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David HUME

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J'ai déjà observé que la justice naît de conventions humaines ; et que celles-ci ont pour but de remédier à des inconvénients issus du concours de certaines qualités de l'esprit humain et de la situation des objets extérieurs. Les qualités de l'esprit sont l'égoïsme et la générosité restreinte : la situation des objets extérieurs est la facilité de les échanger jointe à leur rareté en comparaison des besoins et des désirs des hommes (...). On remarque aisément qu'une affection cordiale met tout en communauté entre amis ; et que des époux, en particulier, perdent l'un et l'autre leur propriété et ne connaissent plus le tien et le mien qui sont si nécessaires et qui pourtant causent tant de trouble dans la société humaine. Le même effet résulte d'un changement des circonstances où vivent les hommes ; quand par exemple il y a une assez grande abondance d'un bien pour contenter tous les désirs des hommes ; dans ce cas disparaît complètement toute distinction de propriété et tout demeure en commun. Nous pouvons observer cette situation pour l'air et pour l'eau, qui sont pourtant les plus estimables des objets extérieurs (...). Voici donc une proposition qu'on peut, à mon avis, regarder comme certaine : c'est uniquement de l'égoïsme de l'homme et de sa générosité limitée, en liaison avec la parcimonie avec laquelle la nature a pourvu à la satisfaction de ses besoins, que la justice tire son origine. David HUME

« J'ai déjà observé que la justice naît de conventions humaines ; et que celles-ci ont pour but de remédier à des inconvénients issus du concours de certaines qualités de l'esprit humain et de la situation des objets extérieurs.

Les qualités de l'esprit sont l'égoïsme et la générosité restreinte : la situation des objets extérieurs est la facilité de les échanger jointe à leur rareté en comparaison des besoins et des désirs des hommes (...). On remarque aisément qu'une affection cordiale met tout en communauté entre amis ; et que des époux, en particulier, perdent l'un et l'autre leur propriété et ne connaissent plus le tien et le mien qui sont si nécessaires et qui pourtant causent tant de trouble dans la société humaine.

Le même effet résulte d'un changement des circonstances où vivent les hommes ; quand par exemple il y a une assez grande abondance d'un bien pour contenter tous les désirs des hommes ; dans ce cas disparaît complètement toute distinction de propriété et tout demeure en commun.

Nous pouvons observer cette situation pour l'air et pour l'eau, qui sont pourtant les plus estimables des objets extérieurs (...). Voici donc une proposition qu'on peut, à mon avis, regarder comme certaine : c'est uniquement de l'égoïsme de l'homme et de sa générosité limitée, en liaison avec la parcimonie avec laquelle la nature a pourvu à la satisfaction de ses besoins, que la justice tire son origine. Hume réfute à la fois ceux qui pensent que l'homme est par nature incapable de générosité et ceux qui pensent qu'il est par nature dévoué à ses semblables.

Ni ange, ni bête, l'homme a besoin de recourir à l'artifice de la justice, parce que les circonstances la rendent nécessaire. POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE Dès le début du texte, Hume se situe sur le terrain de l'expérience et de l'observation.

Son ambition est d'étudier l'homme tel qu'il est et non tel qu'il devrait être, ou tel que nos préjugés nous le font dépeindre. Or il ressort de cette observation que la nécessité d'établir des règles de justice naît de la réunion de certaines circonstances.

D'une part, l'homme est capable de générosité, mais elle se limite à ses proches.

L'homme est naturellement partial.

D'autre part, les biens qui sont à sa disposition ne sont pas illimités.

Leur rareté oblige à établir des règles de propriété. Mais c'est seulement la réunion de ces deux facteurs qui rend la justice nécessaire.

Il suffit de faire varier l'un des éléments (par exemple, la rareté), pour que le second (la partialité) ne soit pas un obstacle à l'entente des hommes entre eux.

Si tous les biens étaient abondants, le besoin d'établir des règles de propriété disparaîtrait. Objet du texte Il s’agit ici pour Hume de mettre au jour les mécanismes qui préside à l’origine de la justice non comme vertu naturelle mais bien plutôt comme vertu artificielle.

A fortiori, c’est de la définition de ce en quoi consiste la nature humaine qui fait ici l’objet d’une analyse, puisque c’est d’elle que naît la justice comme vertu artificielle. Problématique Comment Hume parvient-il à montrer quelle est l’origine de la justice, comprise non comme vertu naturelle mais comme vertu artificielle ? Dans quelle mesure une telle origine trouve-t-elle sa source dans la mise au jour de ce en quoi consiste la nature humaine ? Dans quelle mesure, partant du point de vue empiriste, parvient-il à contredire à la fois les morales de l’égoïsme tout comme la position naïve qui consiste à faire de l’homme un être à la générosité sans limite – constructions qui ne relèvent en rien de l’expérience, mais qui sont, au contraire, de pures abstractions qui ne sauraient, comme telles, rendre compte de la réalité (a fortiori de la réalité) de la nature humaine) ? Structure argumentative Nous pouvons dégager trois principaux moments qui constitue la progression argumentative de Hume : - 1er Mouvement : Ce 1er mouvement s’étend du début du texte jusqu’à « des désirs des hommes ».

Il s’agit pour Hume de montrer de quoi et à partir de quelles conditions la vertu artificielle que constitue la justice apparaît dans la société. - 2e Mouvement : Ce 2e mouvement s’étend de « on remarque aisément » jusqu’à « objets extérieurs ».

Il montre ainsi quel rôle joue la bienveillance – certes limitée – des hommes ainsi que celui des conditions extérieures favorables dans l’établissement de la paix.

Il en résulte donc qu’il s’agit ici d’un argument visant, par. »

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