Conscience: projet et mémoire
Extrait du document
«
Termes du sujet:
MÉMOIRE: 1.
— Faculté de se souvenir ; ensemble des fonctions psychiques par lesquelles nous pouvons nous
représenter le passé comme passé ; BERGSON distingue la mémoire-habitude qui naît de la répétition d'une action et
s'inscrit dans le corps, de la mémoire-souvenir qui, coextensive à la conscience, en retient tous les états au fur et à
mesure qu'ils se produisent.
2.
— Faculté gén.
de conserver de l'information.
3.
— Au sens concret, désigne tout ce
qui est capable de conserver de l'information, et, en part., les organes des ordinateurs ayant cette fonction.
La conscience vient du latin conscientia, qui signifie « accompagné » (cum) de « savoir » (scire).
Être conscient
signifie donc que lorsque l'on sent, pense, agit, on sait que l'on sent, pense ou agit.
Mais il convient de distinguer la
conscience directe ou immédiate, qui accompagne ainsi tous les actes du sujet, de la conscience réfléchie,
conscience qui se saisit elle-même comme conscience.
La première consiste à « avoir conscience », tandis que la
seconde consiste à « être conscient d'avoir conscience ».
Le passage de l'un à l'autre serait le fait de « prendre
conscience ».
On ne peut pas séparer la pensée du vécu.
Husserl : la conscience, une intentionnalité
• Husserl affirme que toute conscience est d'abord relation à autre chose qu'elle-même : « Toute conscience est
conscience de quelque chose ».
La conscience est avant tout projet, c'est-à-dire intentionnalité.
• La conscience n'est nullement une pure intériorité, elle a besoin de l'extériorité, du rapport au monde.
Être
conscient, c'est donc être présent au monde.
• La conscience est une activité qui donne sens au monde, qui le signifie.
Le sujet est ek-stase (le grec extasis
signifie "être hors de soi"), c'est-à-dire qu'il est sujet d'un monde qu'il projette lui-même.
Toute conscience est conscience de quelque chose (Husserl).
On trouve cette citation dans la seconde partie des « Méditations
cartésiennes » (1929).
Husserl (1859-1938) est le fondateur de la
phénoménologie et le précurseur de ce que l'on nomme l'existentialisme.
Le mot d'ordre de la phénoménologie est le retour aux choses mêmes.
Il s'agit
de se battre contre une conception positiviste de la science et contre les
faux savoirs, pour s'interroger à nouveaux frais sur la façon dot les choses
nous apparaissent.
Notre citation apparaît dans les « Méditations métaphysiques ».
Le titre dit
assez que Husserl entend se réapproprier le projet cartésien de fonder les
sciences.
Mais il tente aussi, dans ce qu'il nomme « les temps de détresse »,
de fonder une véritable science de l'esprit, en se battant à la fois contre le «
psychologisme » et contre le modèle des sciences objectives de la nature.
« Partout à notre époque se manifeste le besoin pressant d'une
compréhension de l'esprit [...] Ma conviction est que la phénoménologie a fait
la première fois de l'esprit en tant qu'esprit le champ d'une expérience et
d'une science systématique, et opéré par-là le retournement total de la tâche
de la connaissance.
»
On retrouve donc, au départ de notre texte, la même exigence de rigueur, de
radicalité que chez Descartes.
Husserl aussi pratique une sorte de doute qui
consiste à suspendre notre croyance naïve et naturelle au monde et à son
existence.
Lui aussi découvre comme première certitude le « Je pense ».
Mais Descartes était pressé de fonder la science de son temps, et s'il découvrait le dualisme, il faisait de la
conscience une chose qui pense.
Descartes établissait une sorte de parallèle entre la « chose étendue », le corps,
et la « chose qui pense », la conscience.
Husserl reste attentif à une propriété remarquable de la conscience : « Toute conscience est conscience de
quelque chose ».
Chaque fois que je pense, je pense bien à quelque chose.
Cela veut dire que le « Je », la conscience vise toujours
autre chose qu'elle-même.
La conscience, si l'on veut, n'est jamais enfermée en elle-même, elle est toujours le
mouvement de se dépasser vers autre chose, vers un objet.
Que la conscience soit toujours en mouvement vers
autre chose, cela signifie que toute activité psychique est toujours dirigée vers autre chose qu'elle-même.
On ne
peut plus, comme tendait à le faire Descartes, assimiler la conscience à une chose ou à une intériorité.
Précisément, ce qui différencie la conscience de toutes les choses, de tous les objets –qui sont ce qu'ils sont- c'est
son caractère dynamique, qui fait qu'elle est toujours rapport à autre chose qu'elle-même, dépassement,
mouvement, vers un autre.
La pensée porte toujours un rapport au monde.
Etre conscient, c'est d'abord être
présent au monde.
Les existentialistes (surtout Sartre) seront particulièrement attentifs à ce que Husserl nomme « intentionnalité », et
qui désigne ce caractère de la conscience d'être toujours conscience de.
Voici comment Sartre commente cette
formule : « Connaître, c'est s'éclater vers », s'arracher à la moite intimité gastrique pour filer là-bas, par delà soi ,.
»
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