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En quoi la maîtrise du feu relève-t-elle de la culture ?

Extrait du document

« La maîtrise du feu apparaît comme l'un des moments fondateurs de l'humanité.

Cette découverte est l'une des plus révolutionnaires de notre histoire, en ce sens qu'elle a profondément bouleversé le mode de vie des hommes de la préhistoire.

Les premières manifestations du feu ont même fait l'objet de ritualisations magiques.

Mais si le feu a fait l'objet d'un culte, la maîtrise du feu relève-t-elle elle-même de la culture ? Poser le lien entre maîtrise du feu et culture revient à s'interroger sur les rapports qu'entretiennent culture et technique.

La technique relèvet-elle de la culture ? Selon E.

Morin, la culture « s'apprend, se réapprend, se retransmet, se reproduit de génération en génération.

Elle n'est pas inscrite dans les gènes, mais dans l'esprit-cerveau des êtres humains ».

Si l'on se conforme à cette définition, force est de constater que la technique relève bel et bien de la culture.

Pourtant, si elle en apparaît comme l'un des éléments (I), elle ne la constitue pas à elle seule (II).

Bien au contraire, il semble même qu'un développement irraisonné de la technique, sans le support d'autres formes de culture, apparaisse comme un facteur de destruction (III). I/ La technique est un des éléments de la culture 1.

Les étapes du progrès technique jalonnent l'histoire humaine Les innovations techniques conditionnent d'autres mutations culturelles, qu'elles soient artistiques, religieuses ou sociales.

Ces mutations impliquent que le progrès technique soit un moteur de l'histoire humaine.

Le développement des techniques agricoles a ainsi généré la sédentarisation des hommes, et de nouvelles constructions sociales. L'histoire est dès lors jalonnée par les mutations techniques, comme le montre la période préhistorique, actuellement divisée en un âge de la pierre taillée, un âge de la pierre polie, et un âge des métaux. 2.

La technique est une manifestation du génie proprement humain L'innovation technique apparaît surtout comme une capacité proprement humaine.

Aristote, dans Les parties des animaux, met ainsi en évidence que la technique prolonge l'œuvre de la nature. Selon Bacon et Descartes dans Le discours de la méthode, l'homme se fait possesseur de la nature par la technique : par elle, la nature est mise au service de l'homme. Dans la sixième partie du « Discours de la méthode » (1637), Descartes met au jour un projet dont nous sommes les héritiers.

Il s'agit de promouvoir une nouvelle conception de la science, de la technique et de leurs rapports, apte à nous rendre « comme maître et possesseurs de la nature ».

Descartes n'inaugure pas seulement l'ère du mécanisme, mais aussi celle du machinisme, de la domination technicienne du monde. Si Descartes marque une étape essentielle dans l'histoire de la philosophie, c'est qu'il rompt de façon radicale et essentielle avec sa compréhension antérieure.

Dans le « Discours de la méthode », Descartes polémique avec la philosophie de son temps et des siècles passés : la scolastique, que l'on peut définir comme une réappropriation chrétienne de la doctrine d'Aristote. Plus précisément, il s'agit dans notre passage de substituer « à la philosophie spéculative qu'on enseigne dans les écoles » une « philosophie pratique ».

La philosophie spéculative désigne la scolastique, qui fait prédominer la contemplation sur l'action, le voir sur l'agir.

Aristote et la tradition grecque faisaient de la science une activité libre et désintéressée, n'ayant d'autre but que de comprendre le monde, d'en admirer la beauté.

La vie active est conçue comme coupée de la vie spéculative, seule digne non seulement des hommes, mais des dieux. Descartes subvertit la tradition.

D'une part, il cherche des « connaissances qui soient fort utiles à la vie », d'autre part la science cartésienne ne contemple plus les choses de la nature, mais construit des objets de connaissance.

Avec le cartésianisme, un idéal d'action, de maîtrise s'introduit au cœur même de l'activité de connaître. La science antique & la philosophie chrétienne étaient désintéressées ; Descartes veut, lui, une « philosophie pratique ».

« Ce qui n'est pas seulement à désirer pour l'invention d'une infinité d'artifices qui feraient qu'on jouirait sans aucune peine des fruits de la terre et de toutes les commodités qui s'y trouvent, mais principalement aussi pour la conservation de la santé […] » La nature ne se contemple plus, elle se domine.

Elle ne chante plus les louanges de Dieu, elle est offerte à l'homme pour qu'il l'exploite et s'en rende « comme maître & possesseur ». Or, non seulement la compréhension de la science se voit transformée, mais dans un même mouvement, celle de la technique.

Si la science peut devenir pratique (et non plus seulement spéculative), c'est qu'elle peut s'appliquer dans une technique.

La technique n'est plus un art, un savoir-faire, une routine, elle devient une science appliquée. D'une part, il s'agit de connaître les éléments « aussi distinctement que nous connaissons les métiers de nos artisans ».

Puis « de les employer de même façon à tous les usages auxquels ils sont propres ».

Il n'est pas indifférent que l'activité artisanale devienne le modèle de la connaissance.

On connaît comme on agit ou on transforme, et dans un même but.

La nature désenchantée n'est plus qu'un matériau offert à l'action de l'homme, dans son propre intérêt.

Connaître et fabriquer vont de pair. D'autre part, il s'agit « d'inventer une infinité d'artifices » pour jouir sans aucune peine de ce que fournit la nature.

La salut de l'homme provient de sa capacité à maîtriser et même dominer techniquement, artificiellement la nature. Ce projet d'une science intéressée, qui doive nous rendre apte à dominer et exploiter techniquement une nature désenchantée est encore le nôtre. Or la formule de Descartes est aussi précise que glacée ; il faut nous rendre « comme maître et possesseur de la nature ».

« Comme », car Dieu seul est véritablement maître & possesseur.

Cependant, l'homme est ici décrit comme un sujet qui a tous les droits sur une nature qui lui appartient (« possesseur »), et qui peut en faire ce que bon lui semble dans son propre intérêt (« maître »).. »

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