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David HUME

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Dans toutes les créatures qui ne font pas des autres leurs proies et que de violentes passions n'agitent pas, se manifeste un remarquable désir de compagnie, qui les associe les unes aux autres. Ce désir est encore plus manifeste chez l'homme ; celui-ci est la créature de l'univers qui a le désir le plus ardent d'une société, et il y est adapté par les avantages les plus nombreux. Nous ne pouvons former aucun désir qui ne se réfère pas à la société. La parfaite solitude est peut-être la plus grande punition que nous puissions souffrir. Tout plaisir est languissant quand nous en jouissons hors de toute compagnie, et toute peine devient plus cruelle et plus intolérable. Quelles que soient les autres passions qui nous animent, orgueil, ambition, avarice, curiosité, désir de vengeance, ou luxure, le principe de toutes, c'est la sympathie : elles n'auraient aucune force si nous devions faire entièrement abstraction des pensées et des sentiments d'autrui. Faites que tous les pouvoirs, et tous les éléments de la nature s'unissent pour servir un seul homme et pour lui obéir ; faites que le soleil se lève et se couche à son commandement ; que la mer et les fleuves coulent à son gré ; que la terre lui fournisse spontanément ce qui peut lui être utile et agréable : il sera toujours misérable tant que vous ne lui aurez pas donné au moins une personne avec qui il puisse partager son bonheur, et de l'estime et de l'amitié de qui il puisse jouir. David HUME

« « Dans toutes les créatures qui ne font pas des autres leurs proies et que de violentes passions n'agitent pas, se manifeste un remarquable désir de compagnie, qui les associe les unes aux autres.

Ce désir est encore plus manifeste chez l'homme ; celui-ci est la créature de l'univers qui a le désir le plus ardent d'une société, et il y est adapté par les avantages les plus nombreux.

Nous ne pouvons former aucun désir qui ne se réfère pas à la société.

La parfaite solitude est peut-être la plus grande punition que nous puissions souffrir.

Tout plaisir est languissant quand nous en jouissons hors de toute compagnie, et toute peine devient plus cruelle et plus intolérable.

Quelles que soient les autres passions qui nous animent, orgueil, ambition, avarice, curiosité, désir de vengeance, ou luxure, le principe de toutes, c'est la sympathie : elles n'auraient aucune force si nous devions faire entièrement abstraction des pensées et des sentiments d'autrui.

Faites que tous les pouvoirs, et tous les éléments de la nature s'unissent pour servir un seul homme et pour lui obéir ; faites que le soleil se lève et se couche à son commandement ; que la mer et les fleuves coulent à son gré ; que la terre lui fournisse spontanément ce qui peut lui être utile et agréable : il sera toujours misérable tant que vous ne lui aurez pas donné au moins une personne avec qui il puisse partager son bonheur, et de l'estime et de l'amitié de qui il puisse jouir.» HUME. [Introduction] Quel avantage trouvons-nous à vivre en société, alors que celle-ci peut être considérée comme une source de gênes et de contraintes multiples ? Hume néglige ici ces dernières pour insister sur le fait que la société répond à notre désir le plus profond, parce qu'elle assure à chacun la présence d'un autre, qui lui est absolument nécessaire pour ressentir plus complètement ce qu'il vit.

Quels que puissent être ses défauts, la vie en société a d'abord des avantages radicaux : elle donne à nos sentiments leur véritable plénitude et confère à notre existence une densité que la solitude ne peut jamais atteindre. [I.

Le désir de société] La vie en compagnie ne concerne sans doute que des créatures pacifiques entre elles, et qui ne sont pas soumises à de trop violentes passions.

Si les membres d'une même espèce se combattent et se considèrent réciproquement comme des proies potentielles, il leur est impossible de s'associer, puisqu'une telle association les condamnerait à s'entretuer.

Mais Hume considère qu'il existe des espèces animales qui montrent déjà à leur niveau leur capacité à « cohabiter » ou du moins à vivre sur un même territoire.

Toutes échappent à la violence interne que déchaîneraient de trop fréquentes peurs, colères, ou rages.

Il est évidemment possible de confirmer cette première affirmation du texte en énumérant aussi bien les fourmis que les éléphants, les castors que les girafes...

Ce qui importe est de souligner que le désir de compagnie se manifeste de manière particulièrement forte chez l'homme. Celui-ci est de tous les êtres vivants le plus ardemment désireux d'une société, mais aussi le mieux adapté « par les avantages les plus nombreux » : la vie en société lui apporte des satisfactions qu'il ne peut connaître en dehors d'elle – ce qui signifie bien que la présence des autres est pour l'être humain un véritable besoin « existentiel ».

C'est que tout désir de l'homme se réfère à la société : il ne peut se formuler pleinement et trouver sa satisfaction complète que dans un entourage social. En s'intéressant à ce que peuvent devenir, en l'absence des autres, les deux pôles de l'affectivité, Hume indique que toute positivité y devient impossible.

Le plaisir diminue lorsqu'on est seul à en profiter, et la peine augmente : ainsi ce qui devrait satisfaire a-t-il tendance à s'affaiblir, tandis que la souffrance augmente, ce qui illustre l'affirmation selon laquelle « la parfaite solitude est peut-être la plus grande punition que nous puissions souffrir ». La solitude nous empêche en effet, simplement parce que nous y manquons de toute complicité (quel qu'en soit le mode) avec autrui, de développer pleinement nos potentialités. [II.

Nécessité de la sympathie] L'absence de l'autre nous condamne à ressentir seul : le plaisir non partagé, ou plus simplement encore non montré à un autre, est moins fort.

La peine dont je ne peux me plaindre à personne, ou dont personne ne peut me consoler, est nécessairement plus difficile à supporter. L'autre n'est donc pas exactement, dans de telles situations, l'équivalent de moi-même : il est d'abord mon témoin ou mon secours, et sa présence m'importe parce qu'il peut penser à mon propos ou sentir en même temps que moi.

La sympathie désigne cette co-présence d'un être sensible, capable de ressentir en même temps que moi.

Mais cela ne signifie pas qu'il ressent les mêmes choses que moi : les affects peuvent être dissymétriques,. »

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