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DESCARTES: De la définition des choses obscures

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Il y a bien des choses que nous rendons plus obscures en voulant les définir, parce que, comme elles sont très simples et très claires, nous ne pouvons mieux les connaître ni les percevoir que par elles-mêmes. Bien plus, il faut mettre au nombre des principales erreurs qui se puissent commettre dans les sciences, l'erreur de ceux qui veulent définir ce qui doit seulement être conçu, et qui ne peuvent pas distinguer les choses claires des choses obscures, ni discerner ce qui, pour être connu, exige et mérite d'être défini de ce qui peut très bien être connu par soi-même. Je ne crois pas, en effet, qu'il y ait eu jamais personne d'assez stupide pour avoir besoin d'apprendre ce que c'est que l'existence avant de pouvoir conclure et affirmer qu'il existe. Il en est de même pour le doute et pour la pensée. J'ajoute même qu'il est impossible d'apprendre ces choses autrement que par soi-même et d'en être persuadé autrement que par sa propre expérience et par cette conscience ou par ce témoignage intérieur que chacun trouve en lui lorsqu'il se livre à un examen quelconque. Si bien que, tout de même qu'il est inutile de définir le blanc pour faire comprendre ce que c'est, pour savoir ce que c'est que le doute, et la pensée, il suffit de douter et de penser. Cela nous apprend tout ce que nous pouvons savoir à cet égard et même nous en dit plus que les définitions les plus exactes. DESCARTES

Toute science gagnerait, semble-t-il, en rigueur, si elle commençait par définir les notions qu'elle utilise. À cet égard, les mathématiques fournissent un exemple très encourageant : la définition contribue à leur exactitude. Or, dans ce texte, Descartes montre que certaines choses ne peuvent être définies, ou même ne doivent pas l'être, sous peine d'être rendues plus obscures. S'il en est ainsi, c'est que ces choses font l'objet d'une expérience intérieure qui se passe du langage. C'est donc, d'une manière générale, à travers le problème précis de la définition, la question des rapports de la pensée et du langage qui est posée.

« Il y a bien des choses que nous rendons plus obscures en voulant les définir, parce que, comme elles sont très simples et très claires, nous ne pouvons mieux les connaître ni les percevoir que par elles-mêmes.

Bien plus, il faut mettre au nombre des principales erreurs qui se puissent commettre dans les sciences, l'erreur de ceux qui veulent définir ce qui doit seulement être conçu, et qui ne peuvent pas distinguer les choses claires des choses obscures, ni discerner ce qui, pour être connu, exige et mérite d'être défini de ce qui peut très bien être connu par soi-même. Je ne crois pas, en effet, qu'il y ait eu jamais personne d'assez stupide pour avoir besoin d'apprendre ce que c'est que l'existence avant de pouvoir conclure et affirmer qu'il existe.

Il en est de même pour le doute et pour la pensée. J'ajoute même qu'il est impossible d'apprendre ces choses autrement que par soi-même et d'en être persuadé autrement que par sa propre expérience et par cette conscience ou par ce témoignage intérieur que chacun trouve en lui lorsqu'il se livre à un examen quelconque.

Si bien que, tout de même qu'il est inutile de définir le blanc pour faire comprendre ce que c'est, pour savoir ce que c'est que le doute, et la pensée, il suffit de douter et de penser.

Cela nous apprend tout ce que nous pouvons savoir à cet égard et même nous en dit plus que les définitions les plus exactes. Introduction Toute science gagnerait, semble-t-il, en rigueur, si elle commençait par définir les notions qu'elle utilise.

À cet égard, les mathématiques fournissent un exemple très encourageant : la définition contribue à leur exactitude.

Or, dans ce texte, Descartes montre que certaines choses ne peuvent être définies, ou même ne doivent pas l'être, sous peine d'être rendues plus obscures.

S'il en est ainsi, c'est que ces choses font l'objet d'une expérience intérieure qui se passe du langage.

C'est donc, d'une manière générale, à travers le problème précis de la définition, la question des rapports de la pensée et du langage qui est posée. A.

Explication I.

Il y a des choses qu'on ne peut ni ne doit définir. 1.

« Des choses ». Des choses, et non pas toute chose.

Descartes n'est pas contre le fait de définir, mais ce qui fait l'intelligence d'un esprit, c'est sa capacité à savoir distinguer les cas où il faut définir et ceux où il ne le faut pas (I.

9-11).

Il ne faut pas définir les choses qui sont « très simples et très claires ». 2.

« Très simples ». — Le simple s'oppose au complexe, au composé.

Ce qui est composé peut être défini, car la définition va le décomposer en ses éléments constituants. Exemple : « L'homme est un animal raisonnable » : la définition ramène une notion complexe aux deux éléments qui la composent. — Cette décomposition ne peut aller à l'infini.

Au bout du compte, on doit bien finir par tomber sur des éléments eux-mêmes indécomposables : ce sont des éléments simples.

Ces éléments ne peuvent alors être définis, car alors on les définirait : • soit par des éléments complexes: mais on ne peut définir le complexe par le simple, et le simple par le complexe, sans tourner en rond ! • soit par des éléments simples, mais alors si le simple est encore décomposable en éléments plus simples, il n'est pas vraiment simple.

Au fondement de la possibilité de toute définition, existent donc des éléments indéfinissables.

Ils servent à expliquer toute chose, mais eux-mêmes ne peuvent être expliqués par rien. — Le simple est connu « par soi-même » (1.4 et 11), et non par référence à autre chose que soi.

Définir, en revanche, c'est toujours expliquer une chose par une autre.

Ce qui est défini est donc connu par autre chose que soi. 3.

«Très claires ». — Le mot «clair» est une métaphore empruntée aux choses sensibles : quand un objet est dans la lumière, il est visible.

De même, il existe une clarté et une obscurité dans la connaissance intellectuelle.

Peut-on définir la clarté? Elle paraît au contraire faire partie de ces notions indéfinissables, car toute définition de la clarté la présupposerait encore.

Elle viserait en effet à éclaircir cette notion.

Or, pour reconnaître qu'une notion est éclaircie, il faut savoir ce qu'est la clarté. — Si une chose est claire, en la définissant, j'interpose entre elle et moi une définition qui la voile.

À la présence de la chose, je substitue des mots, des signes qui désignent la chose.

L'esprit s'éloigne ainsi de la source de son savoir ; il s'absente de lui-même, de l'épreuve qu'il fait de la vérité, pour ne plus opérer que. »

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