d'une décision et non d'un désir: celui qui se contente de la désirer souffrira de ne pas y parvenir.

Mieux vaut donc renoncer à tous les désirs et s'efforcer d'être purement rationnel. • On peut remarquer toutefois qu'Épictète précise «...pour le moment».

Le sage pourra laisser libre cours à son désir de sagesse lorsqu'il sera parvenu à celle-ci.

Mais ce «désir» aura changé de signification et se confondra avec la sagesse. Le désir est une force positive «Malheur à qui n'a plus rien à désirer.» Rousseau, La Nouvelle Héloïse (1761). • Contre l'ascétisme des philosophies rationalistes, Rousseau fait dire à Julie (le personnage de son roman) la beauté et la force du désir amoureux: le désir est paradoxal, car d'un côté il consiste à tendre vers un but, mais de l'autre, il se suffit à lui-même.

En effet, celui qui accomplit son désir connaît en même temps que la satisfaction une sorte de déception. • L'affirmation de Julie («Malheur à qui...») est radicale: pour elle, le vrai bonheur consiste dans le désir lui-même, qui est une forme d'intensification de la vie.

Ne rien désirer, ce n'est pas la sagesse, c'est la mort. C'est la maîtrise du désir qui permet de l'encourager. «Toutes les passions ont une période où elles sont seulement néfastes, où elles rabaissent leur victime de tout le poids de leur bêtise — et plus tard une autre, beaucoup plus tardive, où elles se marient à l'esprit, se "spiritualisent". [...] Nous n'admirons plus les dentistes qui arrachent les dents pour qu'elles cessent de faire mal». Nietzsche, Crépuscule des idoles (1888). • Nietzsche résume bien ici le double aspect du désir: d'un côté il est néfaste, mais de l'autre, il permet à l'homme d'accéder au meilleur de lui-même.

Comme Rousseau, il condamne les philosophies ou les religions qui veulent éradiquer le désir comme si c'était une rage de dents.

De nos jours, arracher une dent qui fait mal apparaît comme primitif.

On admire le dentiste qui sait la soigner sans l'arracher.

Il en va de même avec le désir, il faut le «soigner» pour lui permettre de durer.

Il est la vie et le vrai bonheur, mais à condition d'être cultivé, comme une plante. • «Comment spiritualiser, embellir, diviniser un désir?» Telle est la vraie question pour Nietzsche.

Et la réponse, pour lui, se trouve du côté de l'art et de l'écriture: c'est dans l'art en effet, dans la musique par exemple, que le désir peut se déployer et se transformer indéfiniment, et cesser d'être une simple compulsion morbide.

Mais cela suppose l'éducation et la culture de soi. "Malheur à qui n'a plus rien à désirer ! il perd pour ainsi dire tout ce qu'il possède.

On jouit moins de ce qu'on obtient. »

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