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Dans quelles mesures peut on distinguer le rêve de la réalité ?

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« Introduction Si lorsque je rêve, je crois véritablement agir, comment m'assurer lorsque j'agis réellement en ce monde que je ne rêve point ? Comment distinguer le rêve de la réalité ? Si le rêve m'apparaît comme une réalité imaginaire, comment être certain que je n'imagine pas la réalité dans laquelle je vis ? Il s'agit là non pas d'un problème psychologique, mais d'une question ontologique : si le rêve possède une réalité propre, comment la distinguer de notre réalité ? Et notre réalité est-elle la véritable réalité ? Ou n'est-elle que l'image d'une réalité supérieure ? Première partie - Si, à l'instar des sceptiques, je puis douter que le monde dans lequel j'agis est réel, comment distinguer l'état de veille du rêve ? Diogène Laërce donne ainsi une description extravagante de P yrrhon, qui doutant de l'existence de toutes choses, « n'évitait rien », « ne se gardait de rien », « affrontait tous les risques comme ils venaient, les charrettes, les précipices, les chiens » et « ne se fiait nullement à ses sensations » (cf.

article sur Pyrrhon par J. Brunschwig in Philosophie grecque, dir.

M.

C anto-Sperber, PUF, 1997, pp.463-475).

La perception ne me permet pas d'assurer la réalité du monde extérieur, et donc de distinguer entre le rêve et la réalité (cf.

aussi Hume, Enquête sur l'entendement humain, chap.

XII). - Le rêve peut donc être défini comme une réalité imaginaire qui défie ma perception : lorsque je rêve, je crois véritablement agir dans la réalité, et rien dans mes sensations rêvées ne me permet de distinguer mon rêve de la réalité.

Dès lors, comment être assuré que je ne rêve pas lorsque je crois être éveillé (cf. Descartes, 1 e Méditation métaphysique) ? - Ce n'est pas par la perception, mais par l'entendement seul que je puis distinguer le rêve de la réalité.

En effet, l'entendement me permet d'accéder à des « idées claires et distinctes » que je ne puis avoir en dormant (cf.

exemple du morceau de cire dans la 2 e Méditation métaphysique). Dans la deuxième Méditation, Descartes observe un morceau de cire "qui vient d'être tiré de la ruche, il n'a pas encore perdu la douceur du miel qu'il contenait, il retient encore quelque chose de l'odeur des fleurs d'où il a été recueilli ; sa couleur, sa figure, sa grandeur sont apparentes : il est dur, il est froid, on le touche, et si vous le frappez, il rendra quelque son".

Connaître un corps, c'est apparemment le connaître par les caractères que nous percevons : son odeur nous renseigne sur son origine, ainsi que sa couleur, sa consistance, sa température, le son qu'il rend, sa forme et sa taille.

A pprochant ce bloc de cire d'une flamme, sa "saveur s'exhale, l'odeur s'évanouit, sa couleur se change, sa figure se perd, sa grandeur augmente, il devient liquide, il s'échauffe, à peine le peut-on toucher, et quoiqu'on le frappe il ne rendra plus aucun son".

S'agit-il de la même cire ? T ous les caractères distinctifs par lesquels on le connaissait ont disparu, mais "il faut avouer qu'elle demeure, et personne ne le peut nier".

Les organes des sens ne peuvent donc rien nous apprendre de stable ni de certain.

Ce que nous percevons de la cire ne nous apprend rien d'elle.

Fondue, il ne demeure d'elle que quelque chose de flexible, d'étendu et de muable.

Imaginant la cire je ne connaîtrai rien de plus d'elle ; flexible et malléable, elle pourrait prendre une infinité de figures que mon imagination ne peut se représenter.

Par conséquent, il reste qu'il n'y a que "mon entendement seul qui conçoive ce que c'est que cette cire".

