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Etienne Bonnot de Condillac

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L'oeuvre de Condillac ne compte pas parmi les plus grandes. Mais, par la lucidité des analyses qu'elle présente, aussi bien que par l'influence qu'elle a longtemps exercée, elle occupe une place relativement importante dans l'histoire de la pensée française. Elle s'apparente au reste, par les thèmes qu'elle n'a cessé de reprendre, à quelques-unes des plus hautes philosophies.    De la vie même de Condillac (1714-1780), aucun événement notable n'est à retenir : cette vie fut toute simple et marquée seulement par la publication d'ouvrages de philosophie, d'histoire et d'économie politique. Issu d'une famille qui était originaire du Briançonnais, Condillac fit ses premières études à Lyon, mais vint de bonne heure à Paris, où il suivit sans enthousiasme des cours de théologie et s'initia plus volontiers aux sciences et à la philosophie. Dès 1740, après avoir reçu les ordres, il fréquenta les milieux littéraires, fit notamment la connaissance de Rousseau et de Diderot, et commença d'écrire. De 1758 à 1767, il exerça des fonctions de précepteur, à la cour de Parme, auprès de l'infant don Ferdinand. Puis, à son retour en France et jusqu'à sa mort, il vécut dans une sorte de demi-retraite près de Beaugency, ne faisant chaque année que quelques brefs séjours à Paris et consacrant tous ses loisirs à revoir et compléter ses oeuvres. C'est à celles-ci qu'il a travaillé, à peu près exclusivement, pendant toute sa vie. Avant son séjour à Parme, il avait publié, presque coup sur coup, l'Essai sur l'origine des connaissances humaines (1746), le Traité des systèmes (1749), le Traité des sensations (1754) et le Traité des animaux (1755). Des années de préceptorat il avait ensuite rapporté un vaste Cours d'études, comprenant une Grammaire, un Art d'écrire, un Art de raisonner, un Art de penser, sans compter, pour finir, une série de volumes historiques, Histoire ancienne et Histoire moderne (1775). Peu après, cédant à l'actualité, il avait entrepris d'écrire un essai sur le Commerce et le gouvernement considérés relativement l'un à l'autre (1776). L'année même de sa mort, il avait enfin donné, à la requête du gouvernement polonais, la Logique, ou les premiers développements de l'art de penser (1780), et il avait commencé une étude sur la Langue des calculs, qui parut, inachevée, dans l'édition posthume des OEuvres Complètes (1798). Chez lui, toute activité semble n'avoir répondu constamment qu'à un goût très vif de la réflexion et de l'analyse intellectuelle.   

« Etienne Bonnot de Condillac L'oeuvre de Condillac ne compte pas parmi les plus grandes.

Mais, par la lucidité des analyses qu'elle présente, aussi bien que par l'influence qu'elle a longtemps exercée, elle occupe une place relativement importante dans l'histoire de la pensée française.

Elle s'apparente au reste, par les thèmes qu'elle n'a cessé de reprendre, à quelques-unes des plus hautes philosophies. De la vie même de Condillac (1714-1780), aucun événement notable n'est à retenir : cette vie fut toute simple et marquée seulement par la publication d'ouvrages de philosophie, d'histoire et d'économie politique.

Issu d'une famille qui était originaire du Briançonnais, Condillac fit ses premières études à Lyon, mais vint de bonne heure à Paris, où il suivit sans enthousiasme des cours de théologie et s'initia plus volontiers aux sciences et à la philosophie.

Dès 1740, après avoir reçu les ordres, il fréquenta les milieux littéraires, fit notamment la connaissance de Rousseau et de Diderot, et commença d'écrire.

De 1758 à 1767, il exerça des fonctions de précepteur, à la cour de Parme, auprès de l'infant don Ferdinand.

Puis, à son retour en France et jusqu'à sa mort, il vécut dans une sorte de demi-retraite près de Beaugency, ne faisant chaque année que quelques brefs séjours à Paris et consacrant tous ses loisirs à revoir et compléter ses oeuvres.

C'est à celles-ci qu'il a travaillé, à peu près exclusivement, pendant toute sa vie.

Avant son séjour à Parme, il avait publié, presque coup sur coup, l'Essai sur l'origine des connaissances humaines (1746), le Traité des systèmes (1749), le Traité des sensations (1754) et le Traité des animaux (1755).

Des années de préceptorat il avait ensuite rapporté un vaste Cours d'études, comprenant une Grammaire, un Art d'écrire, un Art de raisonner, un Art de penser, sans compter, pour finir, une série de volumes historiques, Histoire ancienne et Histoire moderne (1775).

Peu après, cédant à l'actualité, il avait entrepris d'écrire un essai sur le Commerce et le gouvernement considérés relativement l'un à l'autre (1776).

L'année même de sa mort, il avait enfin donné, à la requête du gouvernement polonais, la Logique, ou les premiers développements de l'art de penser (1780), et il avait commencé une étude sur la Langue des calculs, qui parut, inachevée, dans l'édition posthume des OEuvres Complètes (1798).

Chez lui, toute activité semble n'avoir répondu constamment qu'à un goût très vif de la réflexion et de l'analyse intellectuelle. Plus que des événements extérieurs, ce qui compte, dans son cas, ce sont les influences subies et les projets que ces influences ont fait naître.

De fait, Condillac a été séduit de très bonne heure par la pensée anglaise, et plus particulièrement par les idées de Locke et de Newton.

Il médita longuement l'Essai sur l'entendement humain de LockeH029M2, qui avait été traduit en français dès 1700 par Pierre Coste.

