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Est-ce parce que les hommes ne sont pas égaux qu'ils ont inventé l'idée d'égalité ?

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« Il s'agit ici de comprendre pourquoi les hommes ont inventé l'idée d'égalité.

Votre sujet contient un présupposé assez contestable, ou du moins que l'on peut remettre en question pour le critiquer : que l'idée d'égalité serait une invention et non une réalité.

La seule réalité dans cette perspective serait l'inégalité foncière et naturelle existant entre tous les hommes.

S'il est clair que nous ne sommes pas tous égaux en terme de capacités physiques ou intellectuelles, notre essence d'homme nous conduit à affirmer cependant une égalité nécessaire et consubstantielle à notre nature.

Il faut donc montrer que l'idée d'égalité n'est pas seulement une " idée " mais que cela correspond à quelque chose qu'il faut au moins postuler pour fonder l'harmonie du corps social. Cette idée d'égalité (devant la loi) permet alors de pallier aux différences qui existent effectivement entre tous les hommes, mais qui ne peuvent constituer une justification pour des privilèges ou des distinctions de classes. En ce sens, l'idée d'égalité est avant tout un idéal, donc une nécessité de la raison et de la morale. [Les hommes sont inégaux naturellement.

Inégalités de force et d'intelligence.

Or, toute société exige l'égalité de tous.

Les hommes ont donc inventé l'idée d'égalité afin de pouvoir vivre en bonne intelligence les uns avec les autres.] La nature ne peut pas servir de modèle à la société humaine Les lois de la nature sont celles de la survie.

Les plus faibles y sont soumis aux plus forts. Dans le « Gorgias » de Platon, Calliclès affirme que la loi est un artifice arbitraire.

Elle traduit une morale d'hommes faibles qui préfèrent la mort à la vie ; elle est faite par la multitude des faibles, dans leur intérêt, contre les forts ; elle ne prône l'égalité que pour abaisser les forts au même niveau que les faibles.

Le droit véritable devrait se fonder sur la loi réelle et immuable de la nature, qui est la loi des hommes libres et forts. Telle est la vue du sophiste Calliclès qui se plaît alors à imaginer un homme suffisamment doué pour secouer, briser, rejeter toutes les chaînes de la loi positive et fouler au pied les textes écrits.

Cet homme-là, dit-il, échapperait à toute sorte de servitude.

Il serait un maître.

Le héros, qui agirait au nom du « droit de nature » assimilable à sa force et qui briserait le joug de la loi, serait une espèce de surhomme, un être exceptionnel, s'il en est.

Il réaliserait la domination du puissant sur le faible. Les lois sont au service des faibles.

C'est l'explication proposée par Calliclès.

Nous savons que Calliclès oppose ce qu'il présente comme une notion naturelle du juste (il est juste d'établir sa domination sur les plus faibles sans se laisser soi-même dominer), à une notion conventionnelle du juste (il est juste de s'abstenir d'établir sa domination sur les plus faibles).

Calliclès a aussi des idées sur l'origine de telles conventions : à ses yeux, elles répondent au désir des plus faibles de ne pas être dominés, malgré l'absence de force qui les prédispose à l'être.

Ce qui permet aux plus faibles de traduire leurs conceptions sous forme de lois réelles, c'est qu'ils trouvent une force de compensation dans leur nombre, qui les porte au pouvoir en dépit de leur absence de valeur personnelle : « le malheur est que ce sont, je crois, les faibles et le grand nombre auxquels est due l'institution des lois.

Aussi instituent-ils ces lois par rapport à eux-mêmes et à leur avantage ». En produisant une explication de ce type, Calliclès entend rendre compte tout particulièrement du régime démocratique, dans lequel s'impose la loi du nombre, mais on peut penser que plus généralement, les plus démunis sont davantage demandeurs de législation, car là où rien n'est interdit, la force peut se donner libre cours, et les puissants règnent sans entraves : la demande même de loi serait nécessairement le fait des faibles, que le processus d'établissement des lois soit ou non démocratique. Une explication de même nature se retrouve au XIX ième chez Nietzsche, non pas exactement à propos de l'établissement des législations, mais plus largement à propos de l'émergence des valeurs juridiques et morales. Reprenant dans la « Généalogie de la morale », l'opposition entre forts et faibles.

Nietzsche estime que l'évaluation appartient tout d'abord aux forts (la « superbe brute blonde »), satisfaits de leur force et de la vie, mais que l'histoire humaine connaît une « révolte des esclaves », dont les grands représentants sont le Christ, Socrate, et les socialistes.

Incapable d'une véritable action, le « troupeau » des faibles compense son incapacité à dominer par une condamnation, et, poussé par le « ressentiment », s'arrange pour trouver mauvais le fait naturel de la domination par les forts, renversant ainsi imaginairement la relation hiérarchique. De l'égalité dépend la justice Ainsi que l'écrit Benjamin Constant: «L'inégalité est ce qui seul constitue l'injustice.

Si nous analysons toutes les injustices générales ou particulières, nous trouverons que toutes ont pour base l'inégalité» (Écrits politiques).

Pour vivre ensemble les hommes ont inventés des lois chargés d'annuler les inégalités naturels. Dans un célèbre passage de "La République", Glaucon, ami de Socrate prend la parole pour tenter de définir la justice.

Contre Thrasymaque qui vient de soutenir que la justice est naturelle et se confond avec la loi du plus fort, Glaucon pense, au contraire, que la justice résulte d'une convention: « Glaucon : - Ecoute ce que je me suis chargé d'exposer d'abord, c'est-à-dire quelle est la nature et l'origine. »

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