Conçue par l'entendement ou l'esprit, cette cire n'est pas une autre cire que celle dont je fais l'expérience sensible, mais seule une inspection de l'esprit me permet de la connaître, et non pas la vue, le toucher ou l'imagination. Deuxième partie - Si c'est par l'entendement seul que je puis distinguer le rêve de la réalité, c'est parce que celui-ci me donne accès à l'aspect intelligible des choses, et non à leur aspect sensible (morceau de cire de Descartes).

C'est dire que l'aspect sensible du monde n'est pas sa véritable réalité, mais que celle-ci consiste au contraire dans l'intelligible.

On distingue alors plusieurs degrés de réalité, dont l'une peut être dite pleinement réelle : c'est l'intelligible selon Descartes, ou le monde des Idées selon Platon (cf.

l'allégorie de la caverne dans La République, livre VII). - Si le monde sensible, selon Platon, n'est qu'une image du monde intelligible, qui est le véritable monde, ontologiquement parlant (qui possède la plénitude de l'être), il faut dire que le rêve est dans le même rapport à ce monde sensible que lui-même ne l'est à l'égard du monde intelligible : le rêve est comme une image de la réalité, à la fois semblable et différente de celle-ci (cf.

exemple des deux C ratyles dans le Cratyle, 431e-432d), mais n'est pas dénuée de toute consistance ontologique.

En d'autres termes, le rêve possède une réalité propre – celle de l'imaginaire –, mais d'un degré ontologique moindre que le monde sensible dit réel, et que le monde intelligible. - Si l'on peut ainsi distinguer le rêve de la réalité, à moins d'être insensé (Freud, dans L'interprétation des rêves, désigne sous le terme de « psychose » l'impossibilité d'opérer cette distinction), il s'agit là d'une question ontologique.

Or, selon Kant, nous ne pouvons connaître que les phénomènes, la manière dont les choses nous apparaissent, et non les noumènes, ou choses en soi.

Si l'on reprend l'exemple cartésien du morceau de cire, ce n'est pas la chose en soi, le morceau de cire tel qu'il est réellement, que nous considérons par l'entendement, mais seulement la manière dont il nous apparaît.

La connaissance n'est ainsi qu'une manière de « sauver les phénomènes », et toute question ontologique, portant sur la réalité ultime des choses, ne peut être que métaphysique : il est impossible de démontrer que les noumènes existent réellement, et par conséquent que la réalité qui nous est donnée soit véritablement (cf.

préface de la 2 nde édition à la Critique de la raison pure). Conclusion Si l'on peut donc distinguer le rêve de la réalité, à moins d'être insensé, et que même le sceptique, qui doute de l'existence véritable des choses mondaines, est conduit, dans sa vie quotidienne, à admettre l'impression de ses sens (sans juger de leur validité épistémologique, cf.

Sextus Empiricus, Esquisses pyrrhoniennes, I, 10-11), rien cependant nous permet d'affirmer avec certitude que ce qui nous apparaît comme la réalité possède véritablement une consistance ontologique, c'est-à-dire qu'elle est véritablement.

L'être de la réalité (dont Platon et Descartes affirmaient qu'il résidait dans l'intelligibilité) est en effet hors de portée de notre connaissance, comme l'a démontré Kant.

Dès lors, celle-ci ne porte pas sur les noumènes, dont on peut seulement postuler l'existence, mais sur les phénomènes.

Or, je ne puis jamais être assuré que la connaissance des phénomènes (scientifique ou empirique) soit concordante avec les choses en soi.

Elle me permet simplement d'agir rationnellement dans le monde en se fondant sur une certaine régularité des phénomènes (cf.

exemple du cinabre dans la Critique de la raison pure, fin du livre I « Analytique des concepts », p.113 P UF Quadrige).

Or, une telle régularité n'existe pas dans le monde imaginaire du rêve, où le devenir est souverain, les images ne cessant de se transformer en d'autres selon des enchaînements dépourvus de toute rationalité inhérente. >>> SECOND CORRIGE DE CE MEME SUJET: http://www.devoir-de-philosophie.com/passup-corriges-442b.html. »

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