L'étude objective de l'entendement, qui s'y trouvait entreprise pour la première fois avec une exceptionnelle ampleur, l'attira, lui plut et le retint.

A son tour, il jugea légitime une analyse de l'esprit dont le but est de rattacher toutes les connaissances humaines aux simples données de l'expérience, et il songea vite à refaire l'oeuvre de Locke, en lui donnant plus de rigueur et de précision qu'elle n'en avait.

Dans le même temps, il lut avec soin les Philosophiæ naturalis principia mathematica de NewtonE100, qui avaient paru en 1687.

L'exemple de la loi de la gravitation universelle, dont semblait dépendre toute la physique, lui parut en tous points admirable et vraiment décisif.

Il y vit l'expression parfaite d'une science qui est tout entière fondée sur l'expérience et qui, délaissant comme arbitraires et fragiles les hypothèses métaphysiques, reste uniquement soucieuse des faits.

Les enseignements de Locke et de NewtonE100 se conjuguèrent d'ailleurs de façon très naturelle et définirent un programme de recherches. A LockeH029 fut empruntée plus particulièrement l'idée d'une analyse descriptive de l'entendement ; à NewtonE100, celle d'un principe unique, expliquant toute la nature.

Mais du rapprochement de ces deux idées naquit l'ambition d'obtenir, dans l'étude de l'esprit humain telle que LockeH029 l'avait esquissée, un succès comparable à celui qu'avait connu NewtonE100 dans les sciences physiques.

Condillac voulut réduire à un seul principe, qui lui-même fût un fait, tout ce que peut apprendre l'observation de l'homme : " On voit, disait-il dans l'Introduction à l'Essai, que mon dessein est de rappeler à un seul principe tout ce qui concerne l'entendement humain, et que ce principe ne sera ni une proposition vague, ni une maxime abstraite, ni une supposition gratuite, mais une expérience constante, dont toutes les conséquences seront confirmées par de nouvelles expériences.

" Par là s'éclaire la double poursuite, sans cesse reprise, d'une enquête de psychologue et d'un rêve de logicien. A ne considérer d'abord que l'enquête du psychologue, on observe chez Condillac une rare pénétration de vues : non seulement un approfondissement de l'empirisme anglais, mais aussi, et surtout, l'explication très juste de quelques-uns des facteurs qui commandent le développement de l'esprit.

Dans l'Essai de 1746, Condillac ne se borne pas à rappeler, avec LockeH029 et contre DescartesH015, que toutes les connaissances humaines viennent de l'expérience ; il ne se contente pas de décrire en conséquence la genèse progressive des facultés de l'âme ; il s'applique plus encore, avec un sens aigu des conditions concrètes dans lesquelles s'opère l'éveil de l'intelligence, à rendre compte du passage de la pensée spontanée à la pensée réfléchie ; il esquisse à cette occasion une théorie du langage et tente de comprendre par elle l'avènement de la réflexion intelligente ; il fait voir que la maîtrise de la pensée dépend, chez l'homme, de l'invention et de l'usage des signes, langage et pensée s'impliquant au fond l'un l'autre : " Pour avoir des idées sur lesquelles nous puissions réfléchir, nous avons besoin d'imaginer des signes.

" Mais, avec le Traité de 1754, il descend plus bas dans l'analyse et, pour écarter toute confusion entre l'empirisme qu'il professe et l'idéalisme que Berkeley paraît défendre, il cherche à suivre la formation même de la conscience en face du monde : par une fiction dont d'autres avant lui avaient tracé l'esquisse, il imagine " une statueH013M1 organisée intérieurement comme nous ", mais dont " l'extérieur tout de marbre " ne permettrait d'abord aucun usage des sens ; il établit de la sorte, contre le sens commun, que les données immédiates de l'expérience ne révèlent pas d'emblée l'existence des choses ; il soutient qu'un lent apprentissage est seul capable de transformer des impressions toutes subjectives en un savoir authentique ; s'arrêtant dès lors à l'examen des sensations tactiles, il montre que c'est en fait l'enseignement du toucher qui permet de découvrir le monde et d'achever l'éducation des sens ; il ajoute que cet enseignement, grâce à la mobilité dont le jeu s'avère décisif, est en somme à la racine de toute connaissance, comme si la main était la véritable institutrice de l'homme : le toucher est le " seul sens qui juge par lui-même des objets extérieurs " et qui, par suite, " apprend aux autres sens à juger " de ces mêmes objets.

Sans doute Condillac n'a-t-il en vue, lorsqu'il décrit ainsi la genèse de la conscience ou celle de la réflexion, que la continuité d'un développement : " Toutes les opérations de l'âme, en un mot, ne sont que la sensation même qui se transforme différemment.

" Mais, au cours de ses analyses, il met en lumière deux thèses majeures l'une, sur le toucher qui informe la conscience élémentaire, l'autre, sur le langage qui assure la réflexion intelligente et par là il ouvre la voie, de façon nouvelle, à une psychologie solide et forte. Si l'on considère d'autre part le rêve du logicien, qui sans cesse reparaît dans l'oeuvre du psychologue, on doit reconnaître aussi la rigueur des principes méthodologiques constamment invoqués.

Prenant en considération l'exemple des Sciences mathématiques sur lesquelles il s'attarde dans la Logique et la Langue des calculs Condillac préconise le recours à une méthode générale, qu'il définit sous le nom d'analyse.

Il soutient, en des termes qui ne vont pas sans rappeler certaines expressions de DescartesH015, que l'esprit humain n'est pas capable, devant une difficulté, de " tout embrasser d'un seul coup d'oeil ", et qu'il doit au contraire décomposer en ses différents aspects l'objet dont il veut faire l'étude : " Il en. »

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