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DESCARTES: Il y a une vérité dont la connaissance me semble fort utile

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Il y a une vérité dont la connaissance me semble fort utile : qui est que, bien que chacun de nous soit une personne séparée des autres, et dont, par conséquent, les intérêts sont en quelque façon distincts de ceux du reste du monde, on doit toutefois penser qu'on ne saurait subsister seul, et qu'on est, en effet, l'une des parties de l'univers, et plus particulièrement encore l'une des parties de cet terre, l'une des parties de cet État, de cette société, de cette famille, à laquelle on est joint par sa demeure, par son serment, par sa naissance. Et il faut toujours préférer les intérêts du tout, dont on est partie, à ceux de sa personne en particulier ; toutefois avec mesure et discrétion', car on aurait tort de s'exposer à un grand mal, pour procurer seulement un petit bien à ses parents ou à son pays ; et si un homme vaut plus, lui seul, que tout le reste de sa ville, il n'aurait pas raison de se vouloir perdre pour la sauver. Mais si on rapportait tout à soi-même, on ne craindrait pas de nuire beaucoup aux autres hommes, lorsqu'on croirait en retirer quelque petite commodité, et on n'aurait aucune vraie amitié, ni aucune fidélité, ni généralement aucune vertu ; au lieu qu'en se considérant comme une partie du public, on prend plaisir à faire du bien à tout le monde, et même on ne craint pas d'exposer sa vie pour le service d'autrui, lorsque l'occasion s'en présente ; voire on voudrait perdre son âme, s'il se pouvait, pour sauver les autres. DESCARTES

« Il y a une vérité dont la connaissance me semble fort utile : qui est que, bien que chacun de nous soit une personne séparée des autres, et dont, par conséquent, les intérêts sont en quelque façon distincts de ceux du reste du monde, on doit toutefois penser qu'on ne saurait subsister seul, et qu'on est, en effet, l'une des parties de l'univers, et plus particulièrement encore l'une des parties de cet terre, l'une des parties de cet État, de cette société, de cette famille, à laquelle on est joint par sa demeure, par son serment, par sa naissance.

Et il faut toujours préférer les intérêts du tout, dont on est partie, à ceux de sa personne en particulier ; toutefois avec mesure et discrétion', car on aurait tort de s'exposer à un grand mal, pour procurer seulement un petit bien à ses parents ou à son pays ; et si un homme vaut plus, lui seul, que tout le reste de sa ville, il n'aurait pas raison de se vouloir perdre pour la sauver.

Mais si on rapportait tout à soi-même, on ne craindrait pas de nuire beaucoup aux autres hommes, lorsqu'on croirait en retirer quelque petite commodité, et on n'aurait aucune vraie amitié, ni aucune fidélité, ni généralement aucune vertu ; au lieu qu'en se considérant comme une partie du public, on prend plaisir à faire du bien à tout le monde, et même on ne craint pas d'exposer sa vie pour le service d'autrui, lorsque l'occasion s'en présente ; voire on voudrait perdre son âme, s'il se pouvait, pour sauver les autres. Introduction Ce qui est le plus utile aux hommes, c'est leur connaissance des liens qu'ils entretiennent avec tout ce qui les entoure. C'est à cette seule condition qu'ils satisferont leur propre intérêt.

Or, est-ce paradoxalement en privilégiant uniquement leur intérêt particulier qu'ils en retireront le maximum de satisfaction ? En répondant à la reine Élisabeth, qui lui demandait « comment mesurer les maux qu'on se donne pour le public », Descartes montre qu'un intérêt bien compris passe par notre remise en place au sein d'un tout. L'homme peut-il, en effet, subsister seul, sans se rapporter à un tout dont il serait une partie ? Et n'est-ce pas en se souciant de ce tout qu'il retrouve son intérêt propre, qu'il ne doit jamais perdre de vue ? 1.

L'homme ne peut subsister seul, et il est la partie d'un tout A.

L'homme est séparé des autres et a des intérêts différents, mais ne peut pour autant subsister seul Descartes débute par une démarche très pragmatique, qui consiste à se demander ce qui est le plus utile pour l'homme.

Il y répond en évoquant le statut d'une personne individuelle.

Celle-ci, en tant qu'individu, se distingue des autres dans sa singularité.

De ce fait, ses intérêts lui sont propres et ne recoupent pas ceux des autres. Pour autant, et malgré cette différence irréductible, l'homme ne peut subsister seul, et il a besoin des autres pour satisfaire ses besoins naturels.

L'homme se voit donc dans l'obligation, par sa nature même, de tisser des liens sociaux. B.

Nous sommes une partie d'un tout Si l'homme ne peut subsister seul, c'est qu'il s'apparente à une partie par rapport à un tout.

Le fait d'être une partie assure sa particularité, mais n'empêche pas sa dépendance par rapport à quelque chose de plus vaste que lui.

C'est ainsi que l'homme peut être vu comme une partie de différents touts, qui vont du plus général au plus particulier. L'homme, c'est d'abord une partie de l'Univers, qui obéit aux mêmes lois que celles qui gouvernent l'infinité de la matière, lois voulues par la providence divine.

Il est également une partie de cette Terre, et se range notamment dans l'ensemble des êtres vivants.

Plus localement encore, l'homme fini appartient à une communauté humaine, qui regroupe l'ensemble des citoyens d'un État, comme entité politique ordonnée ; il appartient également à une société, dans laquelle il partage un vécu commun, et enfin à une famille, où se créent des liens de parenté et des liens affectifs. C.

Notre nature nous relie aux autres Mais qu'est-ce qui relie l'individu à ces différentes totalités, et en particulier à la dernière, où les liens sont les plus rapprochés ? C'est d'abord par le fait, à cause de notre finitude, de devoir vivre dans une demeure précise, c'est-àdire dans un lieu et un temps donnés.

C'est également par un acte volontaire, le serment qui entraîne des obligations réciproques ; et c'est enfin par nécessité biologique, avec la naissance, où l'enfant dépend des soins que lui procurent les parents. Ainsi, même si l'homme possède toujours une individualité, il existe toujours également en relation avec autre chose que lui-même.

Mais alors que doit-il privilégier, ses intérêts particuliers ou ceux du tout ? Et dans quelle mesure doit-il faire l'un ou l'autre ? 2.

Il est nécessaire de privilégier les intérêts du tout, mais avec mesure et discrétion A.

L'homme est une partie d'un tout, dont il doit privilégier les intérêts Après avoir montré l'ordre d'importance du tout par rapport aux parties, et avoir insisté sur les dépendances que cela entraîne, Descartes en tire les conséquences quant à l'attitude à adopter. Il apparaît beaucoup plus raisonnable de privilégier les intérêts du tout, plutôt que celui de sa personne particulière. Car c'est du tout, d'abord, que l'individu retire un maximum de satisfactions, alors que, par soi-même, comme il a déjà été dit, l'homme ne peut trouver les moyens de sa propre subsistance.

Privilégier les intérêts du tout, c'est trouver pour moi-même beaucoup plus de retombées générales et positives que dans le cas contraire. B.

Ces privilèges sont à accorder avec mesure et discrétion : il ne faut pas s'exposer à un grand mal, ni se perdre si on. »

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