Être libre, est-ce échapper à toute contrainte ?
Extrait du document
«
La volonté ne connaît pas de limite.
«Il n'y a que la seule volonté, que j'expérimente en moi être si grande que je
ne conçois pas l'idée d'aucune autre plus ample et plus étendue : en sorte
que c'est elle principalement qui me fait connaître que je porte l'image et la
ressemblance de Dieu.» Descartes, Méditations métaphysiques (1641).
• Pour Descartes, notre volonté est infinie: elle est ce qu'il y a de divin en
l'homme.
C'est ce que l'on appelle le libre-arbitre: la faculté de décider d'agir,
que chacun peut ressentir en soi-même au moment où il décide de faire ou de
ne pas faire un geste par exemple.
A.
Les deux degrés de liberté
Être libre, cela signifie d'abord avoir la puissance d'affirmer ou de nier, de
vouloir ou de refuser, sans être déterminé par quoi que ce soit – bref avoir un
libre arbitre*.
Ainsi, lorsque rien ne me pousse à vouloir une chose plutôt
qu'une autre, en l'absence de raisons claires, ma liberté se manifestera par
l'indifférence de ma volonté et l'arbitraire de mon choix.
Mais cette indifférence, qui révèle un défaut de connaissance plus qu'une
perfection de la volonté, n'est que « le plus bas degré de liberté ».
Être libre,
en effet, ne consiste pas seulement à être indépendant, déterminé par rien,
mais aussi à développer sa propre nature.
Or l'homme a une nature
rationnelle, créée par Dieu.
Notre volonté est donc destinée à s'accomplir dans la reconnaissance du vrai, et notre
nature à y trouver son épanouissement.
Je serai donc d'autant plus libre que j'aurai des raisons évidentes d'agir et que je ne serai jamais indifférent.
Si je
connaissais toujours clairement ce qui est vrai et ce qui est bon, je ne serais jamais en peine de délibérer, ma
volonté agirait avec facilité, sans hésitation, en pleine lumière.
B.
Liberté et vérité
Mais si je suis d'autant plus libre que je me soumets à l'évidence et au bien, que devient le pouvoir de se
déterminer par soi-même ? Le libre arbitre n'est-il pas anéanti par la splendeur contraignante de la vérité ?
Non, car l'évidence ne contraint pas la volonté, le libre arbitre ne disparaît pas devant l'évidence, il est seulement
« incliné » à donner son assentiment, mais sans nécessité.
Car absolument parlant, il peut le refuser, en préférant
l'affirmation de son indépendance à la vérité.
L'homme est donc méritant de reconnaître le vrai, car il pourrait en détourner son attention.
C'est librement que
l'homme accomplit sa nature en développant sa raison, et librement qu'il peut déchoir.
Et si réaliser sa nature, c'est
devenir vraiment libre, on doit dire que c'est librement que l'on devient libre.
En disant que le péché lui-même est
une erreur, Descartes ne disculpe donc personne, il fait plutôt de l'erreur une sorte de péché contre soi-même.
Le libre–arbitre n'est qu'une illusion car tous nos actes sont déterminés.
«On dirait qu'ils conçoivent l'homme dans la nature comme un empire dans un
empire [...] Une volonté finie ou infinie requiert une cause par où elle soit
déterminée à exister et à produire quelque effet et ainsi ne peut être dite
cause libre, mais seulement nécessaire ou contrainte.
» Spinoza, Éthique
(1675).
En déclarant à propos des moralistes : « En vérité, on dirait qu'ils conçoivent
l'homme dans la nature comme un empire dans un empire », Spinoza (16321677) récuse la morale, affirme une conception nouvelle de la liberté.
Cette
fameuse formule « l'homme comme un empire dans un empire » se retrouve
souvent sous la plume de Spinoza, mais elle est explicitée clairement dans la
préface du troisième livre de L'Ethique, son ouvrage principal.
Spinoza est, comme Descartes, l'héritier de la «révolution galiléenne ».
Les
découvertes de Galilée entraînent une réforme totale des sciences et obligent
à redéfinir la place de l'homme dans l'univers.
Mais Spinoza, à la différence de
son précurseur Descartes, accepte de tirer de la science nouvelle des
implications morales et politiques.
Celles-ci seront perçues comme ,tellement
inouïes, révolutionnaires, tranquillement opposées à l'absolutisme politique et
au conformisme religieux, qu'elles vaudront à Spinoza avec les surnoms de
«chien galeux» et «d'impie », une vie précaire et menacée.
Une des principales conséquences des découvertes de Galilée, c'est que la nature apparaît comme désenchantée,
uniquement régie par les lois scientifiques, les lois de la mécanique.
Spinoza en tire la conclusion suivante : il faut
considérer l'homme comme une partie de la nature comme une autre et dont tous les actes s'expliquent par des lois,
des causes.
Mais il s'inscrit ainsi contre la conception traditionnelle de la liberté humaine, qui veut que l'homme
décide souverainement de ses actions, qu'il soit doté de «libre-arbitre ».
Cette conception traditionnelle s'adosse à.
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